Cour d’appel : un accusé d’Alanine devra payer s’il veut être représenté

En appel du verdict de culpabilité rendu contre lui et de la peine de plus de cinq ans de pénitencier que lui a imposée le juge François Huot de la Cour supérieure, Stéphane Allie de Saint-Cyrille-de-Wendover a vu le plus haut tribunal du Québec lui refuser une désignation d’avocat sans frais pour le représenter dans le processus d’appel.

Le juge Étienne Parent de la Cour d’appel a fait part de sa décision dans un jugement rendu le 26 octobre.

Stéphane Allie, 43 ans, et un coaccusé Stéphane Thibault, ont subi un procès devant jury du 6 janvier au 6 avril 2014, moment ils ont tous deux été déclarés coupables de complot pour trafic de stupéfiants, trafic de stupéfiants et d’avoir commis ces trafics au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou en association avec elle.

Des faits survenus entre le 1er janvier 2006 et le 2 mars 2007 à Victoriaville, Drummondville, Saint-Germain-de-Grantham et ailleurs au Québec. L’enquête policière concernant le projet Alanine avait commencé en décembre 2005 et visait les Devils Childs, un groupe de motards criminalisé.

Un mois après avoir été déclaré coupable, Stéphane Allie, le 5 mai 2014, alors représenté par son avocat, a interjeté appel du verdict de culpabilité.

Il a reçu tout de même sa peine le 20 mai 2014 alors que le juge Huot le condamne à une peine totalisant 60 mois et 291 jours de pénitencier.

Le 1er juin 2014, Allie a obtenu la permission d’en appeler de cette peine.

Requête en désignation d’avocat sans frais

Dans sa décision, le juge Parent de la Cour d’appel souligne que Stéphanie Allie a purgé une partie de sa peine et qu’il jouit, depuis mai 2016, d’une libération conditionnelle.

Jusqu’au 1er janvier 2016, la Commission des services juridiques a assumé ses honoraires et ses déboursés, un montant d’environ 55 000 $, pour la confection de 43 volumes comprenant les procédures, les pièces et la transcription de la preuve au procès.

Par ailleurs, la confection du mémoire d’appel n’est pas encore complétée en raison des problèmes de santé de l’ancien procureur de Stéphane Allie qui a dû cesser de le représenter à la fin d’avril.

Le retour au travail de Stéphane Allie l’a rendu inadmissible à l’aide juridique, une décision qu’il a contestée, mais qui a été maintenue le 30 août dernier par le Comité de révision qui estimait à un peu plus de 65 000 $ son revenu familial.

Les arguments

Devant la Cour d’appel, Stéphane Allie a fait valoir son incapacité à retenir, à ses frais, les services d’un nouvel avocat, indiquant que son ancien procureur estimait à 200 heures le temps nécessaire pour la rédaction du mémoire et qu’il en coûterait plus de 20 000 $ pour cette seule étape, en plus de frais pour la présentation de l’appel.

Le demandeur a insisté sur la complexité et le sérieux des moyens soulevés en appel, plaidant ainsi sur la nécessité qu’un avocat lui soit désigné sans frais, tout en faisant remarquer qu’il ne possédait pas les compétences pour rédiger le mémoire d’appel ni pour poursuivre seul son appel.

La décision

Deux conditions en vertu de l’article 684 du Code criminel sont nécessaires pour permettre la désignation d’un avocat, a noté le juge Étienne Parent.

Il faut ainsi que la demande apparaisse «désirable dans l’intérêt de la justice» et que l’appelant n’ait pas les moyens requis de retenir les services d’un avocat.

«Les deux conditions doivent être réunies pour que l’ordonnance soit prononcée. Il incombe à l’appelant de démontrer qu’il satisfait à ces exigences», écrit le magistrat dans son jugement.

Après analyse, le juge estime que la deuxième condition n’est pas remplie, que les informations concernant la situation financière de l’appelant ne permettent pas de conclure qu’il ne possède pas les moyens pour obtenir l’assistance d’un procureur.

«Je souligne que l’appelant ne produit aucun bilan complet faisant état de ses actifs et passifs», lit-on dans la décision.

Le juge signale aussi que l’appelant, en septembre 2016, sachant qu’il doit retenir les services d’un avocat, vend la résidence qu’il détient avec sa conjointe, réalisant un profit de près de 115 000 $, dont une partie ira pour une mise de fonds pour une nouvelle résidence d’une valeur de 228 000 $ et pour régler différentes dettes.

Le magistrat ne peut statuer, selon lui, que l’appelant n’a pas les moyens financiers pour payer un avocat. «La vente de certains actifs, comme la motocyclette, peut lui procurer des liquidités importantes… Et même si la preuve ne permet pas de connaître ce qui est advenu du profit découlant de la vente de la maison en septembre 2016, l’appelant savait, dès la fin août 2016, qu’il devait retenir, à ses frais, les services d’un avocat», a conclu le juge Parent en rejetant la requête.