«Postes de polices secrets»: des groupes chinois menacent de poursuivre la GRC

MONTRÉAL — Deux groupes communautaires chinois de la région de Montréal menacent de poursuivre la Gendarmerie royale du Canada (GRC) en justice pour ce qu’ils considèrent comme des allégations diffamatoires selon lesquelles ils auraient hébergé des «postes de police» secrets utilisés par Pékin pour intimider les membres de la communauté chinoise locale.

Le Service à la Famille chinoise du Grand Montréal et le Centre Sino-Québec de la Rive-Sud ont indiqué, dans une lettre d’avocat envoyée vendredi à la police fédérale, qu’ils intenteraient une poursuite si la GRC ne leur versait pas 2,5 millions $ en dommages présumés, en plus de s’excuser dans les 15 jours pour avoir confirmé qu’ils faisaient l’objet d’une enquête.

«La réputation que les organisations s’étaient bâtie au cours des 50 dernières années a été indûment ternie du jour au lendemain, impactant directement la communauté chinoise du Québec et mettant une cible sur le dos de notre client», écrit Maryse Lapointe, avocate des groupes et leur directeur, Xixi Li, dans le lettre.

L’avocate a indiqué que les deux organismes à but non lucratif ont perdu leur financement, les obligeant à supprimer les programmes d’éducation en français et de recherche d’emploi, ainsi qu’à réduire les services qu’ils offrent aux victimes de violence conjugale.

«N’oublions pas que les deux organismes communautaires en question sont les seuls centres offrant ce genre de service à la communauté chinoise du Québec. Tant que la réputation de nos clients ne sera pas rétablie, la communauté chinoise du Québec continuera de souffrir d’un manque flagrant de services spécifiquement adaptés à ses besoins», écrit Me Lapointe.

En mars dernier, la GRC a confirmé qu’elle enquêtait sur des allégations selon lesquelles des responsables du gouvernement chinois exploitaient des «postes de police» clandestins à partir des installations des deux groupes. À l’époque, les agents de la GRC avaient déclaré que les stations étaient utilisées pour faire pression sur les membres de la communauté chinoise au Canada, parfois en menaçant des amis ou des parents vivant en Chine.

La police fédérale a déclaré qu’elle enquêtait également sur des allégations similaires concernant des postes de police clandestins à Vancouver et à Toronto.

L’organisation espagnole de défense des droits humains Safeguard Defenders, qui a identifié plus de 100 commissariats de police présumés dans plus de 50 pays, a déclaré que ces commissariats servent à «persuader» les personnes que les autorités chinoises considèrent comme des fugitifs de retourner en Chine pour y faire face.

La GRC a refusé de commenter la menace de poursuites vendredi après-midi.

Cependant, la sergente Kim Chamberland a déclaré que l’enquête sur les crimes liés aux «soi-disant postes de police»  se poursuivait, ajoutant que la GRC estime que l’enquête a perturbé des activités illégales.

«Il est important de noter qu’une partie des activités sur lesquelles la GRC enquête se déroulent dans des endroits où d’autres services légitimes à la communauté sino-canadienne sont offerts», a-t-elle écrit dans un courriel. 

«La répression transnationale est complexe et prend de nombreuses formes, certaines intentionnelles, d’autres autrement», a-t-elle ajouté.