Un propriétaire d’auberge en beau fusil

Au palais de justice de Victoriaville, vendredi matin, Réjean Caouette, copropriétaire de l’Auberge Hélène où certains gestes sexuels auraient été commis, a notamment témoigné de son mécontentement en raison de l’état de la chambre 27 qu’ont occupée plusieurs individus dans la nuit du 24 au 25 octobre 2014.

L’homme se rappelle avoir loué, le 24 octobre 2014, trois chambres pour 10 ou 12 personnes, des organisateurs d’une soirée au Complexe Sacré-Cœur de Victoriaville.

Informé le lendemain après-midi par l’une de ses sœurs de l’état de la chambre 27, le quinquagénaire a constaté sur place. «La chambre était sale, de la bière avait été renversée. Dans la salle de bains, le porte-serviette était à moitié arraché. Le meuble du lavabo, normalement fixé au mur, était tiré, ayant été forcé, sans compter le tuyau de renvoi d’eau qui était cassé», a-t-il indiqué.

Interrogé par le procureur du ministère public, Me Éric Thériault sur son état d’esprit, Réjean Caouette a confié qu’il était «très en colère». «J’ai constaté que j’avais affaire avec des animaux, pour salir de la sorte, partir sans prévenir et laisser les portes ouvertes», a-t-il dit sans ménagement tout en précisant qu’il en avait eu pour le week-end à décolérer.

Le propriétaire se rappelle aussi avoir constaté la présence de sang dans la salle de bain.

La Sûreté du Québec a été contactée pour une plainte de méfaits qui, par la suite, a été retirée, l’aubergiste ayant obtenu un remboursement de 450 $.

L’un des occupants de la chambre l’avait contacté pour prendre arrangement afin qu’il retire sa plainte, selon M. Caouette. «Au départ, je l’ai envoyé promener en lui disant de s’arranger avec la police», a-t-il relaté.

«On m’a offert de l’argent si je retirais ma plainte. J’ai finalement accepté. Mais, au départ, il n’était pas question que je retire ma plainte», a-t-il ajouté, précisant qu’il n’y avait pas eu de négociations. L’homme a proposé une somme de 450 $ qui a été acceptée.

«L’homme avec qui j’échangeais était toujours poli. Je pense qu’il tentait de m’amadouer, sachant qu’il était en tort. J’ai senti qu’il avait l’air à mettre l’accent sur le retrait de la plainte», a-t-il souligné.

Le copropriétaire de l’établissement a reconnu aussi, en contre-interrogatoire, qu’il est possible que l’individu voulait s’assurer du respect de sa parole en vérifiant le retrait de plainte.

Juste avant le témoignage de l’homme, le ministère public, pour éviter au policier Jean-Pierre Pouliot de devoir témoigner, a déposé une déclaration admise en défense qui faisait état d’une plainte pour méfaits, ouverte le 25 octobre 2014, puis retirée quelques jours plus tard le 3 novembre à la suite d’un remboursement reçu.

À la suite de ce retrait, les serviettes souillées de sang et les bières que la SQ avait saisies ont été détruites.

Suite de jeudi

Le procès de Pierre-François Blondeau, alias Midaz, Jean-Christophe Martin et Dominic Vézina, accusés de délits sexuels sur une adolescente de moins de 16 ans, avait repris, vendredi, avec la suite du contre-interrogatoire d’une jeune femme de 18 ans.

Celle-ci dit avoir aperçu la plaignante à deux occasions lors de la soirée du 24 octobre 2014. «Quand je l’ai vue, elle avait l’air amorphe et plus molle», a-t-elle dit, contrairement aux photos qu’on lui a exhibées en contre-interrogatoire. «Sur les photos, elle a l’air plus réveillée. Quand je l’ai vue, elle ne ressemblait pas à ça. Elle semblait ailleurs (dans ses yeux), mais elle se tenait sans difficulté», a-t-elle souligné.

Le terme ailleurs, a-t-elle précisé, peut référer à la possibilité qu’elle se soit droguée ou qu’elle ait été droguée.

La jeune femme a expliqué qu’elle avait la responsabilité de la vente de billets dans les écoles pour cette soirée en plus d’organiser le transport avec trois autobus.

Connaissant Midaz (Pierre-François Blondeau), elle lui a même demandé un autographe sur la scène.

À la fin de soirée, alors que les participants sortaient, elle se souvient d’avoir reparlé à Midaz en compagnie de deux autres filles. Midaz est même devenu son ami Facebook. «Lors de la discussion, il a toujours été poli, respectueux, courtois», a-t-elle noté.

La jeune femme a relaté un échange sur «messenger» avec Blondeau qui l’a invitée à prendre une marche. «Je lui ai dit que j’avais faim. Il m’a suggéré d’aller manger», a-t-elle fait savoir.

Puis, pendant une heure, aucun autre échange n’est survenu. Les échanges ont repris vers 3 h 55,  alors qu’elle se trouvait à l’Auberge Hélène.

Par voie électronique toujours, elle manifeste sa fatigue à son interlocuteur et refuse la marche, soulignant toutefois ne jamais s’être sentie menacée. «Je ne comprenais pas trop l’idée, cependant. J’ai dit pour me sécuriser qu’il y avait huit amis dans la chambre. Je ne voulais pas le voir», a-t-elle mentionné.

Elle ne répondra au dernier message de Midaz que le lendemain, peu avant 11 h, lui écrivant qu’elle était désolée.

Un échange suivra au cours duquel Pierre-François Blondeau lui demande si elle était majeure «pour vrai», qu’elle le lui aurait juré à plusieurs reprises, ce que la jeune femme nie complètement.

Questionnée, en défense, sur sa déclaration à l’enquêteur François Beaudoin, elle a expliqué avoir rempli une page, ne faisant état de ce qui lui semblait le plus intéressant, comme les mots «garde ça entre nous» que lui aurait écrits Midaz.

La jeune femme soutient qu’elle a agi ainsi, non pas parce que c’était plus incriminant, mais parce que cela lui apparaissait comme le plus intéressant. «Je trouvais que le reste de la conversation (sur messenger) n’était pas intéressant. Je ne connais pas votre métier, a-t-elle dit à l’avocat. Je ne pensais pas que c’était nécessaire.»

La déclaration complète a été déposée en preuve, donc à la disposition du jury formé de six femmes et six hommes.

Le contre-interrogatoire de la jeune femme a été suivi du témoignage de Francis Patry, un jeune homme de 22 ans.

Il avait 19 ans lors de la soirée d’octobre 2014. Il a apporté son aide à l’organisateur de la soirée, assurant d’abord son transport à Victoriaville.

Par la suite, il a effectué des derniers préparatifs, en plus de travailler au vestiaire à l’entrée durant toute la soirée.

Le jeune homme a vu tous les participants dont il estime la moyenne d’âge à 15, 16 ans. Il a expliqué qu’avant de se diriger au vestiaire, les jeunes devaient passer à la billetterie où on leur remettait un bracelet en fonction de leur âge mineur ou majeur.

Francis Patry, vu son poste, n’a pas assisté à la soirée, s’étant peut-être rendu à la salle à une occasion. Mais il a tout de même constaté que, plus la soirée avançait, plus les mineurs étaient intoxiqués. «Quelques personnes ont quitté en ambulance», a-t-il signalé.

À la fin de la soirée, avec les gens qui l’accompagnaient, il a fait une halte au restaurant McDonald’s avant de se diriger vers l’Auberge Hélène où il occupait, avec d’autres, l’une des deux chambres du bâtiment principal.

Une troisième chambre, a-t-il noté, en contre-interrogatoire, devait être occupée par d’autres organisateurs qu’il n’a pu identifier cependant.

Jusqu’ici, après une semaine de procès, 10 témoins ont été entendus. À l’heure du dîner vendredi, le juge François Huot de la Cour supérieure du Québec a ajourné l’audience à lundi matin.

Le ministère public pense faire entendre, lundi, jusqu’à quatre témoins, dont une policière et une experte en biologie.

La plaignante, dans la présente affaire, pourrait être entendue, mardi.