La plaignante a ajusté sa version, estime l’avocat de Blondeau

Le procès, pour une 15e journée d’audience, a repris, lundi matin au palais de justice de Victoriaville, avec la plaidoirie de Me Yves Savard, l’avocat de Pierre-François Blondeau (alias Midaz), l’un des trois accusés en lien avec une présumée agression sexuelle sur une adolescente de 15 ans en octobre 2014 lors d’une soirée «rave» pour les 15-25 ans au Complexe Sacré-Cœur de Victoriaville.

D’entrée de jeu, Me Savard a fait part de sa prétention au jury formé de six femmes et de six hommes. «L’ensemble de la preuve manifeste que la non-culpabilité de mon client a été prouvée. La version de M. Blondeau est corroborée par plusieurs éléments de la poursuite», a-t-il dit.

L’avocat de l’accusé a fait valoir que la plaignante avait consenti aux gestes. «Mais à son réveil, chez elle, elle a dû faire face à ses parents, puis par la suite au regard de ses proches et ses amis. Elle s’est alors sentie coupable d’avoir accepté ce qu’elle a fait. Mais cela n’altère pas son consentement», a-t-il soutenu, ajoutant qu’une «gradation, une panoplie d’ajustements» ont marqué son témoignage.

La preuve, a noté Me Savard, révèle l’attirance qu’éprouvait l’adolescente envers Midaz, le chanteur. «D’ailleurs, après les événements, elle possédait toujours, dans son téléphone, la chanson de Blondeau, celui qu’elle prétend qu’il l’a agressée», a-t-il souligné.

Le procureur a fait remarquer que son client a livré un témoignage sincère,  détaillé, précis. «Il avait besoin de donner sa version», a-t-il signalé.

«Il a reconnu qu’il y aurait sans doute eu fellation dans la loge, s’il n’y avait pas eu cette interruption par la cuisinière (Mme Forand). Mais cela ne s’est pas matérialisé», a-t-il fait savoir.

Me Savard rappelle que son client n’a jamais constaté un état altéré chez la plaignante. «Elle n’était pas incohérente, elle était normale, en plein contrôle», a-t-il indiqué.

Quant à l’âge, dans le cadre d’une discussion normale, sans arrière- pensée, l’accusé a appris, a confié son avocat,  que la plaignante fréquentait le Dagobert à Québec, qu’elle étudiait en pharmacie, des éléments pouvant laisser croire qu’elle avait 18 ans. «Le gros bon sens indique que les mesures raisonnables ont été prises pour s’assurer de l’âge. Ce serait déraisonnable de lui imposer d’autres démarches», a soutenu le procureur, d’avis, par ailleurs, que la jeune fille était en état de consentir.

«Elle savait ce qu’elle faisait et souhaitait ce qui est arrivé avec M. Blondeau», a-t-il signalé.

«L’ensemble du portrait, a-t-il ajouté,  montre qu’elle a des souvenirs précis sur de nombreux détails, comme son amie malade ou d’être allée dans la loge avec Dominic Vézina et la reconnaissance des lieux avec l’enquêteur. Elle était consciente aussi du fait que la soirée a pris fin plus tôt que prévu. Mais la plaignante devient curieusement floue lors des gestes à caractère sexuel. Pourtant, s’il y a quelque chose qui marque, c’est bien cela.»

Ainsi, l’avocat estime que la présumée victime était consciente, cohérente. «Elle savait ce qui se passait. On ne peut pas évoquer l’intoxication pour expliquer les souvenirs flous. Ce serait trop simpliste», a exprimé Me Savard.

Ce dernier a aussi évoqué le fait que la plaignante, avant la soirée de Victoriaville, se faisait passer pour une fille de 18 ans sur le site Tinder. «N’est-il pas possible, a-t-il lancé, qu’elle ait agi de la même façon lors de la soirée à Victoriaville?»

Me Savard explique le comportement de la plaignante par un sentiment de honte. «Elle a éprouvé de la honte, des regrets, des remords à la suite des événements. Elle avait de la difficulté à faire face à la musique, au regard de ses parents et de ses amis, d’où les ajustements. Elle essaie de sauver la face. Pour se déculpabiliser, a-t-il expliqué, elle a mis le blâme sur Pierre-François Blondeau, notamment, et a fait savoir à l’organisateur de la soirée que ces trois individus allaient payer.»

Cette réaction, l’avocat la qualifie d’humaine. «Mais cela ne fait pas en sorte que le consentement n’était pas valable», a-t-il précisé.

De plus, la perception de son client sur l’âge de la plaignante, a-t-il confié, a été corroborée par plusieurs témoins de la poursuite notant qu’elle semblait plus vieille que son âge.

Quant à une possible intoxication, Me Yves Savard a fait valoir que  la toxicologue judiciaire n’avait jamais, dans son témoignage, indiqué que la pilule consommée par la plaignante pouvait altérer le jugement, la perception ou le consentement. «Il n’y a aucune preuve là-dessus», a-t-il dit, tout en rappelant, par ailleurs, le témoignage de la biologiste judiciaire qui n’a relevé, dans le Jeep, aucune trace de sperme ou de sang.

Ce qui, a-t-il relevé,  vient corroborer les propos de Pierre-François Blondeau niant une relation vaginale ou anale, mais plutôt une fellation avec éjaculation.

Après une plaidoirie de plus de deux heures, Me Savard a conclu en affirmant que la preuve, selon lui, démontrait la non-culpabilité de son client sur les quatre chefs d’accusation : agression sexuelle avec lésions sur une adolescente de moins de 16 ans, agression sexuelle avec la participation d’une autre personne, contacts sexuels et incitation à des contacts. «Il n’a jamais rien demandé ou sollicité, n’a jamais forcé la plaignante ou agi contre son gré. Et elle était en état de consentir», a-t-il fait valoir.

Le procès se poursuivra à 14 h 30 avec la plaidoirie du procureur de la poursuite, Me Éric Thériault.

Par la suite, le jury aura congé jusqu’à jeudi matin, moment où il recevra les directives du juge François Huot de la Cour supérieure du Québec. Dès lors, le jury sera séquestré jusqu’à ce qu’il parvienne à un verdict unanime sur chacun des chefs d’accusation pour les trois accusés, Pierre-François Blondeau, Jean-Christophe Martin et Dominic Vézina.