Trudeau met en garde contre tout lien entre le suicide d’un garçon et le gouvernement

OTTAWA — Justin Trudeau a déclaré mercredi qu’il était inapproprié d’établir un lien entre l’inaction présumée du gouvernement et la mort d’un garçon de la Colombie-Britannique qui s’est suicidé le mois dernier après avoir été victime de sextorsion en ligne.

Le premier ministre a fait ce commentaire alors qu’il fait face à une pression croissante pour tenir sa promesse, faite il y a quelques années, de légiférer contre les méfaits en ligne.

Lors de la période des questions aux Communes, mercredi, le chef de l’opposition néo-démocrate, Jagmeet Singh, a fait référence au décès du jeune de 12 ans à Prince George, en demandant à M. Trudeau quand le gouvernement libéral déposera le projet de loi promis depuis longtemps pour atténuer le contenu toxique en ligne.

M. Trudeau et les libéraux avaient promis dans leur plateforme électorale de 2019 de présenter un projet de loi afin de lutter contre les contenus illicites, «y compris les propos haineux» et «d’autres types de préjudices en ligne, comme la radicalisation, l’incitation à la violence, l’exploitation des enfants et la création ou la distribution de propagande terroriste».

Ils avaient fait une promesse similaire lors de la campagne électorale de 2021, ajoutant même qu’un gouvernement libéral réélu déposerait un projet de loi «au cours des 100 premiers jours», mais il ne l’a pas encore fait.

En soulignant cette chronologie, mercredi, M. Singh a évoqué la mort du garçon en Colombie-Britannique. La Gendarmerie royale du Canada (GRC) affirme qu’il a été victime de «sextorsion en ligne» — une personne est victime de chantage sous la menace que des images intimes d’elle-même obtenues de manière trompeuse seront révélées publiquement.

«Des incidents de ce type se produisent chaque année, a déclaré M. Singh mercredi. Quand le gouvernement déposera-t-il le projet de loi sur les méfaits en ligne pour protéger les enfants?»

M. Trudeau a déclaré aux députés que le gouvernement devait trouver le juste équilibre entre la liberté d’expression et les besoins des communautés sujettes à «la discrimination et à la marginalisation».

Le premier ministre a également mis en garde contre «l’association d’une tragédie survenue à Prince George avec les actions ou l’inaction d’un gouvernement en particulier», ajoutant qu’il était inapproprié d’établir un tel lien.

«Nous comprenons à quel point cela est horrible pour la famille et la communauté, et nous continuerons à travailler pour garantir que les enfants de tout le pays soient protégés», a-t-il dit. «Et c’est pourquoi nous souhaitons sérieusement progresser dans la protection contre les dangers en ligne.»

Changement de portefeuille

La GRC a déclaré qu’elle avait trouvé Carson Cleland chez lui avec une blessure par balle le 12 octobre. L’enquête a ensuite déterminé que le garçon de 12 ans s’était suicidé à la suite d’une sextorsion en ligne.

La GRC a publié un communiqué de presse sur sa mort cette semaine afin d’avertir les parents des risques croissants auxquels les enfants sont confrontés lorsqu’ils se connectent à Internet. Les parents du garçon ont depuis pris la parole publiquement pour avertir les familles des risques de prédateurs en ligne et de sextorsion.

Dans une déclaration faisant suite aux remarques du premier ministre Trudeau, M. Singh a expliqué que les défenseurs de la sécurité en ligne avaient demandé au gouvernement de prendre des mesures pour mieux protéger les enfants, et que les néo-démocrates soutiennent cet appel.

«Les libéraux ont fait une promesse, a déclaré M. Singh. Ils ont retardé l’action sur le projet de loi sur les méfaits en ligne.»

Depuis que M. Trudeau a remanié son cabinet, l’été dernier, le gouvernement a transféré au ministre de la Justice la responsabilité du projet de loi du ministre canadien du Patrimoine, qui pilote en général les projets de loi liés à la diffusion en continu et aux informations en ligne.

Le ministre de la Justice, Arif Virani, a déclaré que le projet de loi restait une priorité pour le gouvernement et que le retard était dû à la difficulté de trouver une manière de réglementer les plateformes en ligne.

Le gouvernement n’a pas encore fourni d’échéancier pour le dépôt du projet de loi; le ministre Virani espère le faire «bientôt».

La Chambre des communes devrait suspendre ses travaux le 15 décembre pour la période des Fêtes.

Le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, a déclaré mardi aux journalistes que la mort du garçon constituait un «rappel tragique» des risques que représentent les contenus illicites en ligne, en particulier pour les personnes vulnérables.

Les libéraux subissent également des pressions accrues pour agir contre les méfaits en ligne depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.

Au milieu d’une explosion de haine antisémite et islamophobe en ligne, les organisations de défense des Juifs canadiens ont demandé qu’Ottawa traite de tels propos haineux dans le projet de loi.

Bien qu’ils reconnaissent que le projet de loi pourrait susciter la controverse, plusieurs experts réunis l’année dernière par le gouvernement fédéral pour fournir des conseils sur la manière de légiférer sur les protections renouvellent maintenant leurs appels à des réformes urgentes à la lumière de la guerre au Proche-Orient.