Nouvel agrandissement pour la Fromagerie du Presbytère

La Fromagerie du Presbytère de Sainte-Élizabeth-de-Warwick procède actuellement à l’agrandissement de son église, un projet commandant un investissement d’environ deux millions de dollars et auquel on réfléchit depuis deux ans et sur lequel la chargée de projet Stéphanie Ouellet planche activement depuis un an.

Malgré le contexte plutôt incertain des derniers mois, la Fromagerie a cru bon aller de l’avant à ce moment-ci. « C’était un peu inquiétant de se lancer avec les taux d’intérêt, la rareté des entrepreneurs et le coût des matériaux, mais ça s’est replacé. On est dans un bon moment. Pour nous, c’était le temps », affirme le propriétaire Jean Morin qui en est à son cinquième agrandissement à la Fromagerie du Presbytère. « On a encore des idées, mais un projet à la fois. Celui-là est assez unique », dit-il.

L’actuel projet était devenu nécessaire pour l’entreprise en croissance, désireuse de développer davantage le marché du fromage à raclette avec la Religieuse.

Les travaux ont été entrepris il y a deux semaines environ. L’agrandissement de l’église, explique Jean Morin, prend la forme de deux ailes construites de chaque côté. Une première aile devrait être terminée à la fin mai et l’autre en juillet avant les vacances de la construction.

« Cela nous permettra de doubler la capacité de la fromagerie et de l’église, en termes d’entreposage, notamment. Avec le volume de lait de la ferme Louis d’Or, correspondant à environ 2 millions de litres de lait par année, on produit environ une soixantaine de Louis d’Or par semaine. Quand nous aurons l’espace, nous produirons moins de Louis d’Or et plus de fromage à raclette, car c’est un marché auquel on n’est pas encore en mesure de répondre. On veut aller plus loin dans ce marché », indique Jean Morin, précisant que la production de la Religieuse requiert du volume, de la place et du temps pour l’affinage.

Ce fromage se classe d’ailleurs parmi les meilleurs au monde, note le fromager en rappelant sa participation aux Championnats du monde de la raclette à l’automne. « Le concours en regroupait une centaine provenant de divers pays, dont la Suisse. Nous avons très bien figuré. Sans gêne, notre Louis d’Or et notre raclette sont des produits de calibre international, assure Jean Morin. La qualité de ces fromages nous permettra éventuellement de dépasser les frontières parce qu’on aura l’entreposage, la capacité de production et du lait. »

L’agrandissement fournira donc des espaces d’entreposage à la Fromagerie du Presbytère qui disposera aussi d’équipements acquis en Suisse afin de doubler la capacité de transformation du lait. « On a de la place dans la fromagerie, on aura de la place dans l’église. Et on a un marché qui attend le produit, le marché canadien. On aura aussi la capacité d’en exporter un peu, pourquoi pas? », lance Jean Morin.

Comme l’agrandissement d’une église constitue tout un projet, l’équipe de la Fromagerie du Presbytère a tenu à bien faire les choses. « Ça a été long et délicat comme travail avec les architectes pour s’assurer de conserver le cachet du bâtiment. On agrandit une église, ce n’est pas une grange qu’on fait, observe Jean Morin. Cela se fait dans le respect du patrimoine. Ça a toujours été important pour nous, tant pour le presbytère, le magasin général et l’église. »

Justement, l’église conservera son espace chapelle catholique pour des célébrations occasionnelles, de même que la salle à l’étage pouvant accueillir une soixantaine de personnes lors de réceptions de toutes sortes.

Les nouveaux espaces au deuxième étage dans les nouvelles parties agrandies serviront d’espaces de services et d’entreposage.

L’entreprise conserve son robot actuel appelé à une plus grande utilisation, 60% plutôt que 30%. « Il s’agit de le rentabiliser le plus possible, c’est de maximiser l’espace et les équipements », fait remarquer Stéphanie, la chargée de projet.

« Exactement, nous devons maximiser l’espace de refroidissement, les machines qui produisent l’humidité et la proximité du bâtiment, renchérit Jean Morin. Tout cela se fait manuellement. Un autre emplacement aurait nécessité un autre robot, d’autres machineries.  Et le déplacement des fromages, c’est un gros morceau, c’est du temps, sans compter la question de la salubrité. Alors, cet agrandissement constitue vraiment la recette gagnante, mais le défi consistait à faire en sorte que l’agrandissement soit harmonieux avec ce qui est en place. »

Impact des fromages européens

L’ouverture au marché canadien des fromages fins européens il y a quelques années a eu un certain impact, admet Jean Morin.

« Pour nous, l’impact a été léger. Ils sont dérangeants, oui, mais il s’agit tellement de petits volumes dans l’univers des fromages qu’on fabrique qu’il y a de la place pour ces fromages », fait valoir Jean Morin.

Le fromager évoque aussi cet « élan d’amour » reçu des consommateurs durant la pandémie. « On a eu une grande preuve d’amour, les produits québécois ont été prisés abondamment et les fromages ont été placés en haut de la tablette », note-t-il.

Même loin des autoroutes et des grands circuits touristiques, la Fromagerie du Presbytère, avec ses 17 employés à temps plein, dont quatre au magasin général et quatre enfants à la ferme, en plus des gens à temps partiel, attire les consommateurs et les visiteurs. Et pas seulement pour les traditionnels « vendredis » qui reprendront quelque part au mois de mai, malgré les travaux.

La Fromagerie du Presbytère propose une quinzaine de fromages. Et elle n’entend pas s’arrêter là. « D’autres idées mijotent. Un que l’on travaille fort et dont on a déjà parlé, c’est Les pieds de Dieu. Et il y a de l’espace pour une multiplication des bleus », mentionne Jean Morin.

« Quand les produits sont bons, quand les saveurs, les textures et les produits plaisent, il y a de la place pour eux. Quand le produit est agréable, il passe bien et on l’adopte. Un Suisse de passage a qualifié « d’écoeurant » notre bleu en soutenant qu’il n’y en avait pas comme celui-là chez lui. C’est un beau compliment », précise le propriétaire de la Fromagerie du Presbytère.

Des honneurs

Des prix et des honneurs, la Fromagerie du Presbytère en a récolté au fil des ans et continue dans la même veine.

Charles, le fils, est inscrit à une formation en Europe. « Il faut toujours être à la page. Les fromages qui nous ont valu des premiers prix, nous devons les maintenir, les faire encore mieux et en sortir de nouveaux », précise Jean Morin.

Il admet que les honneurs reçus constituent de belles reconnaissances pour le travail accompli. « Mais les plus beaux honneurs, c’est d’avoir des gens qui viennent nous voir à Sainte-Élizabeth, qui apprécient et qui reviennent. On vient ici parce que c’est bon. Ça, c’est le plus beau Caseus qui soit », commente Jean Morin.

« Le modèle proposé avec la ferme et l’installation foin sec, c’est peu commun au Québec. Et ça amène les gens de la Suisse, les Européens en général, à retrouver un peu de leur installation et de leur coin de pays », ajoute Stéphanie.

Tout sourire, Jean Morin pilote, note-t-il, « un très beau projet », avec ses enfants et avec Stéphanie. « On ne manque pas d’énergie. J’appelle ça de l’énergie renouvelable. On est dans le vent », lance-t-il avec humour.

Heureux aussi de constater que le village d’un peu moins de 400 habitants détonne dans le contexte actuel. « Sainte-Élizabeth a encore une église vivante, un presbytère, un magasin général et on a toujours notre poste d’essence », s’exclame-t-il en riant.