Visite des Kings: Québec solidaire demandera à la vérificatrice générale d’enquêter

MONTRÉAL — Québec solidaire demandera à la vérificatrice générale du Québec d’enquêter sur l’enveloppe de 5 à 7 millions $ destinée à attirer les Kings de Los Angeles à Québec, l’an prochain, pour disputer des matchs préparatoires au Centre Vidéotron.

En entrevue téléphonique avec La Presse Canadienne, le député solidaire de Rosemont et responsable du parti en matière d’éthique et de sports, Vincent Marissal, était encore estomaqué des révélations du quotidien La Presse, samedi matin, selon lesquelles, le gouvernement caquiste a eu recours au Fonds de la région de la Capitale-Nationale (FRCN), qui finance notamment les projets d’organismes communautaires et à but non lucratif. 

Le journaliste Tommy Chouinard révélait samedi que le fonds a été bonifié de la somme nécessaire et que la dépense serait étalée sur deux ans étant donné que les projets normalement autorisés ne peuvent pas dépasser trois millions de dollars.

«On a appris dans La Presse qu’il y a eu toutes sortes d’entourloupettes pour dégager les fonds qui n’étaient pas du tout prévus pour ça, qu’on a fait ça par décret en cachette et qu’on fait ça sur deux ans pour que ça passe», énumère M. Marissal, toujours absent de l’Assemblée nationale en raison d’une convalescence.

Le député n’hésite pas à dire que «cela ressemble à un détournement de fonds publics à des fins non légitimes».

«C’est inquiétant quand le gouvernement se met à tripoter des fonds publics pour un caprice du premier ministre qui aime bien, bien ça le hockey», poursuit M. Marissal, ajoutant que la gestion du FRCN mise notamment sur un droit de regard de la part des élus municipaux.

«Le maire Marchand (ndlr: Bruno, le maire de Québec) ne semblait même pas être au courant parce que ça s’est fait par décret, allègue M. Marissal. Tout est croche là-dedans.»

Le solidaire a salué les quelques députés caquistes ayant eux-mêmes remis en question la légitimité de la dépense. «Je félicite les élus qui s’y opposent et je les enjoins à faire part de leur point de vue au conseil des ministres, dit-il. Ça prend du courage pour défier M. Legault et de sortir sur la place publique.»

Un comportement de «quêteux»

Le député solidaire de Maurice-Richard, Haroun Bouazzi, déposera également une motion à l’Assemblée nationale en début de semaine prochaine pour demander au gouvernement de reculer sur son investissement controversé.

«C’est la seule chose à faire, souligne Vincent Marissal. Franchement, c’est honteux, c’est inexplicable et qui n’a pas de bon sens. Qu’il [le gouvernement] recule, c’est la seule chose à faire. C’est ce que la population demande. Je ne lâcherai pas le morceau.»

Le député de Rosemont ne croit pas que cette dépense décriée vise à obtenir le retour des Nordiques à Québec. «C’est plutôt la démonstration que le gouvernement se comporte en quêteux face à la LNH», lâche-t-il.

M. Marissal se dit en faveur du retour d’une équipe de hockey professionnelle dans la capitale, mais cela ne doit pas être géré avec des fonds publics, martèle-t-il.

«Ça doit se faire de façon réglementaire, dans un cadre comptable et dans les paramètres autorisés par la saine gestion des fonds publics», dit-il.

«La LNH, ce n’est pas le Comptoir Emmaüs, c’est une grosse business qui fait bien de l’argent», raille M. Marissal, en faisant référence à un organisme qui vient en aide aux plus démunis, notamment par la vente de biens et d’articles usagés qu’il reçoit en dons.

Libéraux et péquistes aussi stupéfaits

Le Parti libéral du Québec est lui aussi stupéfait de la mesure annoncée par le ministre Éric Girard, mercredi.

«Il n’y a plus de marge de manœuvre dans les coffres de l’État. On apprend ce matin que pour subventionner les deux matchs préparatoires de la LNH à Québec, le gouvernement Legault utilise un fonds régional pour des projets d’entreprises et d’organismes locaux sans but lucratif, le FRCN», a rappelé le chef intérimaire Marc Tanguay, dans une longue publication sur X, anciennement Twitter.

«Le Québec n’a pas financé les matchs de la LNH au Centre Vidéotron en 2017 et 2018. Récemment, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse n’a rien dépensé non plus pour la visite des Penguins de Pittsburgh à Halifax.  En dépensant ainsi 7M$ de l’argent des Québécois, considérez-vous [François Legault] toujours sur le terrain des vaches?», a conclu le député de LaFontaine.

Également sur X, le nouveau député péquiste de Jean-Talon, Pascal Paradis a lui aussi réagi à l’analyse de La Presse, mentionnant que la saga allait «de mieux en mieux (lire: de pis en pis)».

«Afin de donner un cadeau de 5 à 7 M$ aux milliardaires du hockey, le gouvernement a utilisé un fonds destiné aux organismes locaux sans but lucratif (le «Fonds de la région de la Capitale-Nationale») dont il a court-circuité les règles de fonctionnement.   Est-ce une « utilisation prudente des fonds publics »? Avec la transparence requise?  Fait-on appel à l’intelligence des gens de Québec et du Québec? À eux de juger», a écrit M. Paradis, dont le texte a été partagé par son chef, Paul St-Pierre Plamondon.

Duhaime réclame la transparence

En discours d’ouverture du congrès du Parti conservateur du Québec, samedi matin, le chef Éric Duhaime a demandé à ce que «tous les documents, rencontres, contrats» à ce sujet soient rendus publics par le gouvernement.

«Ils n’ont respecté aucune règle. Ils n’ont rien respecté, sans aucune transparence», a-t-il déploré, citant le texte de Tommy Chouinard.

«C’est indécent ce qui est en train de se produire présentement. Rarement avons-nous vu un gouvernement aussi insensible à la réalité du Québec», a déploré M. Duhaime, qui a souligné «l’ironie» que l’annonce du ministre des Finances Eric Girard ait eu lieu en pleine période de négociations avec le secteur public et quelques jours à peine après une mise à jour économique où il a averti que des mois difficiles seraient à venir.

«Je ne suis pas un syndicaliste, mais je suis tanné de voir le gouvernement gaspiller de l’argent pour ensuite dire qu’il n’a pas d’argent pour le monde qui ne peut pas se payer l’épicerie et pour payer ses employés», a-t-il ragé.