Comme si Aline et Benoît revenaient à Sainte-Victoire

C’est toujours à Victoriaville que l’auteur et conférencier Pierre Ducharme lance ses ouvrages. Il ne fera pas exception à sa règle, revenant dans sa patrie natale le 1er octobre pour lancer son quatrième livre intitulé «La Soprano et l’Organiste» relatant les brillantes carrières d’Aline Fournier (1893-1968) et de Benoît Verdickt (1884-1970).

Ce quatrième ouvrage, Pierre Ducharme ne l’a pas écrit seul. Le petit-fils du couple, Jacques Beaudoin, y a largement contribué. Il avait hérité de sa mère des boîtes et des boîtes d’archives qu’il se promettait de fouiller au moment de sa retraite, explique M. Ducharme.

Et ces archives ont été précieuses, surtout pour retracer le parcours de la soprano, elle qui n’a pas, comme son mari, un pavillon à son nom, décédée à Québec dans le plus grand dénuement. À Lachine, le nom de Benoît Verdickt a été donné à un bâtiment, rappelant que pendant 50 ans, il a œuvré comme maître de chapelle à l’église des Saints-Anges.

Le lancement du livre aura lieu à la sacristie de l’église Sainte-Victoire le dimanche 1er octobre à compter de 14 heures, organisé avec le concours de la Société d’histoire et de généalogie de Victoriaville.

L’organiste Luc Laramée a accepté d’y participer, interprétant le Notre Père qu’avait composé Benoît Verdickt.

Le choix du lieu n’a rien de fortuit. C’est là que la carrière de l’organiste a commencé, lui qui, originaire de Belgique, débarque à Victoriaville en 1906; il a 22 ans. La fabrique de Sainte-Victoire lui consent un salaire annuel de 300 $.

Et c’est dans cette même église qu’il épouse, en 1909, la «fort jolie» Aline Fournier, cette jeune élève à qui il donne des leçons de musique. Originaire de Sainte-Sophie-de-Lévrard, elle étudie au couvent des sœurs de la Congrégation Notre-Dame situé juste à côté de l’église. Elle n’a que 16 ans au moment de son mariage.

«Mesurons la distance qui sépare ces deux êtres. Verdickt est presque dix ans plus vieux qu’Aline; il est belge d’origine flamande avec un fort accent et il essaie tant bien que mal de s’intégrer dans les Bois-Francs, une région où l’immigration étrangère est rarissime, loin de sa famille. Aline pour sa part, arrive à peine de son village natal et se trouve l’unique fille d’un ménage qui ne compte que deux enfants. Pour elle, Victoriaville, c’est la grande ville!», écrivent les auteurs.

En quelque 150 pages, ils relatent l’histoire, les histoires devrait-on plutôt dire, des deux artistes. Parce que s’ils demeureront légalement mariés – à cette époque, le divorce est impensable – Aline et Benoît mèneront des carrières parallèles. Sa voix de soprano colorature, Aline la porte jusqu’aux États-Unis et en Europe, alors que Benoît s’ancre à Lachine. C’est lui qui a la «garde» de leur unique fille que le couple a aussi appelée Aline. Leur deuxième fillette est décédée à cinq mois d’une trop forte dose d’un sirop calmant administrée accidentellement par la bonne.

Les auteurs admettent qu’ils ne peuvent s’aventurer à expliquer comment les chemins des deux artistes ont pu s’écarter. Alors qu’Aline amorce sa carrière au théâtre Loew avec la troupe de vaudeville de Madame Dorée, son mari répondait : «Je chante pour le Bon Dieu, elle chante pour le Diable» à ceux qui lui en demandaient des nouvelles. «C’était tout dire», soutiennent les auteurs.

La destinée de ces deux personnages a touché la corde de mélomane de Pierre Ducharme et son grand désir de faire connaître Victoriaville, son histoire. La vie artistique n’a pas commencé qu’en 1980, s’exclame-t-il. Et l’histoire de Victoriaville ne se décline pas que par des noms comme Laurier, Lavergne, Béliveau, Perreault, que par L’Union des Cantons de l’Est ou par les industries du meuble et du cercueil, soutient-il.

Le fils de Maurice Ducharme – un ex-maire de Victoriaville – se plaît à s’attarder à ceux et celles dont «personne ne parle», mais qui font pourtant partie du patrimoine. «Je veux ajouter à la mémoire longue.»

Son quatrième ouvrage n’étant pas encore lancé qu’il a déjà entrepris des recherches sur un autre personnage ayant habité la maison rouge des Bécotte rue Laurier – aujourd’hui propriété du conseiller municipal Michael Provencher – le prosateur Henri d’Arles. Rendez-vous dans deux ans, espère-t-il.