Biodiversité : l’importance de protéger les espèces

VICTORIAVILLE. Le danger guette de plus en plus la faune du Québec, selon un dossier de TC Media réalisé par Roxane Léouzon. Qu’en est-il au Centre-du-Québec? Le journal La Nouvelle Union s’est penché sur la question en rencontrant le biologiste Rémi Gaudreau de l’organisme Copernic.

D’abord, les données recueillies par TC Media révèlent la présence de 5 espèces menacées, 8 autres vulnérables et 14 espèces susceptibles de le devenir.

Avec 27 espèces menacées, vulnérables ou susceptibles de le devenir, le Centre-du-Québec se situe au 11e rang des 17 régions administratives du Québec alors que la Montérégie (54), l’Outaouais (44) et les Laurentides (42) accaparent les premiers échelons.

À l’inverse, c’est dans le Nord-du-Québec (17) et sur la Côte-Nord (2) qu’on retrouve le moins d’espèces en péril.

Les statuts espèce menacée et espèce vulnérable sont très proches. «Il est question d’espèces en danger. Quant au troisième statut, celui d’espèce susceptible de le devenir, indique qu’il ne s’agit pas d’une menace actuelle. Un statut de conservation un peu moins préoccupant, mais ces espèces font l’objet d’une évaluation», explique le biologiste Rémi Gaudreau, chargé de projet depuis quatre ans au sein de Copernic.

Pour les espèces menacées et vulnérables, note le scientifique, on procède à des évaluations. «Il faut alors établir des plans d’action pour les protéger, pour les conserver», indique M. Gaudreau.

Dans la région centricoise

Le Centre-du-Québec compte donc cinq espèces menacées. Il s’agit du dard de sable, de la lamproie du Nord, de la pie-grièche migratrice, du pic à tête rouge et du chevalier cuivré.

Pour un, le dard de sable est difficile à étudier en raison de sa taille et de son comportement. «Il fait une dizaine de centimètres. Il est difficile à voir par sa couleur et son comportement. Il va s’enfouir dans le sable. C’est un poisson qui ne sera pas pêché. Il est rarement récolté», souligne Rémi Gaudreau.

Pour l’étudier, il faut avoir recours à des techniques spéciales, à un protocole rigoureux, à une bonne méthodologie. «On le connaît ce poisson. On étudie sa population dans d’autres rivières au Québec. Il est nouveau dans la rivière Nicolet. On l’étudie ici depuis seulement deux ans», fait savoir le représentant de Copernic.

Les petites populations du dard de sable et le fait qu’elles soient très distancées les unes des autres expliquent son statut précaire, selon le biologiste.

Mais sa présence, dit-il, revêt son importance. «Il représente une source de nourriture pour de plus gros poissons d’intérêt sportif. Le dard de sable mange aussi des insectes. Il fait partie intégrante de la chaîne alimentaire, assure Rémi Gaudreau. De plus, il constitue un indicateur de la qualité de l’eau et de l’écosystème.»

Présent dans les rivières en bonne santé, ce poisson, vulnérable à la pollution, sera l’une des premières espèces à disparaître dans une rivière qui se dégrade.

Au sujet de la lamproie du Nord, il s’agit, selon le biologiste, d’un petit poisson qui peut ressembler à un ver. «Mais il est très peu répertorié dans les différentes pêches effectuées, sportives ou scientifiques», note-t-il.

Le chevalier cuivré, lui, est une autre espèce de poisson qu’on retrouve surtout dans la rivière Richelieu et au lac Saint-Pierre, mais qui peut remonter pas très loin dans la rivière Nicolet. «En fait, ça fait longtemps qu’on ne l’a pas aperçu dans la rivière Nicolet, souligne M. Gaudreau. Il s’agit d’un poisson très sélectif dans son régime alimentaire, ce qui le rend fragile. Il se nourrit d’une espèce de mollusque. Si le chevalier cuivré disparaît, un impact peut se faire sentir sur le mollusque et sur les plus petits organismes.»

Voilà toute la question de la chaîne alimentaire. «Si on enlève un élément de la chaîne, cela a un impact sur tout le reste», précise le scientifique.

Biodiversité en danger

L’activité humaine a toujours un impact sur la biodiversité, mais on peut la contrôler, fait valoir le biologiste Rémi Gaudreau.

La fragmentation des milieux affecte les espèces qui y vivent. «Le fait, par exemple, de séparer deux massifs forestiers par une route, un développement résidentiel ou une voie ferrée, ou encore réduire la taille d’une forêt pour une activité agricole, ou fragmenter pour faire des îlots plutôt qu’un important massif forestier peut avoir un impact sur les espèces. La dégradation de la qualité des milieux, de la qualité de l’eau, les affecte. Quand on perd un habitat, on perd de la biodiversité», explique le chargé de projet chez Copernic.

La connaissance de la fragilité de certains milieux doit guider les actions. «Il faut savoir quel type de milieu préserver et orienter nos développements en fonction de la fragilité de certains milieux, affirme Rémi Gaudreau. Par exemple, on sait que les milieux humides, les étangs, les marais et marécages sont des milieux sensibles renfermant beaucoup de biodiversité. Ce qu’on peut faire, c’est orienter nos développements résidentiel, commercial et industriel, ailleurs que dans ces milieux. On doit viser un autre type de milieu. En préservant ces milieux, on fera de même pour la biodiversité.»

Quoi faire pour protéger la biodiversité?

Les élus, estime Rémi Gaudreau, sont de plus en plus sensibilisés à la question. Plusieurs municipalités de la région ont dressé un inventaire, un plan des milieux humides existants. «Cela permet de mieux orienter les prochains développements, de maintenir et de protéger les milieux humides. Voilà une façon simple d’aller vers le développement durable. On a besoin d’un développement, certes, mais certains milieux doivent être protégés», soutient le biologiste.

La protection des espèces passe d’abord, selon lui, par la connaissance de leur biologie, de leurs besoins. «Ensuite, on doit poser des gestes concrets en lien avec leurs besoins pour préserver leurs différents habitats. S’il s’agit de conserver une eau limpide, ce peut être, par exemple, d’éviter l’érosion et la sédimentation.»

Rémi Gaudreau est d’avis qu’on tend vers une amélioration de la qualité générale des habitats. «Les plans d’action existent, on peut les consulter. On les également met à jour assez régulièrement, ce qui permet aussi la mise à jour de nouvelles actions et de dresser des bilans de ce qui est fait.»

Il n’en demeure pas moins, note-t-il, que l’humain prendra de plus en plus d’emprise et de place sur les milieux naturels. «On doit en être conscient, tenir compte des milieux les plus fragiles et orienter ailleurs les développements», insiste-t-il, tout en constatant une volonté.

«Elle existe cette volonté. Pas seulement au niveau municipal, mais gouvernemental également. Des programmes existent et le financement est disponible pour la réalisation de projets. Ça nous encourage», signale M. Gaudreau.

Une riche biodiversité, mais…

En raison de situation géographique, de son climat, de la présence du lac Saint-Pierre, la région du Centre-du-Québec jouit d’une riche biodiversité. «On y retrouve plusieurs centaines d’espèces, des poissons, des oiseaux et autres», indique le biologiste estimant environ entre 5% et 10% les espèces à statut précaire.

Mais attention! Tout peut débouler rapidement si l’être humain ne respecte pas la nature. «Certaines espèces ne figurent pas sur la liste des espèces en danger, mais elles se retrouvent tellement près que si on ne faisait pas attention, le pourcentage d’espèces en péril pourrait grimper rapidement à 50%», mentionne-t-il.

Toujours important d’en être conscient, selon lui, parce que la biodiversité, la faune et la flore, rendent de précieux services à l’Homme. «Si cette biodiversité diminue, des impacts se feront sentir sur nous, sur notre qualité de vie des impacts bien souvent difficiles à calculer monétairement», conclut Rémi Gaudreau.

Espèces menacées

-dard de sable

-lamproie du Nord

-pie-grièche migratrice

-pic à tête rouge

-chevalier cuivré

Espèces vulnérables

-faucon pèlerin anatum

-tortue des bois

-salamandre pourpre

-pygargue à tête blanche

-petit blongios

-méné d’herbe

-fouille-roche gris

-rainette faux-grillon de l’Ouest

Espèces susceptibles

-alasmidonte rugueuse

-obovarie olivâtre

-esturgeon jaune

-bruant de Nelson

-bruant sauterelle

-hibou des marais

-martinet ramoneur

-tortue ponctuée

-salamandre sombre du Nord

-salamandre à quatre orteils

-méné laiton

-chat-fou des rapides

-couleuvre verte

-paruline à ailes dorées

Carte des espèces menacées au Québec :

http://www.lanouvelle.net/PageVolante/6965/Especes-animales-menacees-du-Quebec