Une Centricoise derrière La voix et Les chefs

À une époque où tout le monde n’avait pas constamment de caméra vidéo au bout des doigts et où la captation d’images n’était pas à la portée de tous, Jill Niquet-Joyal a reçu un cadeau qui orienterait probablement son avenir : une caméra vidéo. L’adolescente qui a réalisé la vidéo de finissants 2000-2001 du Collège Notre-Dame-de-l’Assomption (CNDA) est aujourd’hui, quelque 20 ans plus tard, la réalisatrice principale de la plus grosse émission de variétés du Québec, La voix.

Jill Niquet-Joyal est originaire de Saint-François-du-Lac (Centre-du-Québec) et sa famille y demeure toujours. Elle a toujours été passionnée par la télévision, les spectacles et la musique. « Étant enfant, j’écoutais beaucoup la télévision. Je créais mes propres mixtapes, mais avec des émissions télé que j’enregistrais sur VHS! », se remémore la Montréalaise d’adoption.

Lorsque Jill a reçu sa première caméra vidéo à l’adolescence, elle s’est mise à filmer tout ce qu’il était possible de filmer dans le cadre de ses études secondaires. « Chaque fois que j’avais un exposé oral, je présentais une introduction filmée ou un sketch comique, et je faisais moi-même le montage à la maison », raconte-t-elle. Elle était également très impliquée dans la vie étudiante et adorait monter les spectacles, les galas, les élections et les remises de prix.

À cette époque, elle a également eu le mandat de réaliser une vidéo qui allait être présentée au bal des finissants à son école secondaire et pour lequel elle avait impliqué tout le corps professoral. « Je me souviens qu’on faisait une scène d’action à la Charlie’s Angel sur le toit du CNDA, et j’avais demandé à sœur Louise, qui était alors directrice, de jouer là-dedans. Sœur Louise m’avait dit à ce moment que j’allais être une réalisatrice plus tard. Quand elle m’a dit ça, c’est là que j’ai compris », révèle Jill.

À 16 ans, elle a donc quitté le Centre-du-Québec pour perfectionner son anglais lors d’une immersion d’un an avant de poursuivre ses études à l’école supérieure en Art et technologie des médias (ATM), à Jonquière.

Dans la cour des grands

Avant de devenir la réalisatrice principale d’un show d’envergure comme La voix, Jill Niquet-Joyal cumule les expériences de toutes sortes depuis une douzaine d’années. « J’ai été assistante réalisatrice avant d’être réalisatrice principale. Tu ne deviens pas réalisateur à un jeune âge, car c’est un métier où tu dois tout maitriser », explique celle qui compare son métier à celui de chef d’orchestre, ou encore à une pieuvre qui déploie ses tentacules dans tous les départements.

Elle a senti qu’elle mettait le pied dans la cour des grands lorsqu’elle a eu l’occasion d’être à la tête de la réalisation de petits projets d’émissions de voyages et de cuisine, comme 99 envies d’Évasion (récipiendaire du gémeau pour meilleure réalisation) au canal Évasion et Vézina, chef responsable à Zeste. « Je réalisais tout de A à Z. C’est là que tu peux te dire : ceci est mon show, j’ai tout choisi. J’ai choisi les couleurs, la musique, la police d’écriture du générique, je coache l’animateur… », énumère la réalisatrice.

Puis, en 2017, la carrière de Jill Niquet-Joyal a pris un nouveau tournant lorsqu’elle s’est fait offrir de participer activement à la refonte d’Occupation Double. « J’ai fait trois années : Bali, Grèce et Afrique du Sud pour lequel on a gagné le gémeau de la meilleure réalisation », révèle-t-elle.

« C’était un projet immense avec une grosse équipe à l’étranger. Je crois que ça m’a donné de la crédibilité, car je chapeautais la nouvelle mouture d’un show très écouté et qui a été, finalement, un succès critique », mentionne-t-elle.

Après trois saisons d’Occupation Double, elle a senti le besoin de s’orienter vers quelque chose de complètement différent, et c’est comme ça qu’elle est arrivée à créer un tout nouveau concept de talk-show aux côtés de Patrick Huard : La tour. « On est parti de zéro et ça a bien marché; on a gagné un gémeau pour la meilleure réalisation. C’est un projet non seulement coup de cœur, mais c’est mon bébé dans lequel j’ai mis beaucoup d’amour. Je pense que ça a porté ses fruits », dit-elle.

Après deux ans, lorsque Patrick Huard a décidé de quitter La tour, Jill a également décidé de partir explorer de nouveaux horizons. « J’avais envie de me coller davantage sur la musique qui est une autre de mes passions », révèle celle qui réalise également Les Chefs depuis trois ans et Bonsoir Bonsoir! à Radio-Canada.

C’est donc à point nommé que Jill Niquet-Joyal a reçu l’appel pour réaliser La voix.

Un plateau d’envergure entre les mains d’une Franciloise

Douze caméras, des directs, des spectateurs, des coachs, des familles, des candidats, un animateur… Ce n’est pas pour rien que La voix est considérée le plus gros show de variétés du Québec et c’est une Franciloise qui s’est fait offrir le mandat de réaliser et de revamper l’édition de 2023.

« C’est un projet colossal par rapport au reste que j’ai fait. C’était la marche de plus à gravir, si on veut!  J’ai accepté ce projet-là en me disant que c’était un gros défi et en me demandant si j’allais être capable de le relever, parce que ce sont souvent des réalisateurs avec plus d’expérience qu’on retrouve sur ce genre de gros plateau. Mais ça se fait par du monde. Il faut juste se faire confiance et l’essayer. », lance Jill Niquet-Joyal.

Cette dernière avait donc le feu vert pour ajouter sa touche au concept. Elle a voulu tout d’abord épurer le look, l’éclairage et la scénographie. « Je voulais rendre ça plus chaleureux, ressemblant davantage à un vrai studio d’enregistrement. Je voulais quelque chose de plus contemporain, à la fois collé sur l’essentiel qui est pour moi la musique et le candidat », illustre-t-elle.

Et les directs, c’est pour la réalisatrice un véritable sport extrême. » En direct, tu n’as pas vraiment le droit à l’erreur. C’est une autre discipline, si on veut, car je mets en onde le travail de tout le monde. C’est comme une double tâche de réalisation. »

Comment sait-on si notre travail est réussi? « À la réalisation, il y a un rythme qui s’installe, comme quand on fait du yoga. Quand tout le monde ne fait qu’un avec le rythme de tout ce qui se passe, c’est-à-dire avec le rythme de la musique, du candidat qui chante, de Charles Lafortune sur scène, de la réaction des coachs et du public en salle; tout ça, on le ressent quand ça fonctionne bien! Quand je regarde l’image, je le sais quand c’est bon », enchaine-t-elle.

Son travail, c’est également de trouver le meilleur équilibre entre la transmission des émotions et l’esthétisme des images. « Quand tu es dans la foule, tu fais ton propre découpage. Tu regardes le batteur, le chanteur, Charles qui parle, la réaction de Marjo. Mon objectif est de transposer ça afin que les gens à la maison ressentent quelque chose, qu’ils sentent qu’on est à la bonne place, au bon moment », explique Jill.

« Le téléspectateur a l’impression d’assister à quelque chose de vrai », conclut-elle.