Vivre de l’art : le pari d’Andrée-Anne Laberge

Rares sont les artistes de la région qui peuvent vivre de leur art. Il y a bien l’auteur jeunesse Alain M. Bergeron, mais également l’artiste Andrée-Anne Laberge.

Cette dernière vient justement de signer un contrat avec la galerie le Luxart de Montréal qui, dans quelques semaines, présentera ses tableaux à l’encaustique. Une décision longuement mûrie pour l’artiste qui avait déjà eu d’autres offres en ce sens de la part d’autres galeries d’art.

«Plusieurs raisons m’ont fait pencher pour le Luxart», explique-t-elle. Il y a, pour commencer, une question de timing. En effet, la Victoriavilloise était rendue à cette étape dans sa démarche et se sentait prête à se retrouver en galerie à Montréal.

Il y a également eu la rencontre avec le galeriste, Guy Bourget, qui a été un facteur déterminant. «On m’avait conseillé d’y aller avec mon «feeling» et c’est ce que j’ai fait», ajoute-t-elle. Après une rencontre de deux heures avec le galeriste, elle a vu qu’il connaissait son travail et souhaitait aussi lui laisser une liberté de création.

Andrée-Anne Laberge a également pris en considération le fait qu’elle connaissait des artistes qui y étaient et qui y restaient (un autre bon signe) avec un contrat qui n’est pas trop restrictif et qui lui permettra de poursuivre son évolution artistique.

Ainsi, dès le 1er juin, elle présentera des œuvres (des grands formats principalement) dans cette galerie de Montréal.

On peut aussi voir son travail au Musée de l’Hôtel des Postes de Victoriaville où elle présente, jusqu’au 27 mai, une exposition rétrospective.

Une passion, un métier

Si l’art est une passion pour Andrée-Anne Laberge, il lui permet également de payer les factures depuis sept ans maintenant. En effet, elle a décidé à ce moment, après un chemin difficile, d’opter pour l’art à temps complet alors qu’elle aurait pu choisir l’enseignement.

«Depuis que je suis petite que je sais que je veux être une artiste», explique-t-elle. Pourtant, ça ne fait pas bien longtemps qu’elle assume pleinement ce titre. «C’est en passant les douanes alors que le douanier m’a demandé ce que je faisais et que j’ai dit que j’étais artiste alors qu’avant je disais simplement que je faisais de la peinture», confie-t-elle.

Beaucoup de chemin parcouru depuis sa petite enfance, mais pendant ce temps, elle n’a jamais hésité à s’évaluer comparativement aux autres pour voir si c’était réaliste pour elle que de vouloir en faire un métier.

«À l’école, je me suis démarquée à chaque étape et les profs me le disaient aussi. Mais je travaillais énormément et je travaille encore beaucoup. On a beau avoir un bon dessin, mais plus on pratique, meilleure on devient», note-t-elle encore.

Andrée-Anne explique aussi qu’elle a toujours été proactive dans sa démarche pour voir l’accueil des gens face à ce qu’elle créait. Et le fait qu’elle a rapidement vendu ce qu’elle présentait en exposition l’a encouragée à aller plus loin.  «Il faut avoir une vision, savoir où on veut s’en aller et prendre les moyens pour y arriver», a-t-elle découvert. Il lui a donc fallu, à la base, oser organiser des expositions pour montrer ses tableaux.

Après son baccalauréat en art, elle a découvert qu’elle ne pouvait vivre que de son travail. «Je me suis donc tournée vers l’enseignement», souligne-t-elle. Mais il s’agissait pour elle d’un plan B même si les études en ce domaine étaient intéressantes.

Après ce deuxième diplôme, Andrée-Anne a commencé à enseigner. «Et à partir de là, j’essayais de voir quel temps il me restait pour peindre», a-t-elle indiqué. Finalement, c’est un élève qui lui a ouvert les yeux un jour de classe. En effet, elle avait amené une œuvre et un étudiant lui a demandé, après l’avoir vue : «Que fais-tu ici?». «Je me sentais divisée et j’avais le sentiment de faire les deux (enseignement et art) à moitié. Et pour avoir une démarche cohérente, il fallait faire de l’art à temps plein», a-t-elle découvert.

C’est son retour à Victoriaville et des prestations d’assurance-emploi qui finalement l’auront poussée à faire de l’art son travail à temps complet. «Et à partir de ce moment, j’ai commencé à vendre. Je n’avais plus le temps d’enseigner», se souvient-elle.

Depuis, elle continue à travailler très fort, tous les jours dans son atelier, pour produire des œuvres plus poussées qui trouvent presque toujours preneur.

Outre son talent, Andrée-Anne Laberge confie qu’elle a en elle une bonne part d’entrepreneure, ce qui l’aide pour la vente de ses tableaux. Elle est très présente sur les réseaux sociaux, montrant les œuvres disponibles et celles qui sont vendues et n’hésite pas à s’investir au sein la communauté victoriavilloise à sa façon.

En effet, on l’a voit souvent dans différents événements, peindre en direct ou en offrant des toiles pour financer des organismes. «C’est à Victoriaville que j’ai découvert la richesse de la communauté. Alors à mon tour si je peux contribuer…»

Elle n’a jamais eu peur de montrer son travail, en exposition, en galerie, mais aussi en art urbain. «Ça me fait sortir de l’atelier et, après tout, l’art n’appartient pas qu’aux galeries», souligne-t-elle.

Même si chaque cas est d’espèce, Andrée-Anne répond lorsqu’on lui demande quels conseils elle peut donner pour ceux qui voudraient suivre ses traces : «Il faut travailler énormément, du moins le temps de prendre sa place. Bien entendu la qualité de ton travail a aussi son importance. Il ne faut pas non plus hésiter à te mettre au défi pour te situer. Finalement, il faut avoir un bon regard sur soi pour déterminer ses forces et ses faiblesses», résume-t-elle.

L’artiste ne regrette pas d’avoir choisi l’art il y a sept ans maintenant. À 38 ans, elle est parfaitement heureuse et doit parfois se pincer pour réaliser la chance qu’elle a… non en fait la chance qu’elle s’est donnée de poursuivre son rêve artistique.