Il y a des obstacles pour les jeunes Noirs en santé mentale, selon des expertes

TORONTO — Les jeunes Noirs du Canada sont confrontés à de nombreux obstacles pour accéder aux services de santé mentale – et les professionnels de la santé empirent parfois la situation, disent des expertes.

Une conférence à l’intention des médecins de famille, des infirmières praticiennes, des psychiatres, des psychologues, des travailleurs sociaux et d’autres professionnels de la santé s’est déroulée samedi à Toronto pour aborder ces problèmes et les aider à fournir des soins plus respectueux sur le plan culturel. Elle a été organisée par la Black Physicians’ Association de l’Ontario. 

«Les jeunes Noirs vivent le système de santé mentale très différemment des autres races», a déclaré la Dre Mojola Omole, présidente de l’association et chirurgienne générale à Toronto.

«Cela est dû en partie au racisme anti-Noirs et aux préjugés implicites», a expliqué Mme Omole, qui travaille également avec le Journal de l’Association médicale canadienne pour résoudre ces problèmes dans le domaine de la santé.

De nombreux jeunes Noirs ont vécu des traumatismes, parfois liés au racisme ou à la discrimination, qui peuvent affecter leur santé mentale et leur façon de s’exprimer, a-t-elle dit.

«Ce qui peut ressembler à de l’apathie est le signe de problèmes réels», a déclaré Mme Omole.

Si les jeunes Noirs parlent fort, cela est souvent perçu à tort comme une agression, a précisé Mojala Omole, soulignant que c’est quelque chose qu’elle a personnellement observé à l’hôpital où elle travaille.

La Dre Amy Gajaria, psychiatre pour enfants et adolescents au Centre de toxicomanie et de santé mentale de Toronto, convient que les jeunes Noirs sont souvent mal compris – et également mal diagnostiqués.

«Les travailleurs de la santé ont beaucoup de stéréotypes et, vous savez, nous avons peut-être intériorisé des préjugés inconscients envers les enfants et les familles noires», a affirmé Mme Gajaria, qui n’est elle-même pas noire.

«Les adolescents déprimés et anxieux peuvent être très irritables», a-t-elle poursuivi.

Chez les jeunes non-noirs, les professionnels de la santé mentale sont plus susceptibles de parvenir à un diagnostic d’anxiété, de dépression ou de traumatisme, d’après Mme Gajaria.

La réalité serait tout autre pour les jeunes Noirs.

«[Les cliniciens] voient la colère, ils voient l’irritabilité, et ils s’arrêtent là. Et alors leur diagnostic porte sur des choses comme le TDAH, le trouble oppositionnel avec provocation, ce qui ne rend vraiment pas service aux enfants.»

Mme Gajaria s’inquiète également du sort des jeunes Noirs qui ne reçoivent aucun traitement de santé mentale parce qu’il y a «un million d’obstacles à franchir dans un [centre de soins psychiatriques]».

Les jeunes Noirs attendent beaucoup plus longtemps que les autres patients pour avoir accès aux soins en santé mentale, a déclaré Tiyondah Fante-Coleman, chercheuse du projet Pathways to Care.

Mme Fante-Coleman, qui s’exprimait lors de la conférence de samedi, a fait mention d’une étude canadienne de 2015 qui démontrait que les enfants et les jeunes Noirs d’origine caribéenne attendaient en moyenne 16 mois pour obtenir des soins en santé mentale, contre sept mois pour les patients blancs.

Il existe diverses raisons pour expliquer cela, a expliqué Mme Fante-Coleman, notamment le fait que les jeunes Noirs peuvent être confrontés à plus d’obstacles financiers ou à un manque de personnel dans leur région.

Il y a un grand besoin pour davantage de données fondées sur la race au Canada pour améliorer les soins prodigués aux jeunes Noirs, a stipulé Mme Fante-Coleman.

«Nous disposons de très peu de données sur l’incidence et la prévalence des maladies mentales [par exemple la dépression, l’anxiété et la schizophrénie] au sein de la population nationale.»

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