Procès de l’ex-chef Beaudet : au tour de la DG de Warwick de témoigner

Directrice générale de la Ville de Warwick et du Canton au cours des 27 dernières années, Lise Lemieux s’est amenée à la barre des témoins, mardi matin, à l’occasion du deuxième jour de procès de l’ex-directeur du Service de sécurité incendie Bernard Beaudet.

Mme Lemieux était le troisième témoin à se faire entendre. Questionnée à propos de sa relation avec l’accusé à l’époque, elle a dit entretenir une relation professionnelle saine avec lui. «Il était toujours d’accord pour rendre service. C’était quand même facile de travailler avec lui», a-t-elle partagé.

Elle reconnaît, cependant, que le chef Beaudet n’était pas assidu dans plusieurs tâches, dont le respect d’échéanciers. «Il a fallu revenir là-dessus plusieurs fois. C’était long avant d’avoir les choses. J’ai dû m’asseoir avec lui. Les factures et les feuilles de temps pouvaient arriver un mois plus tard. On avait parfois des appels de pompiers comme quoi ils n’avaient pas reçu leur feuille de temps. On a dû s’en parler à plusieurs reprises. Nous avons finalement décidé d’établir que la remise des documents se ferait tous les deuxièmes mercredis du mois et ce n’était pas négociable», a-t-elle raconté.

Sous la gouverne de Mathieu Grenier, le Service de sécurité incendie est désormais plus réactif aujourd’hui, a souligné la directrice générale. «C’est quand même une différence assez considérable. Au niveau des échéanciers et la remise des rapports, la date est toujours respectée. Je reçois toujours les documents quand j’en ai besoin. Il y a beaucoup d’efficacité», a-t-elle dit. Elle a également rappelé que la délégation de pouvoir de dépenses du directeur Beaudet, réduite de 2000 $ à 500 $ en 2004, a été rétablie au montant initial avec le nouveau directeur.

La procureure Isabelle Roy a également questionné le témoin concernant un incident survenu avec un pompier volontaire, Michaël Martel, en octobre 2013. «M. Martel a fait la demande d’un relevé d’emploi pour l’assurance chômage. C’est de cette façon que j’ai été mis au courant», a-t-elle indiqué.

L’adjointe à la directrice générale, Jacqueline Vallée, lui a fait mention du problème du jeune sapeur. «Elle m’a expliqué que ses heures où il était à la caserne apparaissaient comme étant des heures où il était sur un feu», a-t-elle raconté. Il faut savoir qu’à l’époque, le taux horaire d’un pompier volontaire variait en fonction de la tâche qu’il accomplissait.

«En compagnie de Mme Vallée, j’ai rencontré M. Beaudet pour obtenir des explications. Il m’a dit qu’effectivement, c’est ce qu’il avait fait. Il m’a dit qu’il n’avait pas fait cela plus de deux fois. Je lui ai dit que ça ne se faisait pas. On ne pouvait pas modifier des heures comme cela. Il m’a dit que c’était pour respecter le schéma de couverture de risque», a-t-elle ajoutée.

La procureure a relancé le témoin, questionnant la directrice générale sur la réaction de M. Beaudet. «Pour lui, ce n’était pas si dramatique. Lui, il souhaitait que la Municipalité puisse bénéficier de l’immunité au chapitre de la couverture de risque. Pour lui, ce n’était pas grave», a-t-elle précisé.

La directrice générale est également venue préciser l’épisode de l’achat de pneus pour le véhicule personnel de Bernard Beaudet. Celui-ci aurait profité d’une commande de pneus pour le nouveau véhicule de son Service à prix préférentiel grâce à un service d’achats groupés de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) pour commander huit autres pneus pour son Jeep Cherokee personnel. «Il ne m’en a parlé seulement quand j’ai reçu la facture», a-t-elle raconté. Cet achat non autorisé, d’environ 1600 $, dépassait largement sa limite de 500 $ permise à titre de directeur, sans compter qu’il en faisait un usage personnel. «Il m’a confirmé que c’était pour son véhicule personnel, mais qu’il rembourserait sans délai et sans faute. Je lui ai dit qu’on ne pouvait pas faire ça. Qu’il aurait dû m’en parler. Les employés ne peuvent pas avoir de tels avantages, même si son véhicule était immatriculé comme véhicule d’urgence», a-t-elle expliqué.

Il aura fallu plusieurs mois avant qu’il ne rembourse, la directrice générale menaçant de saisir le conseil municipal du dossier.  Le directeur Beaudet a une fois de plus outrepassé son droit de dépense lors de l’achat de deux toiles de l’artiste Patricia Lapointe d’une valeur de 2000 $. «Il m’en avait parlé, mais une fois les toiles commandées. Il m’a dit de ne pas en parler puisque c’était une surprise et que ça ne coûterait pas un sou à la Municipalité, qu’un commanditaire se chargerait de payer la totalité de la facture. Il m’a mentionné que le commanditaire en question, dont je n’ai jamais pu connaître le nom, s’était désisté», a-t-elle relaté.

La Ville a ainsi dû payer ces deux toiles. Le conseil municipal avait laissé jusqu’en mai 2014 à son directeur pour rembourser le montant. Il a cependant été congédié avant cette échéance.

Même si elle en avait le pouvoir, sa limite de dépenses préautorisées se situant à 10 000 $, la directrice générale affirme que jamais elle n’aurait contourné le conseil municipal pour ce genre de dépenses.

Durant son témoignage, la procureure a demandé à la directrice générale d’expliquer le système de cartes de crédit pour le Service de sécurité incendie, comme ce fut le cas la veille avec les deux autres témoins.

Elle a également confirmé que M. Beaudet était autorisé à se servir de son véhicule en contexte d’appels d’urgence.

«Des gyrophares ont été ajoutés pour la sécurité en plus d’être identifié comme véhicule d’urgence à la SAAQ. Cette dépense avait été autorisée sous l’ex-ville par résolution», a-t-elle rappelé.

L’accusé, selon elle, ne pouvait cependant pas se servir des entrées de la ville à la FQM pour se munir de pneus en dépit de cette situation.

Elle a rappelé les mesures disciplinaires prises contre Bernard Beaudet dans le passé, dont le gel salarial et la suspension sans solde. Lundi, l’ex-maire Claude Desrochers parlait d’une suspension d’un mois. La directrice générale a fourni la preuve qu’il s’agissait plutôt d’une suspension d’une semaine.

Enfin, Lise Lemieux a également expliqué comment Bernard Bernard gérait les feuilles de temps des pompiers. «Les originaux complétés par les pompiers, il les détruisait. Je lui ai dit qu’on ne faisait pas. Qu’on devait conserver les copies. Il m’a dit que c’était l’ancien directeur général (Jacques Hamel) qui lui avait dit que c’était la façon de faire», a-t-elle raconté. Dès qu’il en a été averti, il a changé la procédure, a-t-elle précisé.

«Il a été surpris. Pour lui, c’était correct d’agir ainsi. C’était cependant important d’avoir les originaux. Si on voulait faire des vérifications par la suite, ça les prenait», a-t-elle dit.

Le contre-interrogatoire s’est amorcé en après-midi. L’adjointe à la direction générale, Jacqueline Vallée, devait aussi être entendue.