Violence physique et verbale : tolérance zéro au CIUSSS MCQ

Chaque jour, quatre employés du CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec subissent un geste de violence physique ou verbale de la part d’un usager sur leur lieu de travail. Ça, ce sont uniquement les personnes qui portent plainte. 

En réaction, le CIUSSS MCQ et les partenaires syndicaux lancent une campagne pour sensibiliser la population face à l’augmentation des gestes d’incivilité et de violence à l’égard de son personnel.

Depuis les deux dernières années, les déclarations d’employés ont augmenté de 20% pour signaler un événement en lien avec la violence de la part d’un usager. On parle d’employés qui se font cracher à la figure, qui se font invectiver, qui font face à des obscénités, qui se font prendre par le collet par le trou de la vitrine à l’accueil, qui se font menacer.

« Il faut sensibiliser la population au fait que ce n’est pas acceptable, même si on sait que la majorité de la population a un savoir-être irréprochable. Cette campagne de sensibilisation vise d’abord et avant tout à véhiculer le message que la violence envers notre personnel n’est pas tolérée dans nos milieux de soins et de vie, indique Antranik Handoyan, directeur des ressources humaines au CIUSSS MCQ. Juste pour l’année dernière, il y a eu 1400 déclarations de violence physique ou verbale et on sait que ce ne sont pas toutes les situations qui sont déclarées. Cette campagne permettra aussi de sensibiliser nos employés à l’importance de dénoncer ces situations. »

Une campagne bien visible à l’interne et de nouvelles actions en cours de déploiement

Avec en tête d’affiche plus d’une vingtaine d’employés, la campagne sera bientôt visible dans plusieurs des installations du CIUSSS MCQ, principalement dans les urgences, les salles d’attente et les accueils de plusieurs services. Des vidéos présentant les témoignages d’employés qui ont été victimes de violence physique ou verbale ont aussi été produites. Celles-ci peuvent être vues sur la page Web de la campagne.

« J’ai été blessé aux mains, j’ai été blessé aux épaules, j’ai eu une commotion cérébrale. Ce sont des choses qu’on tente d’éviter. On essaie d’outiller les travailleurs avec différents types de formation qui existent dans le CIUSSS, comme la formation Oméga qui vise la sécurité des travailleurs. On leur apprend des techniques verbales et psychologiques, en plus de leur apprendre certaines techniques de dégagement et de contrôle. On voudrait donner des soins de qualité dans un contexte non violent », témoigne Martin Gélinas, infirmier à l’hôpital et en centre d’hébergement en santé mentale dans la région dans l’une des vidéos.

« La violence au travail, c’est quelque chose qui nous touche directement, que l’équipe soignante soit en sécurité. Les infirmières, on prend tout sur nos épaules. Nous sommes habituées de trouver des excuses pour tout. C’est important d’assurer une sécurité. On a mis un agent de sécurité nouvellement ici à Fortierville. Ici, surtout de la violence verbale, des gens qui haussent le ton. Ce n’est pas normal qu’on ait à vivre ça comme infirmières », mentionne à son tour en vidéo Geneviève Cossette, infirmière clinicienne et assistante infirmière-chef à l’urgence de Fortierville.

Les violences physiques et verbales vécues par les employées ne sont pas sans impact. « Il y a des impacts qui sont plus sournois que d’autres, rappelle le directeur des ressources humaines. On a des gens qui tombent en arrêt de travail. C’est la deuxième cause de lésion professionnelle à l’intérieur de nos murs. Nos employés rentrent à la maison avec ce sentiment d’avoir été victimes de violence. C’est difficile, même si on a une équipe qui se mobilise pour eux. »

Cesser de banaliser la violence

Des formations et des outils permettant d’accompagner l’employé victime d’une situation de violence et l’ajout de matériel sécuritaire font également partie des moyens déployés afin de bien accompagner le personnel, favoriser un environnement de travail sécuritaire et offrir un contexte de soins et de services optimal. « Ces formations viendront maximiser le nombre d’outils mis à la disposition des employés. Comme employeur, plus on est au courant de ce qui se passe dans nos murs et plus les événements problématiques sont déclarés, plus on a de chances de prévenir ces situations et être là pour soutenir nos employés », précise M. Handoyan. Il faut que les employés victimes de telles situations dénoncent davantage, soutiennent les partenaires syndicaux.

« Du côté de l’administration, c’est beaucoup plus de la violence verbale qu’on constate parce qu’on est un peu plus loin du patient. On en voit beaucoup à la téléphonie, dans les accueils et dans les admissions à l’urgence, détaille Frédérick Beaulieu, président du CSN MCQ – Syndicat du personnel de bureau, des techniciens et des professionnels de l’administration. À la téléphonie, on sent qu’il y a beaucoup d’impatience de la part des gens qui essaient d’avoir un rendez-vous, mais que la ligne est occupée. Ce sont les employés qui reçoivent toutes les insultes. On a même vu des menaces de mort. Avec la campagne, on vient dire que ce type de comportement est déplacé. Le personnel administratif se dit souvent qu’il n’a pas été frappé ou griffé, que la personne était juste fâchée, mais ça ne devrait pas être toléré. Ça reste de la violence verbale. »

La présidente par intérim de la FIQ MCQ, Patricia Mailhot, constate aussi que les professionnels en soin peuvent avoir tendance à banaliser les situations de violence. « Les gestes d’incivilité et de violence sont banalisés parfois parce que les professionnels en soin, au fil du temps, se disent que ça fait partie de leur travail. Ça ne fait partie d’aucun travail de se faire parler sur un ton inadéquat, d’avoir un coup de poing dans le mur. C’est tolérance zéro. Les travailleurs ont droit à un climat sain et enclin à la civilité, tout comme on doit l’être avec les usagers. » Mme Mailhot souligne que la sécurité a été augmentée à certains endroits, dont des salles d’urgence. « Ce n’est pas possible d’avoir un agent de sécurité partout dans les hôpitaux. Les professionnels en soins doivent aussi être bien formés pour savoir comment intervenir dans ces situations, ajoute-t-elle. Je pense que le processus de plainte est méconnu. On a tous travaillé en partenariat pour créer le coffre à outils pour les aider : le programme d’aide aux employés, des formulaires de plainte disponibles, etc. »

Par Marie-Eve Alarie