Les changements climatiques auront peu d’effet sur la production éolienne

MONTRÉAL — Les changements climatiques ne devraient pas rendre l’énergie éolienne plus difficile à produire dans les prochaines décennies, selon une étude conjointe de Nergica, Ouranos et d’Hydro-Québec.

L’étude, dévoilée mercredi, arrive à la conclusion que l’effet des changements climatiques sur les vents et le givre, deux conditions météorologiques qui jouent sur la production de l’énergie éolienne, ne sera pas significatif sur l’horizon 2031-2060 en Amérique du Nord.

Cette conclusion est une excellente nouvelle, commente la chargée de projet de Nergica, Marilys Clément. «Au Canada, nous, ce qu’on a besoin de savoir, c’est si nos éoliennes en climat froid vont continuer d’être performantes. (…) L’information qu’on vient de fournir, c’est que les éoliennes sont une valeur sûre.»

L’étude apporte ainsi de l’eau au moulin aux élus et aux promoteurs qui veulent miser sur cette filière, ajoute-t-elle. «C’est des informations essentielles à la planification de la transition énergétique.»

Le Québec produit près de 4000 mégawatts (MW) d’énergie éolienne. Le ministre de l’Économie et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, souhaite que cette production soit quadruplée d’ici 2040. «Ça, c’est le minimum», a-t-il dit lors d’une allocution devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, vendredi. 

L’humanité devra réduire significativement sa consommation d’énergie fossile pour limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius par rapport aux niveaux préindustriels, selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de l’ONU.

Au même moment, la consommation d’électricité est appelée à augmenter dans les prochaines décennies dans un contexte de transition énergétique. Au Canada, la Régie de l’énergie du Canada prévoit une progression de 47 % entre 2021 et 2050. 

Au Québec, Hydro-Québec estime qui lui faudra 100 térawattheures pour décarboner l’économie d’ici 2050. Ce chiffre pourrait même être plus élevé, a laissé entendre M. Fitzgibbon, récemment. 

Vents et givre

L’étude a porté sur deux variables: le vent et le givre. Au sujet du vent, les changements climatiques ne devraient pas avoir un effet significatif sur la production éolienne, croit la responsable scientifique d’Ouranos, Hélène Côté. 

«Le vent résulte d’une compétition entre plusieurs mécanismes, qui ne sont pas touchés de la même manière par les changements climatiques, explique-t-elle. Le bilan net de ça, ce sont des changements qui, pour l’instant, dans l’état actuel de la mobilisation climatique, sont négligeables.»

Il ne faut pas extrapoler ces conclusions pour l’Amérique du Nord à l’ensemble de la planète. Il est possible que les hypothèses soient différentes pour d’autres régions du monde, nuance Mme Côté. «Je n’irais pas là. Le comportement peut être différent au-dessus des océans, puis au-dessus des continents.»

Le givre, pour sa part, est déjà un enjeu de taille pour l’industrie éolienne, souligne Mme Clément. «Quand le givre va s’accumuler sur une éolienne, l’éolienne va performer moins. Pour un même vent, sa production va être inférieure. Il y a certaines éoliennes qui vont tourner plus lentement quand il va avoir du givre. Ça peut aller jusqu’à un arrêt complet, donc aucune production.»

Les périodes de givre peuvent aussi entraîner des bris et elles compliquent l’entretien des éoliennes, ajoute-t-elle.

Le givre entraînerait des pertes économiques annuelles estimées à 113 millions $ pour les producteurs éoliens au Canada, selon des données publiées en 2017 par Ressources naturelles Canada. «C’est une estimation parce que les promoteurs privés ne partagent pas la valeur des pertes énergétiques dues au givre», nuance Mme Clément.

L’étude anticipe des changements régionaux par rapport à la saison de givre, mais ceux-ci ne devraient pas avoir d’impacts significatifs sur la production éolienne. 

«Dans nos résultats, on n’a eu aucun changement significatif de givre dans les endroits où les parcs éoliens sont installés, donc plus au sud du Canada. On remarque une augmentation de la durée de la présence de givre dans le Grand Nord, en haut du cercle polaire. Puis on remarque qu’il va y avoir des saisons plus courtes à certains endroits près des océans, près de la baie d’Hudson.»