Des jeunes sont lassées d’attendre une loi sur la violence sexuelle dans les écoles

MONTRÉAL — Les jeunes en ont assez d’attendre et veulent que le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, accepte d’aller de l’avant rapidement avec une loi-cadre sur les violences sexuelles en milieu scolaire.

C’est ce qu’ont soutenu dimanche après-midi des membres du collectif La voix des jeunes compte, qui ont de nouveau pris la parole devant les médias pour faire valoir que les mesures actuelles qui visent à empêcher la violence à caractère sexuel dans les écoles ne sont pas suffisantes.

Selon elles, le seul moyen d’amener un changement drastique dans le réseau scolaire serait de faire adopter une loi consacrée à cet enjeu, similaire à celle qui a été adoptée en 2017 pour les milieux collégiaux et universitaires.

«Monsieur le ministre, avec la pénurie de main-d’œuvre, cette situation ne va pas s’arranger», a prévenu Theryanne, qui est membre de La voix des jeunes compte.

«Le cas des violences sexuelles est encore une fois balayé du revers de la main par le manque de ressources et nous remarquons que la sécurité des jeunes n’est pas la priorité « number one » du gouvernement», a-t-elle ajouté lors du point de presse tenu à Montréal.

À ses côtés, Kenza, une autre membre du collectif, a noté que le groupe a fait part de ses préoccupations au ministre Drainville en personne à Québec le printemps dernier, mais que «jusqu’à ce jour, on est encore en attente d’un retour d’appel».

«On se rend compte que les jeunes ne font toujours pas partie des décisions gouvernementales, a-t-elle déploré. Les jeunes devraient être davantage inclus, écoutés, et leurs besoins pris en compte, car ils sont les premiers concernés dans ces situations.»

Adressant ses propos au premier ministre François Legault, Kenza a soutenu que «l’inaction» du gouvernement dans l’encadrement des violences sexuelles à l’école a des conséquences «incommensurables», puisqu’elle «donne l’opportunité aux auteurs de passer à l’acte en toute impunité».

En ce sens, elle réclame des mesures qui iront au-delà des «affiches de sensibilisation dans les toilettes».

«Nous exigeons la loi et nous demandons officiellement à rencontrer le premier ministre Legault pour mettre fin à ce cafouillage, parce que les jeunes méritent mieux», a plaidé la jeune militante.

Les oppositions appuient les jeunes

En avril, la députée de Québec solidaire Ruba Ghazal a déposé un projet de loi à ce sujet, mais malgré le soutien des deux autres partis d’opposition à l’Assemblée nationale, celui-ci n’ a pas été inscrit à l’ordre du jour par le gouvernement.

Parallèlement, le ministre Drainville a déclenché, en mars, une «enquête générale» sur cet enjeu, dans la foulée de plusieurs incidents de violence sexuelle qui étaient survenus dans les mois précédents dans plusieurs centres de services scolaires et qui avaient été rapportés par les médias.

Dans son rapport, la Direction des enquêtes de la Direction générale des affaires internes a conclu qu’il existe plusieurs failles dans la gestion des plaintes concernant la violence sexuelle, notamment l’absence de communication entre les différents employeurs, le manque de soutien aux enseignants et un manque de formation des différents intervenants.

Le ministre avait promis, à la suite de la publication du rapport, d’apporter des changements législatifs pour répondre aux différentes recommandations, ce qui a été réitéré dimanche par son cabinet en réaction à la sortie publique du collectif.

«Lorsque le ministre a dévoilé le rapport d’enquête, comme il s’était engagé à le faire, il a affirmé qu’il n’excluait pas de procéder à des changements législatifs. Cette option est toujours sur la table», a indiqué le cabinet du ministre de l’Éducation dans un courriel transmis à La Presse Canadienne.

Mais lors de l’événement de La voix des jeunes compte, la députée libérale Marwah Rizqy et la porte-parole nationale du Parti québécois, Méganne Perry Mélançon, ont remis en question la réelle volonté du gouvernement, puisque les choses ne progressent pas aussi vite qu’elles le souhaiteraient.

«Il y a eu quelques avancées, mais on n’a toujours pas cette loi-cadre», a déploré Mme Rizqy.

«Dernièrement, le gouvernement a tenu une conférence de presse, encore une fois, pour dire qu’il arrivait avec un projet de loi. La conférence de presse, c’était au mois d’août. Le rapport sur les violences dans les écoles, ils l’ont reçu en juillet. Il me semble qu’on est capable de légiférer plus promptement, plus rapidement. Me semble qu’il y a une nécessité et une urgence d’agir.»

De son côté, Mme Perry Mélançon a rappelé que les membres de La voix des jeunes compte, qui ont lancé leur premier appel au changement il y a six ans, «ne sont même plus dans les écoles primaires et secondaires».

À son avis, les jeunes ont fait leur travail pour expliquer pourquoi la question des violences sexuelles à l’école est une priorité pour eux, et la balle est maintenant dans le camp du gouvernement afin de choisir de quelle façon il souhaite s’attaquer à ce problème.

«Là, il a le portrait, un rapport d’enquête — un énième rapport d’enquête —, ce qu’on attend, c’est un changement législatif», a-t-elle plaidé.