Parler pour démystifier la sclérose en plaques

Attablées au Restaurant Plus,  trois femmes, Caroline Desrochers, Sophie Lebel, toutes deux de Victoriaville et Katie Bergeron de Drummondville, ont accepté de témoigner de leur vécu avec la sclérose en plaques (SP), une maladie du système nerveux central qui s’attaque à la myéline dans le cerveau, la moelle épinière et les nerfs optiques. Elles souhaitent en parler pour démystifier cette maladie et pour inviter la population à la marche qui se tient dimanche (26 mai) au parc du réservoir Beaudet.

La sclérose en plaques affecte plus de 77 000 personnes au Canada, précise-t-on. Les trois quarts des personnes atteintes sont des femmes, mais on ne peut dire pourquoi. « Au pays, chaque jour, 12 personnes en moyenne reçoivent un diagnostic de SP. Ce diagnostic survient surtout chez les jeunes adultes âgés entre 20 et 40 ans », souligne Katie Bergeron, vice-présidente de la section Centre-du-Québec de SP Canada.

Le pays détient un record peu enviable : le Canada a le plus haut taux de sclérose en plaques au monde. L’ensoleillement pourrait y être pour quelque chose. Plus on se dirige vers le sud, plus on s’approche de l’Équateur, plus s’efface la sclérose en plaques. « Plus de gens sont atteints dans les pays nordiques. Plus au sud, on ne retrouve pas la maladie », signale Katie Bergeron.

Différents symptômes peuvent se manifester chez les personnes atteintes de sclérose en plaques. « Cela dépend de l’endroit où se situent les plaques. Pour certains, ce sont les jambes, les bras ou même la vue qui peuvent être affectés », indique Sophie Lebel.

« J’ai d’ailleurs été aveugle de l’œil droit pendant deux semaines à la suite d’une crise que j’ai eue, raconte Caroline Desrochers. J’ai rencontré un ophtalmologiste  qui m’a fait savoir que la médication ne servirait à rien et que cela allait s’atténuer. Ma vue est, en effet, revenue, mais j’ai conservé une séquelle, un petit point noir qui ne partira pas. »

À une autre occasion, Caroline a ressenti un engourdissement des hanches jusqu’aux orteils. « Deux semaines plus tard, ajoute-t-elle, l’engourdissement a touché mon cou, les bras et les mains. Ces engourdissements ont diminué, mais ils demeurent dans mes bras et mes mains. J’ai moins de dextérité, j’échappe tout. »

Sophie Lebel vit une situation semblable. « J’ai des engourdissements aux mains, de même que sous les pieds, comme si j’avais des fourmis », observe-t-elle.

La fatigue constitue aussi une autre manifestation de la SP. « On devient moins tolérant pour faire de longues journées. Il faut s’écouter, écouter notre corps. Quand on sent la fatigue, on doit aller se coucher », confie Caroline Desrochers.

Les grandes chaleurs et l’humidité compliquent la vie des personnes atteintes. « Les symptômes sont pires en ce qui me concerne dans ces conditions », fait remarquer Sophie.

« C’est que la chaleur active notre système nerveux. Comme le nôtre est brisé, il ne répond pas de la bonne façon », explique Katie Bergeron.

Ni cause ni remède

La recherche en la matière a certes permis certains progrès, mais, à ce jour, on ne connaît pas la cause de la maladie. Bien difficile dans les circonstances de trouver un remède pour la guérir. La sclérose en plaques demeure une maladie incurable.

La recherche a mené à des médicaments. S’ils ne guérissent pas la maladie, ils contribuent à réduire les crises, ce que Caroline, Katie et Sophie appellent « des poussées », à diminuer leur fréquence et intensité et à soulager les symptômes.

« Auparavant, il n’y avait que quatre types d’injections. Maintenant, il existe aussi des comprimés, mentionne Sophie. Nous prenons la médication pour ne pas avoir de poussées. Chacune d’elles est difficile. »

« Et quand on fait une poussée, renchérit Katie, ça laisse des traces. Plus tu fais de poussées, plus tu as de séquelles. Et il y a autant de façons de les vivre sur notre corps qu’il y a de personnes. »

Les poussées peuvent survenir à tout moment. C’est une surprise à chaque fois pour les personnes.

L’acceptation

Comment vit-on avec la sclérose en plaques? On peut s’imaginer que la vie n’est pas un long fleuve tranquille. « On deale, on apprend à vivre avec. C’est comme si on avait un coloc désagréable que l’on doit supporter. Certains jours, c’est plus difficile, mais c’est le cas aussi d’un peu tout le monde », exprime Sophie avec philosophie.

Toutes s’accordent aussi pour dire que la sclérose en plaques comporte son lot de deuils à faire.

Fini, par exemple, pour Katie les longues routes à faire pour aller à la pêche.

« Si je dois me rendre chez ma sœur à Granby, énonce  Caroline, il me faut prévoir un arrêt en route pour une sieste d’une quinzaine de minutes pour me reposer les yeux. »

Sophie, pour sa part, ne conduit plus. Elle ne s’est pas fait retirer son permis. Elle a choisi elle-même d’abandonner la conduite automobile. « J’ai pris moi-même la décision puisque ce sont mes jambes qui sont les plus atteintes. Et j’avais des spasmes », explique-t-elle.

Katie Bergeron admet avoir trouvé très difficile « de perdre des acquis lentement, mais sûrement ». « J’essaie toutefois de dédramatiser le tout. Mais pour cela, tu dois avoir vécu le processus d’acceptation. »

Les trois femmes disent malgré tout garder un bon moral, tout en insistant sur le fait qu’elles sont bien entourées.

Et puis il y a le bureau local de SP Canada qui, avec ses activités, comme le café-rencontre mensuel et les groupes d’entraide, contribue à briser l’isolement.

Pour les personnes qui travaillent, comme Caroline, d’avoir un employeur respectueux des employés fait toute la différence. « Ils sont très compréhensifs, chez Doucet Machinerie (Daveluyville). Ils m’ont offert un bureau au rez-de-chaussée plutôt qu’à l’étage. J’ai refusé pour le moment puisque je suis encore capable. Ils ont aussi solidifié la rampe d’escalier et m’ont même accordé une réduction d’heures », raconte-t-elle.

Invitation à la marche

SP Canada Centre-du-Québec invite toute la population, les familles, à un grand rendez-vous, une marche de sensibilisation le dimanche 26 mai dès 9 h 30 au réservoir Beaudet à Victoriaville.

Deux autres marches seront aussi tenues simultanément à Drummondville et à Nicolet.

À Victoriaville, trois parcours de 700 m, 3 km et 5 km sont proposés. L’événement prend la forme d’un rassemblement familial. « Nous aurons des jeux pour enfants, la mascotte des Tigres et peut-être d’autres, des collations, de la musique. Les participants sont invités à apporter leur lunch pour un pique-nique collectif », souligne Katie Bergeron.

L’activité en est une de sensibilisation à la sclérose en plaques, mais aussi de financement pour SP Canada Centre-du-Québec. Bonne nouvelle, l’objectif initial de 22 000 $ a été dépassé avec une récolte de près de 29 000 $, selon les chiffres relevés, jeudi.