«Il faut faire attention avec le mot vol» – Alain Chainey

Combien de fois a-t-on vu un espoir d’une équipe de la Ligue nationale de hockey (LNH) être qualifié de vol au repêchage avant même d’avoir déposé un patin dans la meilleure ligue au monde? Un nombre incalculable de fois et, dans bien des cas, le joueur n’en était pas un, tout simplement. Pour l’ancien recruteur des Ducks d’Anaheim Alain Chainey, cette propension à qualifier certains espoirs de vols n’est pas sa tasse de thé.

«Il faut faire attention avec le mot vol. Il faut attendre que le joueur arrive dans la LNH et qu’il fasse ses preuves. Être repêché, c’est une chose. La seconde, c’est d’évoluer dans la LNH un jour. Il y en a pour qui ça prend plus de temps pour y arriver et vice-versa», a mis en garde l’ancien entraîneur-chef des Tigres de Victoriaville.

Dans les derniers mois, le phénomène des vols au repêchage faits par le Canadien de Montréal est merveilleusement bien documenté. Alexander Romanov, Mattias Norlinder, Jordan Harris, Sean Farrell, Cayden Primeau, Jan Mysak, Luke Tuch, Alexander Gordin et même Jakub Dobes ont tous été qualifiés, à un moment ou à un autre, de vol. Si le personnel de recruteurs du Canadien a fait du si bon travail, comment se fait-il que les 30 autres équipes aient passé à côté de ces supposés joyaux? «Les partisans du Canadien au Québec souhaitent bien entendu que les jeunes espoirs de l’équipe puissent arriver le plus rapidement possible avec le grand club. Il faut cependant se garder une petite réserve et attendre que ces joueurs arrivent dans la LNH. Là, nous pourrons parler d’un vol ou non. Il faut garder en tête que chaque fois qu’un joueur est repêché, chaque équipe pourrait dire que c’est un vol. Souvent, en première ronde, nous entendons des équipes dirent qu’elles ne pensaient pas que leur choix serait là à leur tour. Toutes les formations se sont probablement dit la même chose!»

Selon Chainey, il est préférable d’attendre au moins de deux à trois années avant de parler d’un vol. «Ça arrive que des choix de troisième ou quatrième tour deviennent d’excellents joueurs. Là, oui, ce sont des vols.  C’est notamment le cas de Brendan Gallagher chez le Canadien, un choix de cinquième ronde. Par contre, si le Canadien le trouvait si bon, pourquoi l’équipe ne l’a pas repêché plus tôt? Si le Canadien était certain du joueur qu’il deviendrait, Gallagher aurait été sélectionné beaucoup plus tôt.»

L’homme de 68 ans fait valoir que lorsqu’il était à l’emploi des Ducks, jamais il n’a parlé de vol lors de la sélection d’un joueur, car il est bien au fait qu’il y a un paquet d’impondérables qui peuvent survenir dans le développement du nouvel espoir. «Il peut arriver tellement de choses dans sa famille, dans son développement, dans ses influences, etc. Il y a trop de choses qui peuvent se passer avec un joueur rempli de talent.»

Le nom de Nikita Filatov revient rapidement dans la mémoire lorsque vient le temps de parler de hockeyeur au talent immense. Lorsque les Blue Jackets de Columbus l’avaient repêché au 6e rang en 2008, la troupe de l’Ohio était convaincue qu’elle venait de faire le coup du siècle avec cet attaquant. «Lors de notre entrevue avec lui, ça avait été un désastre complet. Ce joueur avait tellement de talent, ça lui sortait par les oreilles. Il avait les mains, le coup de patin, le dynamisme, etc. Son langage corporel n’était pas toujours bon. Nous avions peur au départ et après l’entrevue, nous savions que nous ne pouvions pas repêcher un gars comme ça pour notre équipe. Comme recruteur, tu dois toujours te demander si le joueur va rendre ton club meilleur? Si tu n’es pas certain, tu dois commencer à faire reculer le joueur sur ta liste.»

Pour la petite histoire, bien que Filatov ait été sélectionné au 6e rang, les Ducks ne l’avaient tout simplement pas sur leur liste de repêchage.