La prison ou la collectivité pour un Victoriavillois coupable de crimes sexuels?
VICTORIAVILLE. Deux visions opposées, la défense militant pour une peine dans la collectivité alors que la poursuite réclame la détention ferme. La juge Dominique Slater de la Cour du Québec fera connaître, le 20 mars, le sort qu’elle réserve à un Victoriavillois de 57 ans, coupable de délits sexuels.
Le quinquagénaire a abusé d’une fille d’âge mineur entre 1984 et 1992. Il a reconnu sa culpabilité en juin 2014.
Lors des représentations sur la peine, lundi, au palais de justice de Victoriaville, la conjointe de l’homme a témoigné en défense. Manifestant sa désapprobation envers le rapport présentenciel, la femme, qui éprouve des problèmes de santé, a dit avoir besoin de son mari, «mon seul soutien émotionnel», a-t-elle confié.
L’ex-militaire aussi a été appelé à témoigner par son avocat Me Marco Morin. «Je le regrette, même s’il me manque des bouts. J’ai de gros problèmes de mémoire et de concentration. Je m’excuse, il m’en manque des grands bouts», a-t-il souligné.
Contre-interrogé par le procureur de la poursuite, Me Éric Thériault, l’accusé a indiqué qu’il ne se souvenait que d’un épisode de masturbation. «J’ai travaillé énormément, j’en avais énormément sur les épaules. Quand on vit sous un stress permanent quotidien, je ne sais pas ce qui s’est passé», a-t-il souligné, admettant, en réponse aux questions de la poursuite, que cela n’excuse rien, que ça ne justifie rien.
Pressé de questions par Me Thériault, le Victoriavillois a fini par reconnaître une certaine problématique et affirmer qu’il participerait à une thérapie si on la lui imposait.
L’argumentation des parties
En défense, Me Morin a fait valoir que le Tribunal devait considérer une peine à purger dans la collectivité.
«Les événements datent d’une vingtaine, d’une trentaine d’années. Depuis, il présente une vie exemplaire, il n’a pas d’autres antécédents. Il n’a pas, depuis, un parcours dysfonctionnel ou délinquant. Monsieur a vécu des dépressions. Et puis, le rapport présentenciel a été confectionné après une seule rencontre», a fait savoir l’avocat tout en précisant que c’est à tort qu’on prétend que mon client minimise les faits. «Ce n’est pas un homme qui nie. Il est conscient d’une problématique et il est disposé à un suivi plus pointu, plus adapté à sa situation», a indiqué Me Morin.
«Le crime est grave, inacceptable, et doit être sévèrement puni, a reconnu l’avocat. Mais la jurisprudence laisse un large spectre. Étant donné la situation familiale, Monsieur a besoin d’aider madame et d’avoir un suivi, seule une sentence dans la collectivité devrait être considérée. Et Monsieur l’a dit simplement : il regrette à un point tel qu’il n’a jamais recommencé. Il exprime des remords, il m’apparaît sincère.»
Du côté du ministère public, Me Thériault s’est interrogé : «Que veut-on envoyer comme message? La dénonciation doit primer, ici. Je ne demande pas une peine de quatre ans. Je réclame entre 15 et 18 mois de détention et une probation de deux ans.»
Le procureur se dit en désaccord avec les remords. «Je n’ai pas senti que ces remords étaient sincères. Monsieur ne démontre qu’une reconnaissance partielle des faits», a soutenu Me Thériault qui a fait valoir aussi la nature et la gravité des gens, à savoir notamment des attouchements à la vulve et des actes de cunnilingus. «Les critères de dénonciation et de dissuasion doivent primer», a-t-il insisté.
Le représentant de la poursuite, en évoquant la jurisprudence, a fait état d’un cas où le juge avait refusé une peine à purger dans la collectivité. «Pourtant les gestes étaient moins graves et la période des faits moins longue que le cas qui nous concerne. Une dépression ne justifie rien, ça n’excuse absolument pas», a-t-il noté également.
Avant que la juge Slater n’annonce qu’elle fera connaître sa décision en mars, elle a permis au quiquagénaire de s’exprimer une dernière fois.
L’homme a notamment fait état de ses incapacités, indiquant avoir vécu «un paquet de choses avec les anciens combattants».