Le procès Therrien entre dans sa phase finale

Ils sont les juges des faits. Les sept femmes et quatre hommes, composant le jury, ont maintenant à décider du sort de Paul-Émile Therrien. Ils doivent déterminer de la culpabilité ou non de l’homme de 79 ans en lien avec de présumés abus sexuels sur deux de ses filles.

À 12 h 40, après ses directives finales, le juge Serge Francoeur de la Cour supérieure du Québec a ordonné la séquestration du jury qui, une fois terminé le repas du midi, a entamé ses délibérations.

En avant-midi, donc, le magistrat, pendant un peu plus de trois heures, a donné ses directives finales, minutieusement préparées.

Dans cette affaire, l’accusé, rappelons-le, fait face à 10 chefs d’accusation, d’agression sexuelle à inceste, en passant par contacts sexuels, incitation à des contacts, grossière indécence et menaces de mort.

Les faits reprochés à l’ex-Warwickois, habitant maintenant à Victoriaville, se seraient déroulés entre 1984 et 1999 principalement dans la résidence familiale du rang 4 Est à Warwick.

Le juge Francoeur a entamé ses directives en expliquant les fonctions du juge et des jurés. «Il vous revient de décider si la Couronne a prouvé la culpabilité de l’accusé hors de tout doute raisonnable. Vous devez fonder votre décision, a-t-il souligné, sur l’ensemble de la preuve. Une décision prise sans préjugé, crainte ou sympathie et sans tenir compte de l’opinion publique.»

Le jury doit examiner toute la preuve à partir des principes que sont la présomption d’innocence, le fardeau de la poursuite et la doute raisonnable. «Ce doute, a expliqué le magistrat, se fonde sur la raison, le gros bon sens et découle logiquement de la preuve ou de l’absence de preuve.»

Le président du Tribunal a invité les jurés à examiner la preuve «avec l’esprit ouvert», et en utilisant leur bon sens collectif pour notamment évaluer la sincérité et la crédibilité des témoins.

Le témoignage de l’accusé, a aussi dit le juge, doit être évalué comme tout autre témoin et peut être accepté en totalité, en partie ou écarté.

Si les témoignages soulèvent un doute, l’accusé doit être acquitté, de même si le jury croit l’accusé. «Même si vous ne le croyez pas, mais que le témoignage soulève un doute, vous devez le déclarer non coupable. Même chose si vous ne savez pas qui croire, car cela démontre que vous avez un doute. Et encore si, après l’analyse de l’ensemble de la preuve, vous n’êtes pas convaincus hors de tout doute, vous devez l’acquitter», a fait savoir le juge Francoeur.

Dans ses directives, le magistrat a aussi fait état des règles de preuve particulières à ce cas en raison de sa nature.

La question centrale, ici, est la suivante : les gestes reprochés ont-ils été commis? «Il revient à la poursuite de prouver les faits hors de tout doute. L’accusé n’a pas à prouver quoi que ce soit», a rappelé le juge tout en informant les jurés qu’ils n’ont pas à comparer les versions, ni à en choisir une plus que l’autre. «Vous devez comparer la preuve dans son ensemble.»

Par la suite, le juge Serge Francoeur a effectué un résumé de la preuve, celle du ministère public d’abord, puis de la défense, dans l’ordre de la comparution des témoins.

Ensuite, le magistrat y est allé d’un exposé sommaire préparé par les parties.

Les deux plaignantes, selon la poursuite, ont témoigné d’abus sexuels soutenus entre 1984 et 1999. Au fil du temps, les deux femmes ne sont pas parvenues à se libérer de leur malaise intérieur et toutes deux ont porté plainte à la fin mars 2015.

La partie défenderesse, pour sa part, a fait valoir que la poursuite n’a pas réussi à soulever de contradictions dans le témoignage de Paul-Émile Therrien.

En revanche, prétend la défense, les témoins en poursuite ont modifié leurs versions affectant ainsi leur crédibilité. La défense suggère que les plaignantes ont manigancé leur histoire pour soutirer de l’argent.

Finalement, le juge Francoeur a expliqué aux 11 membres du jury les éléments essentiels à évaluer sur chacun des 10 chefs d’accusation, éléments sur lesquels s’applique le fardeau du ministère public pour établir une preuve hors de tout doute raisonnable.

En terminant, le juge Francoeur a fait savoir aux jurés qu’il les laissait libres de leur horaire de travail, les invitant à faire tous les efforts raisonnables pour en arriver à un verdict unanime sur chacun des 10 chefs d’accusation. «Faites-le avec un esprit ouvert, en écoutant les autres, en exprimant votre point de vue. Faites de votre mieux», a-t-il conclu.