Coupable de fraude et d’abus de confiance

L’ex-directeur du Service de protection contre les incendies de Warwick, Bernard Beaudet, a été reconnu coupable, lundi après-midi, de deux chefs d’accusation, un chef de fraude de plus de 5000 $ et un autre d’abus de confiance pour des gestes survenus entre mars 2010 et 2014.

Bernard Beaudet, 56 ans, avait été arrêté en avril 2014 par l’Unité permanente anticorruption (UPAC). Une semaine après son arrestation, le conseil municipal de Warwick procédait au congédiement de son directeur du service d’incendie, estimant que le lien de confiance était brisé.

Il faisait face à des accusations de fraude, d’abus de confiance, de production et d’utilisation de faux documents.

Une accusation de vol, déposée au départ, a été abandonnée en cours de route.

Dix témoins, dont l’accusé, ont témoigné au procès qui a duré un peu plus de trois jours, en avril dernier.

Pour le premier chef d’accusation de fraude, la juge Guylaine Tremblay de la Cour du Québec a conclu que l’ex-chef pompier se servait d’une carte de crédit de la Ville de Warwick pour payer l’essence de son véhicule personnel tout en réclamant, chaque mois, des frais de déplacement.

«Il n’y a pas de preuve concluante concernant des directives claires au sujet des cartes de crédit. M. Beaudet pouvait légitimement penser qu’il avait le droit d’agir de la sorte. Mais il a réclamé des frais de déplacement de 40 sous du kilomètre par mois à la Ville pour de l’essence déjà payée. Il savait que ces 40 sous incluaient l’essence», a indiqué la juge qualifiant les explications de l’accusé «d’évasives et de boiteuses».

«Ses explications n’ont aucune crédibilité et ne soulèvent aucun doute raisonnable. Chaque mois, il ne cherchait, en aucune façon, à rembourser la Ville», a-t-elle ajouté.

La présidente du Tribunal dénombre 204 transactions en 208 semaines, ce qui totalise près de 16 000 $ en essence pour une moyenne de 76 $ par semaine. Et mensuellement, a-t-elle noté, M. Beaudet réclamait de 200 à 250 km en frais de déplacement.

Analysant le témoignage de l’ex-directeur du service d’incendie, la magistrate a fait valoir qu’il semblait «évasif», que ses explications «ne tiennent pas la route» lorsqu’il avance savoir quelle part d’essence revient à une utilisation personnelle de son véhicule. «Ça ne tient pas la route. À six occasions (à Drummondville, Roberval, Granby, Québec, Sainte-Madeleine et Baie Saint-Paul), la carte de crédit a été utilisée à l’extérieur de la MRC sans qu’on y retrouve de l’argent broché au reçu (une façon de rembourser comme il l’avait déjà fait). Il ne fournit aucune explication sur la méthode lui permettant de différence l’utilisation personnelle et celle liée au travail», a précisé la juge Tremblay.

Bernard Beaudet a aussi été reconnu coupable d’abus de confiance en sa qualité de fonctionnaire public. «Chaque mois, il fraudait, au sens de la loi, en réclamant des sommes à la Ville. Cela constitue un écart grave et marqué», a fait savoir la juge en le trouvant coupable d’abus de confiance, un crime passible d’un emprisonnement de cinq ans.

Quant aux autres chefs d’accusation, le Warwickois a été acquitté.

Concernant l’accusation de fraude reliée à l’acquisition de toiles pour orner la nouvelle caserne, la preuve, selon la juge Tremblay, ne révélait pas un acte malhonnête. «M. Beaudet croyait qu’il trouverait un commanditaire pour payer la facture», a-t-elle souligné.

Au sujet de l’achat de pneus pour son véhicule, le Tribunal y constate des preuves contradictoires. Il est possible, de l’avis de la juge, que l’accusé ait cru bien faire, notant du même coup l’absence d’une privation pour la Ville puisque Bernard Beaudet a remboursé les pneus près d’un an plus tard.

Enfin, même s’il savait qu’il produisait de fausses déclarations sur des feuilles de temps d’un pompier, la Cour l’a acquitté en raison d’un doute soulevé quant à l’utilisation recherchée.

Le procureur de la poursuite, Me Alexandre Duval (qui a pris le relais de la retraitée Me Isabelle Roy), a accueilli le verdict avec satisfaction. «Le jugement de la juge est bien motivé. La poursuite principale visait l’essence, alors, nous sommes satisfaits globalement du verdict», a-t-il commenté.

Bernard Beaudet, quant à lui, n’a pas voulu réagir.

Pendant plusieurs minutes après le jugement, les deux parties ont entrepris des discussions dans le but de parvenir à une possible entente sur la peine à infliger à l’ex-chef pompier.

Finalement, la défense et le ministère public ont convenu plutôt de se retrouver à un autre moment. Ils se retrouveront aussi pour les représentations sur la peine le 20 novembre.

«On prévoit une heure s’il n’y a pas d’entente. Et si nous avons une suggestion commune, ce sera fait plus rapidement. De bonnes discussions sont en cours», a mentionné Me Camirand à la juge Tremblay.