Deux autres témoins entendus en défense

Au palais de justice de Victoriaville, au 12e jour du procès de Pierre-François Blondeau, Jean-Christophe Martin et Dominic Vézina accusés de crimes sexuels, la défense a fait entendre, mardi, ses quatrième et cinquième témoins, soit le couple qui partageait la chambre des accusés à l’Auberge Hélène dans la nuit du 24 au 25 octobre 2014.

Marc-André Campagna, âgé aujourd’hui de 24 ans, était copropriétaire de la compagnie Québec Pass qui organisait la soirée «rave» pour les 15-25 ans en octobre 2014 au Complexe Sacré-Cœur de Victoriaville.

Il s’attendait, a-t-il dit, à attirer entre 300 et 500 personnes lors de cette soirée qui, a-t-il commenté, a bien mal commencé. «Beaucoup de gens étaient intoxiqués à leur arrivée. Certains étaient inconscients. Deux transports en ambulance ont été effectués. C’est un des pires débuts d’événement pour notre organisation», a-t-il constaté.

Avec le temps, tout s’est replacé, selon lui, et la fête a pris fin plus tôt que prévu vers 2 h.

À un moment, en entrant dans la loge réservée aux organisateurs, le témoin a rapidement fermé la porte en constatant une relation entre Dominic Vézina et la plaignante.

Questionné sur le sujet, il a estimé à environ 17 ans l’âge moyen des participants, tout en évaluant aux deux tiers la proportion des mineurs lors de la soirée.

Avant de quitter le complexe, Marc-André Campagna a constaté, dans le Jeep, Dominic Vézina et la plaignante assis très près l’un de l’autre sur le siège arrière.

Avec sa copine de l’époque Catherine Genest-Boivin et le photographe qui, selon lui, était très intoxiqué, le jeune homme a pris la direction de l’auberge.

Dans la chambre, il a raconté avoir vu Dominic Vézina et Jean-Christophe Martin entrer, pour ressortir et aller au véhicule dans lequel se trouvaient Pierre-François Blondeau et la plaignante.

«Ils sont tous revenus ensuite. La fille et les trois gars se trouvaient dans un état normal», a-t-il soutenu.

Le témoin a relaté avoir vu la plaignante qu’il a qualifiée d’entreprenante saisir Jean-Christophe Martin par le col pour ensuite constater, sur le lit, un début de relation et de pénétration.

«Ils se sont ensuite dirigés vers la salle de bain, pendant que Pierre-François Blondeau, lui, était affairé à mettre de la musique avec son ordinateur», a-t-il précisé.

Le copropriétaire de Québec Pass dit avoir vu Blondeau aller 30 secondes à la salle de bain, après que Martin en soit sorti, pour ensuite se coucher au sol.

À leur réveil, les trois accusés et la fille avaient quitté les lieux. Marc-André Campagna, sa compagne et le photographe ont rapidement pris la route vers Québec entre 10 h et 11 h.

En route, l’homme a reçu un appel de Jean-Christophe Martin l’informant qu’il venait d’apprendre l’âge de l’adolescente. «Il était paniqué, avait de la difficulté à croire qu’elle avait 15 ans, a-t-il raconté. Il m’a demandé de faire des vérifications quant à son âge véritable.»

Quelque part en novembre, le témoin a appris, non seulement l’âge de la plaignante, mais aussi le fait qu’elle avait porté plainte à la police. Campagna a rapidement contacté Jean-Christophe Martin pour l’informer.

Par ailleurs, interrogé sur la salle de bain de l’auberge, le témoin ne rapporte qu’une chose anormale, le bris du porte-serviette. Il a soutenu ne pas avoir vu une serviette imbibée de sang.

Avec Jean-Christophe Martin, il a été convenu qu’il offrirait un montant pour compenser les dommages.

Contre-interrogatoire

Contre-interrogé par Me Éric Thériault de la poursuite, Marc-André Campagna a admis que Jean-Christophe Martin était un bon ami, qu’ils se connaissaient depuis la cinquième année du primaire, qu’ils se voyaient à l’époque des événements une fois aux deux à trois semaines et depuis les événements, une fois aux deux mois.

«Il est arrivé qu’on reparle des formalités du procès», a-t-il répondu à une question de Me Thériault.

Interrogé concernant ses contacts avec l’enquêteur François Beaudoin, le témoin a soutenu voir perçu des menaces ou de l’intimidation, d’où le fait qu’il lui ait raccroché au nez.

«N’est-il pas vrai plutôt que l’enquêteur ne souhaitait qu’obtenir votre version des faits?», a repris le procureur de la poursuite.

«Complètement faux», a répondu le témoin qui, après avoir été assigné puis annulé comme témoin par la poursuite, a été assigné en défense il y a environ deux semaines.

En réponse à Me Thériault, Marc-André Campagna a nié avoir tenté de convaincre son associé de témoigner au procès parce que cela pourrait avoir un impact sur la vie des accusés, du bon monde.

Il a soutenu aussi ne pas avoir parlé de son témoignage récemment avec Jean-Christophe Martin.

Quant à l’état des trois accusés et de la fille dans la chambre de l’auberge, le témoin l’a qualifié de normal, comparativement au photographe. «Ça ne prenait pas 10 pieds pour constater qu’il (le photographe) était en mauvais état.»

Autre témoin

Âgée de 25 ans, Catherine Genest-Boivin a raconté qu’elle travaillait au vestiaire lors de la soirée à Victoriaville.

«À l’arrivée des autobus, les gens étaient en état d’ébriété avancé», a-t-elle dit, évaluant l’âge moyen des participants entre 16 et 18 ans.

Et selon elle, 75% d’entre eux étaient des personnes mineures.

Près du vestiaire, à la fin de la soirée, la jeune femme a confié que Pierre-François Blondeau, venu lui donner un coup de main, s’est mis à échanger avec deux filles, dont la plaignante. «Rien d’anormal, ils étaient de bonne humeur, semblaient avoir du plaisir. Et les filles semblaient en admiration devant lui», a-t-elle noté.

Dans la chambre de l’auberge, le témoin a relaté avoir vu les trois accusés et la fille entrer. «Tous semblaient dans un état normal», a-t-elle précisé.

«Il y a eu un début de relation entre la fille et Jean-Christophe Martin. Ils se sont ensuite rendus à la salle de bain. Ça a continué, car j’entendais la fille crier de plaisir», a-t-elle raconté.

Sur le chemin du retour le lendemain, son copain Marc-André a reçu un appel de Jean-Christophe. «Il m’a dit qu’il venait d’apprendre que la fille avait 15 ans. Il capotait», a-t-elle souligné.

Catherine Genest-Boivin aussi affirme avoir été étonnée. «Selon moi, pour l’avoir vu au vestiaire et dans la chambre, elle avait 18 ans», a-t-elle soutenu.

La jeune femme a évoqué l’intimidation dans les appels de l’enquêteur. «J’ai dit que je ne voulais pas m’en mêler, que s’il y avait quelque chose, j’irais en cour pour expliquer, pour raconter l’événement.»