« Pédalo » : du théâtre sans bouée de sauvetage

Depuis quelques jours s’est amorcée la production estivale du Théâtre des Grands Chênes de Kingsey Falls. C’est la pièce « Pédalo » qui y est présentée en grande première, mettant en vedette le duo formé de Stéphane E. Roy (qui a également écrit le texte avec Benoît Roberge) et Marc Fournier.

D’entrée de jeu, il faut parler du décor de cette pièce qui se situe tout près d’un tout-inclus à Cuba. Bien qu’épuré (toute l’action, ou presque, se passe sur le pédalo en pleine mer), il est ingénieux. Le pédalo a en effet été placé à une douzaine de pieds de hauteur, penché vers l’avant. Cela permet à toute la salle de bien voir les deux gars qui passent presque l’heure et demie de la pièce dans le petit engin nautique. Quelques toiles derrière, affichant ciel et mer, et le tour est joué.

Ils en pédalent un coup tous les deux, échangeant en même temps sur leur vie respective, lors de cette sortie en mer qui leur donne en même temps l’occasion, pour un, de passer quelques heures loin de sa conjointe (qui est portée sur l’alcool) et l’autre qui y est venu en compagnie d’une nouvelle flamme avec qui il n’a pas grand-chose en commun. Les deux amis de longue date se confient, sans retenue ni bouée de sauvetage, sur leur vie, leurs aspirations et leurs déceptions sans mettre de gants blancs.

Et au fur et à mesure que leur situation prendra une tournure imprévue, voilà que les deux passagers du pédalo adopteront une autre attitude, surpris par le danger. Leur désespoir apportera un éclairage nouveau sur leur vie et grâce à une fin inattendue, les spectateurs auront appris à connaître les deux personnages sous différentes facettes. Plusieurs s’y reconnaîtront aussi.

Dans le programme, on parle d’un huis clos sur mer pour oreilles averties. On y entend en effet quelques blagues salées (comme la mer) et sur des sujets qu’on ne doit pas aborder en 2022, un vocabulaire d’église et quelques jeux de mots. Outre cela, il y a même une partie instructive où les spectateurs en apprennent sur la terminologie marine grâce au personnage de Sébastien.

Il est impératif de saluer le travail des deux comédiens qui pendant 90 minutes (sans entracte) se tortillent, changent de place, pédalent tout en jouant leur rôle, avec un texte ambitieux, sans véritable pause. Une véritable épreuve olympique théâtrale, sans filet.

On peut voir « Pédalo » à Kingsey Falls jusqu’au 28 août. La pièce prendra ensuite la route de la tournée partout à travers le Québec.