De nouvelles directives sur l’intelligence artificielle pour les prix Juno

TORONTO — L’organisation des prix Juno affirme qu’une chanson «hypertruquée», comme celle où l’on peut entendre des voix similaires à Drake et The Weeknd interpréter un duo, ne sera pas admissible au gala de la musique canadienne l’an prochain.

Le président de l’organisation, Allan Reid, a déclaré que les nouvelles règles d’«admissibilité à l’IA» établissent les bases sur la manière dont l’intelligence artificielle (IA) peut être utilisée dans la création de chansons — et le faux duo des chanteurs canadiens ne se qualifierait pas. 

«C’est “Drake et The Weeknd”, mais ce ne sont pas eux, a-t-il affirmé à La Presse Canadienne. Ce ne sont pas leurs voix, ce sont des voix générées par l’IA.»

Avant l’ouverture, lundi, des candidatures pour les Junos 2024, les dirigeants ont précisé que les enregistrements admissibles pouvaient utiliser l’IA, mais que celle-ci ne pouvait pas être le «composant unique ou central» du projet.

Ce que cela signifie exactement reste sujet à interprétation, a concédé M. Reid. Il a expliqué qu’il s’agit d’une «une année d’apprentissage» pour l’organisation, avec les règles établies comme «une base de référence» sur laquelle travailler.

«Nous voulons nous assurer que les humains soient reconnus», a-t-il indiqué.

«Nous ne pouvons pas décerner un Juno à un projet d’IA.»

Ces nouveaux critères sont déposés tandis que l’industrie musicale est confrontée à une technologie en évolution rapide qui inonde internet de chansons «hypertruquées» qui utilisent des voix générées par ordinateur imitant les vrais artistes.

«Heart on My Sleeve», une chanson créée par un producteur américain qui se fait appeler Ghostwriter, a secoué l’industrie musicale plus tôt cette année avec les fausses prestations de Drake et The Weeknd.

Sa sortie a amené le géant de l’industrie du disque Universal Music Group, distributeur des deux artistes canadiens, à diffuser des avis de retrait aux diffuseurs de musique. Ils ont publié une déclaration qualifiant les chansons non autorisées créées par l’IA de «violation de nos accords et de la loi sur le droit d’auteur». 

Les Grammys ont récemment précisé que la chanson ne serait pas admissible à sa cérémonie de remise de prix.

Cependant, certaines chansons pourraient être autorisées.

Plus récemment, la musicienne originaire de Vancouver, Grimes, a publié un logiciel de modélisation vocale qui permet à ses admirateurs de l’ajouter à leur musique, à condition de partager les redevances avec elle.

M. Reid dit que les deux exemples pourraient conduire à des résultats différents aux Junos.

«Heart on My Sleeve» n’aurait jamais été admissible pour les prix, a-t-il déclaré, puisque son créateur n’est pas canadien et qu’aucun des deux chanteurs n’était impliqué. La chanson n’a pas non plus été commercialisée, car elle n’était pas autorisée.

Grimes est un cas quelque peu différent, a-t-il ajouté. Sa voix est créée par l’IA et n’est donc pas techniquement réelle, ce qui signifie qu’elle n’est pas admissible. Cependant, si le producteur humain qui a utilisé son logiciel vocal est canadien, les Juno examineraient l’affaire de manière plus approfondie.

Les formulaires de candidature ne demandent pas directement si la technologie de l’IA a été utilisée dans la création, a affirmé Liz Morgante, directrice principale des opérations de l’académie. Toutefois, tout projet qui soulèverait des questions sera examiné par les comités consultatifs musicaux des Junos.

«Il ne fait aucun doute que l’IA va révolutionner la façon dont la musique est créée», a noté M. Reid. 

«Et avec la vitesse à laquelle les choses évoluent (…) il est difficile pour nous de prédire où les choses vont aboutir à l’avenir, c’est pourquoi nous devons prendre les premières mesures et apprendre à mesure que les choses évoluent.»

La remise des prix Juno aura lieu le 24 mars 2024 à Halifax.