Greffe cardiaque: une innovation pour augmenter le nombre de donneurs

MONTRÉAL — Une innovation technologique qui pourrait faire son arrivée au Canada au cours des prochains mois pourrait rehausser le nombre de cœurs disponibles pour une greffe.

Une étude clinique a récemment témoigné de l’efficacité de la technologie «Organ Care System» développée par la firme américaine TransMedics. Cette technologie permet aux médecins de «réanimer» le cœur d’un donneur qui est en mort cardiovasculaire et d’en tester le fonctionnement avant la greffe.

Lors de l’essai clinique, 94 % des 80 patients qui ont reçu un cœur réanimé étaient toujours vivants six mois après la greffe, comparativement à 90 % des 86 patients qui avaient reçu le cœur d’un donneur en mort neurologique.

«Les résultats à un an sont vraiment excellents, ils sont aussi bons, sinon meilleurs, que les décès neurologiques, a constaté le responsable médical du programme de transplantation cardiaque de l’Institut de cardiologie de Montréal, le docteur Normand Racine. Ça raccourcit le temps d’attente pour les patients.»

De plus, ajoute-t-il, environ 90 % des cœurs placés dans l’appareil ont ensuite pu être utilisés, «donc le rendement est excellent». Il souligne toutefois que les participants à l’étude avaient été soigneusement choisis, par exemple en ne faisant appel qu’à des individus de 49 ans et moins.

Aux États-Unis, a dit le docteur Racine, le recours à cette nouvelle technologie a augmenté le nombre de donneurs disponibles de 5 %, «donc c’est quand même beaucoup (…) et puis éventuellement je pense que ça va être plus que ça».

Un patient est considéré comme étant en mort cardiovasculaire quand son cœur a arrêté de battre depuis au moins cinq minutes, et ce même si une activité cérébrale minime persiste. À l’inverse, un patient en mort neurologique n’a plus aucune activité cérébrale, mais ses organes continuent à fonctionner avec l’aide de machines.

Ce sont fréquemment les organes des donneurs en mort neurologique qui sont prélevés à des fins de greffe, avec le consentement de la famille du patient et en respect avec les volontés exprimées par ce dernier avant sa mort.

On prélève aussi dans certains pays les organes de donneurs en mort cardiovasculaire, mais de tous les organes disponibles le cœur est celui qui tolère le moins bien l’interruption de la circulation.

C’est cet obstacle que la nouvelle technologie vise à surmonter en réalimentant le cœur en sang oxygéné et en en vérifiant le fonctionnement avant une greffe.

Au Québec, il est possible, dans certaines circonstances, de prélever des organes à des fins de greffe en l’absence d’un diagnostic de décès neurologique. Un protocole médical est déployé progressivement dans plusieurs hôpitaux pour prélever des reins et depuis peu des lobes de foie et les poumons, peut-on lire sur le site de Transplant Québec.

Le comité d’éthique de Transplant Québec se penche sur le dossier des dons après un décès cardiovasculaire depuis près de deux ans, a dit le docteur Racine.

«Ils avaient beaucoup de questions, ils veulent être sûrs que c’est fait dans les normes strictes, évidemment, a-t-il dit. On pense que probablement d’ici 6 à 8 mois, que le dossier va être officiellement accepté par Transplant Québec.»

Reste aussi à voir si le coût représentera un obstacle. À lui seul, l’appareil de TransMedics coûte environ 300 000 $ US. Chaque utilisation nécessite une trousse de perfusion de 75 000 $ US… sans aucune garantie que le cœur placé dans l’appareil pourra ensuite être greffé.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le prestigieux New England Journal of Medicine.