Pourquoi ai-je été exclue de la liste Facebook d’Alain Rayes?

J’ai songé longuement à la possibilité de réagir ou non aux propos d’Alain Rayes, candidat conservateur dans ma circonscription de Richmond-Arthabaska. Dans un article publié le 2 septembre dernier intitulé : « Le candidat Rayes s’invite dans les cuisines», les derniers paragraphes m’ont interpellée. Nous pouvons y lire ceci :

«Rappelant qu’il avait fait le choix de bannir de son compte Facebook huit personnes et d’effacer les commentaires «hargneux, irrespectueux, répétitifs», il a souligné qu’en privé, beaucoup de gens lui recommandaient de «rester calme», de ne pas s’adonner à ce genre de campagne négative. «Ce style de campagne va jouer contre ceux qui s’y adonnent», prédit Alain Rayes.

Il y a de la «démagogie et des raccourcis intellectuels» dans certains propos, juge encore le candidat Rayes. C’en est un que de vouloir condamner le pétrole sans penser aux 200 000 jobs qui y sont associés, a-t-il donné comme exemple.»

Pourquoi me suis-je sentie interpellée? Parce que je fais partie des personnes que M. Rayes a supprimées de son compte Facebook. Je vous raconte. Le 25 juillet 2014, le journal Le Devoir publie un article intitulé «Ottawa élimine un projet de protection marine». Toujours d’actualité avec les projets de transport du pétrole, j’ai repris connaissance de cet article le 30 juillet 2015. Cet article raconte que sans donner d’explications, le gouvernement Harper venait de : «tuer un important projet de zone de protection marine que le fédéral étudiait depuis plus de 15 ans au Québec. […] Cette aire aurait permis de mieux préserver une large part de l’estuaire du Saint-Laurent incluant le secteur de Cacouna, où TransCanada souhaite construire un port pétrolier destiné à l’exportation des sables bitumineux».

Inquiète et indignée par la situation, j’interpelle alors Alain Rayes sur la question pour savoir comment il peut défendre cette décision prise par son nouveau parti.

C’est à la suite de cette interpellation que j’ai été cavalièrement retirée de sa liste Facebook en guise de réponse. Est-ce le type de question M. Rayes que vous trouvez hargneuse, irrespectueuse, répétitive, démagogique et/ou un raccourci intellectuel? La question que je vous ai posée vient d’un fait réalisé par le gouvernement Harper, donc suivant l’idéologie du Parti conservateur en termes d’environnement, parti dont vous endossez les couleurs et pour lequel vous aviez déjà annoncé votre désir de briguer les suffrages. Nous étions alors à quelques heures du déclenchement annoncé de la campagne électorale actuelle.

Quiconque me connaît sait pertinemment que les actions réalisées par le Parti conservateur du Canada, entre autres, et son idéologie ne me plaisent pas. Mais jamais, je ne vous ai manqué de respect comme personne. Cependant, et je ne vous apprendrai rien sur ce fait, lorsque nous endossons un parti politique pour une élection, nous devons assumer ce que ce même parti politique a fait et être en mesure de l’expliquer et de le défendre. Il est alors normal d’être questionné et sollicité pour cette raison. Je ne demandais qu’une seule explication, M. Rayes. Vous avez répondu en me retirant de votre liste. Prétexter que de toute façon vous ne pourrez pas me convaincre du bien-fondé de cette position parce que je suis à l’opposé de l’idéologie et des valeurs de votre parti n’est pas une excuse. C’est un manque de démocratie. Si vous êtes élu, nous aurons à être interlocuteurs à un moment ou à un autre comme citoyenne ou représentante du groupe communautaire pour lequel je travaille. Certes, je ne suis pas d’accord avec le parti que vous avez choisi, mais vous comme moi, nous travaillons à l’amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens. J’espère que ce sera en dehors de toute partisanerie…

Ah! J’oubliais! Quand vous dites que c’est démagogique et un raccourci intellectuel de condamner le pétrole sans penser aux 200 000 jobs qui y sont associés, je comprends votre point de vue économique, sans l’endosser. Autant d’emplois qui ne font pas prospérer ma région entrepreneuriale, au contraire. Dans l’ensemble, au Canada, l’augmentation de la valeur du dollar canadien causée par «l’âge d’or bitumineux» a plutôt fait pâtir les entreprises exportatrices.

J’espère que vous comprendrez aussi mon point de vue et celui de bien des Canadiens et des Canadiennes qui trouve également bien démagogique et qui reconnaissent une odeur de raccourci intellectuel de mesurer les impacts du pétrole avec les seuls 200 000 emplois qui y sont associés. Parce que, l’air de rien, l’utilisation à outrance des combustibles fossiles comme le connaît la planète, ça ne touche pas que 200 000 personnes. C’est plus de 7 milliards d’individus qui en subissent les conséquences avec les changements climatiques et les problèmes de pollution. Vous, mieux que quiconque, puisque maire du berceau du développement durable, devriez saisir ce pourquoi les gens qui condamnent le pétrole et cette vision de développement à court terme militent. Je crains que vous ayez bien peu de voix pour apporter cette vision du monde à l’intérieur du parti que vous avez choisi. Toutefois, étant de nature optimiste, je vous souhaite bonne chance pour influencer ce parti pancanadien de l’intérieur puisque c’est ce que vous souhaitez faire. Et surtout, bonne démocratie!

Caroline Moreau

Citoyenne