Le libéral Greg Fergus élu président de la Chambre des communes

OTTAWA — Le député libéral de Hull-Aylmer, Greg Fergus, a été élu mardi président de la Chambre des communes au terme d’un scrutin préférentiel secret, devenant ainsi le premier Noir à occuper ce poste au Parlement du Canada.

M. Fergus succède à Anthony Rota qui a été forcé de démissionner la semaine dernière pour avoir mené les élus à ovationner un ancien combattant nazi.

Dans un discours, peu avant le vote, Greg Fergus s’est engagé à être un président «ferme, réfléchi, collaboratif, cohérent et certainement juste». «Le respect sera mon credo», a-t-il déclaré.

Quant aux événements qui ont conduit à cette élection, il a noté que «les mots comptent, les symboles comptent» et qu’il entend «agir rapidement» pour «restaurer l’honneur de cette Chambre».

Il a témoigné de son «amour d’une vie» pour le Parlement, en relatant notamment qu’il a été page parlementaire 35 ans plus tôt où il a été «impressionné» par l’amour qu’a chaque député pour son pays et de sa volonté à représenter ses commettants.

Greg Fergus était l’un des quatre candidats libéraux sur les rangs. Les autres étaient le député de l’Île-du-Prince-Édouard Sean Casey et les Québécois Alexandra Mendès et Peter Schiefke. Le conservateur néo-écossais Chris d’Entremont, la néo-démocrate franco-ontarienne Carol Hugues et la cheffe du Parti vert du Canada Elizabeth May étaient les seuls candidats de leur formation politique.

Le député libéral québécois Stéphane Lauzon a annoncé à la dernière minute mardi qu’il retirait sa candidature «après considération».

Le nouveau président est entré immédiatement en fonction à la suite de son élection. Comme le veut la tradition, il a été traîné de force au fauteuil par des collègues députés – cette fois par le premier ministre Justin Trudeau et le chef conservateur Pierre Poilievre – en faisant semblant de résister. Le rituel vise à rendre hommage aux présidents de la tradition parlementaire qui ont risqué l’exécution pour remplir leurs fonctions.

Le président de la Chambre des communes a pour tâche d’arbitrer les délibérations, d’interpréter les règles, de maintenir l’ordre et de défendre les droits et les privilèges des députés. La fonction s’accompagne d’une augmentation de salaire et d’une résidence officielle connue sous le nom de La Ferme, à Kingsmere, en Outaouais.

Une fois qu’il a accédé au fauteuil, M. Fergus a continué de marteler son message et a indiqué qu’il entend «remettre les pendules à l’heure». Les débats sont les bienvenus aux Communes, a-t-il noté, mais ceux-ci doivent être empreints d’un «sens du respect et de décorum».

Le nouveau président a ensuite invité l’«honorable» premier ministre à prendre la parole. M. Trudeau lui a alors répondu du tac au tac, tout sourire et en tirant la langue, que les règles de la Chambre veulent qu’il soit reconnu comme «très honorable».

Le fait que le nouveau président soit le premier Canadien noir à devenir président de cette Chambre devrait inspirer «tous les Canadiens, ainsi que les plus jeunes qui veulent s’impliquer en politique», a déclaré M. Trudeau.

«M. le président, on vous a élu pour que vous nous aidiez à faire preuve de civilité dans nos débats, que vous nous rappeliez que nous sommes tous ici pour la même raison: servir les Canadiens», a-t-il poursuivi.

Dans un discours particulièrement partisan, le chef conservateur Pierre Poilievre a repris son thème du gros bon sens, suscitant des grognements dans les banquettes libérales.

«Cela s’appelle la Chambre des communes pour une raison: (notre) sagesse commune, nos ressources communes, notre patrimoine commun et notre avenir commun sont déterminés par les personnes élues pour siéger dans cette enceinte, et nous devons toujours agir avec bon sens», a-t-il déclaré.

En l’absence du chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, qui est à l’étranger, le leader à la Chambre de la formation, Alain Therrien, a présenté ses félicitations à M. Fergus et aux autres parlementaires qui «ont fait en sorte que notre choix a été difficile».

Les bloquistes n’ayant pas de candidat à la présidence, leurs voix jouaient d’ailleurs un rôle majeur dans le choix du président.

«J’ai confiance que vous serez un arbitre impartial, efficace et respectueux, a dit M. Therrien. J’ai très hâte de, justement, faire en sorte pour que les idées priment et soient au-delà de tout en ce parlement.»

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh, a également souligné «le poids incroyable que vous portez désormais et l’incroyable exploit que vous avez accompli».

M. Singh, lui-même issu d’une minorité visible, a insisté que les enfants «se reconnaîtront» lorsqu’ils verront son portrait dans les couloirs du parlement.

Il a dit souhaiter que le nouveau président s’assure que le ton des débats et le décorum soient respectés en Chambre. Il s’est dit «parfois gêné» lorsque des écoliers dans les tribunes observent les parlementaires «agir comme si c’est « cool » de crier après quelqu’un pendant qu’il parle».

Lors du vote, les députés devaient classer les candidats par ordre de préférence. Pour l’emporter, un candidat devait obtenir la majorité des voix. Le résultat détaillé du vote ni le tour de scrutin auquel M. Fergus a été élu n’ont été communiqués.

C’est généralement un député du parti au pouvoir qui devient président de la Chambre. Il était d’ailleurs attendu que les députés appuient des candidats en fonction de leur affiliation politique, bien que le président se doive d’être non partisan.

Les libéraux avaient d’ailleurs convoqué une réunion de leur caucus national tôt mardi pour discuter de cette élection où cinq des leurs députés se portaient candidats.

Les candidats d’Entremont, Mendès et Hughes avaient tous l’expérience d’avoir dirigé les travaux de la Chambre dans des fonctions de vice-président ou vice-président adjoint.

Conformément au règlement de la Chambre des communes, le processus électoral était le premier élément à l’ordre du jour.

C’est le doyen de la Chambre des communes, le bloquiste Louis Plamondon, qui supervisait l’élection. M. Plamondon est devenu président intérimaire après l’ajournement des travaux mardi dernier, moment où la démission de M. Rota entrait en vigueur.