Éric Lapointe à Victoriaville : une décision cohérente de la Ville?

À la suite de l’annonce de la Ville de Victoriaville, concernant sa programmation de spectacles gratuits prévus pour l’été 2024, il est désolant de constater la sélection du chanteur Éric Lapointe en tête d’affiche pour cet événement. 

Rappelons qu’Éric Lapointe a plaidé coupable à des voies de fait contre une femme dans un contexte conjugal. Ce dernier a obtenu une absolution conditionnelle avec une période de probation d’un an. Ce choix est d’autant plus questionnable de la part de Victoriaville qui s’est pourtant proclamée « Municipalité alliée contre la violence conjugale » depuis l’adoption de sa résolution le 7 décembre 2020. Cette sélection de tête d’affiche ne s’inscrit-elle donc pas en contradiction avec leur engagement? 

Un enjeu important se pose ici : celui d’idolâtrer certains artistes sans la remise en question de leurs actions. En offrant et promouvant une plateforme publique pour un artiste ayant admis sa culpabilité face à l’agression physique d’une femme, ne venons-nous pas banaliser les formes de violences faites aux femmes, particulièrement dans un contexte conjugal? En effet, il est à se demander si le choix de cette programmation ne vient pas contribuer à la banalisation de l’acte criminel commis par le chanteur et l’oubli de la victime. De grands débats ont été menés sur ce dossier en mettant en lumière les enjeux et les répercussions pour le chanteur. Or, la victime est trop souvent mise de côté. 

Les discussions doivent être recentrées sur les victimes de violence conjugale, les impacts sur leur vie et les conséquences qui les marqueront à tout jamais. 

Au Québec, nous dénombrons depuis plusieurs années plus d’un féminicide par mois et on estime que près d’une femme sur trois est victime de violence conjugale. La remise en question est donc urgente et nécessaire. Seulement l’année dernière, La Volte-Face est venue en aide à 219 femmes victimes de violence conjugale et l’on rapporte 208 plaintes en contexte de violence conjugale dans la région de Victoriaville. Quel message envoyons-nous aux victimes lorsque l’on donne une vitrine aux auteurs de violence? 

Incitons-nous réellement les victimes à avoir confiance envers les institutions et à dénoncer leur agresseur? C’est une question à se poser face à la tenue prochaine de ce spectacle gratuitement offert par une municipalité où la violence conjugale est tristement une réalité bien présente. 

Si les efforts d’implantation des tribunaux spécialisés représentent une des avenues pour tenter de rebâtir la confiance avec les victimes, il est important de le faire à tous les niveaux. La violence conjugale est une problématique de société qui nécessite une réponse sociale. Chaque geste compte. En tant que municipalité, communauté, employeurs, collègues, voisins, mère/père, soeur/frère ou ami/es, nous pouvons faire une différence afin que les victimes ne se sentent pas coupables, n’aient plus honte et qu’elles se sentent soutenues et entourées. 

Ensemble, soyons solidaires et montrons-nous unis contre la violence.

La maison d’hébergement La Volte-Face est une ressource présente pour vous. Si vous craignez pour votre sécurité ou si vous avez besoin de parler à une intervenante, La Volte-Face est à l’écoute 24 h/7 j au 819-795-3444. 

Julie Croteau 

Directrice générale de la maison d’hébergement La Volte-Face