Un forum riche en informations

« Une rencontre extraordinaire, toute une journée riche en informations », a exprimé la directrice générale du CALACS Unies-vers-Toi, Lise Setlakwe, dans son mot de fermeture du 14e Forum agressions sexuelles-violence conjugale qui a réuni, jeudi, pas moins de 400 personnes au Centre des congrès de l’Hôtel Le Victorin de Victoriaville.

La journée, a-t-elle souligné, a permis le partage de nombreuses connaissances. « On a appris sur le contrôle coercitif qui permet d’ajuster nos lunettes pour mieux voir les stratégies intentionnelles et répétées de la violence et ainsi rendre visible tout ce qui se trouve sous la partie immergée de l’iceberg. On a appris sur les traumas complexes. Et saviez-vous que nos organisations sont des lieux potentiels de retraumatisation de la victime? Ça m’a porté beaucoup à réfléchir », a indiqué Mme Setlakwe aussi membre du comité organisateur du Forum et membre du comité intersectoriel en matière d’agressions sexuelles et de violence conjugale de la Mauricie et du Centre-du-Québec.

« On a appris aussi, a-t-elle poursuivi, sur la situation des hommes victimes de violence tant sexuelle que conjugale, sur la différence entre la violence conjugale et la maltraitance, sur la violence vécue par les personnes trans, sur les auteurs d’infractions sexuelles et les facteurs de protection. »

Elle a salué et remercié la présidente-directrice générale adjointe du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSS MCQ), Nathalie Boisvert. « Merci à Mme Boisvert qui nous a permis de confirmer que les impacts de la violence en contexte conjugale et sexuelle ont été très bien compris par notre CIUSSS. »

Le tribunal spécialisé

Lise Setlakwe a bien apprécié la conférence de clôture sur l’accompagnement des victimes d’agression sexuelle et de violence conjugale dans le processus judiciaire et l’implantation du tribunal spécialisé. « On ne pouvait mieux terminer le forum », a-t-elle noté. 

Trois conférencières de la région de Drummondville ont, à cet effet, pris la parole pour aborder ce projet pilote de tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et conjugale.

La criminologue Sophie Bergeron, coordonnatrice à l’implantation des tribunaux spécialisés pour le réseau des CAVAC (Centre d’aide aux victimes d’actes criminels), la criminologue Jessica Thibault, intervenante sociojudiciaire de liaison (ISL) pour le CAVAC Centre-du-Québec et Me Cassandra Hamel, procureure aux poursuites criminelles et pénales, se sont exprimées sur le sujet.

Sophie Bergeron a relaté la petite histoire menant à la création du tribunal spécialisé et à la mise en place de 10 projets pilotes au Québec, dont un au palais de justice de Drummondville. Tout cela mènera éventuellement à des tribunaux spécialisés dans tous les palais de justice du Québec.

Le tribunal spécialisé, a-t-elle expliqué, repose sur quatre piliers, dont la formation de tous les acteurs sociojudiciaires, l’accompagnement des victimes (l’élément central) et des aménagements sécuritaires et chaleureux dans les palais de justice. « Pour que les personnes victimes aient le sentiment qu’on ait pensé à elles. »

Jessica Thibault a présenté, de son côté, le rôle de l’ISJ,  rôle consistant à accompagner la victime du début à la fin, d’évaluer toute la situation, d’arrimer les services, de préparer le passage à la cour et de communiquer au procureur une opinion professionnelle pour lui apporter un meilleur éclairage.

Me Cassandra Hamel a exposé, pour sa part, le rôle du procureur aux poursuites criminelles et pénales qui traite la plainte et doit décider si la preuve justifie le dépôt d’accusation. « Le procureur n’est pas l’avocat de la victime. Il est indépendant, il doit demeurer objectif dans sa prise de décision », a-t-elle précisé.

Avec le tribunal spécialisé, les intervenants, a-t-elle dit, vont tenter de traiter en priorité ces dossiers de violence conjugale et d’agressions sexuelles. « À Drummondville, nous avons un rôle spécifique par mois pour la gestion des dossiers, de même qu’une journée par mois dédiée à des procès », a-t-elle fait savoir.

La création de ces nouveaux tribunaux exige de chacun des acteurs de changer leur façon de faire, a fait remarquer Sophie Bergeron. « Ça demande à tout le monde de changer leur pratique. Par exemple, il revenait aux procureurs jusqu’à tout récemment d’apprécier le risque. Maintenant, on a confié ce rôle à l’ISL. Et ça demande aux procureurs de lui faire suffisamment confiance et d’agir à partir de cette opinion professionnelle », a-t-elle expliqué.

Questionnée sur les obstacles vécus à Drummondville avec le projet pilote, Me Hamel a répondu qu’il y a là un défi d’organiser l’agenda, le réaménagement des journées de procès, des dates de cour. « C’est encore nouveau, c’est en train  de se placer. On est encore en train de s’adapter. Mais en se parlant, en communiquant, ça fonctionne », a-t-elle assuré.

En conclusion du forum, Lise Setlakwe a notamment remercié l’ensemble des conférencières et conférenciers pour leur contribution à la qualité de l’événement.

« Merci d’avoir pris de votre temps pour participer à ce forum qui nous a permis de faire émerger de nouvelles connaissances. Ensemble contre la violence, ça veut dire qu’on partage et on apprend pour mieux intervenir », a-t-elle exprimé, tout en disant sa fierté devant la mobilisation des acteurs dans le développement d’une journée riche en connaissances et en partage. « Vous faites vraiment la différence dans l’accompagnement et le soutien des personnes victimes, des proches, a-t-elle poursuivi. Le travail fait en concertation a en effet évolué au cours des dernières années et nous sommes fiers de ce qui est mis en place dans notre région. Votre mobilisation le démontre et votre participation en fait foi. »

Cette mobilisation aura l’occasion d’être démontrée de nouveau dans les prochains mois, a-t-elle signalé, avec la mise en œuvre de différents chantiers, dont la formation des comités locaux d’intégration des services en lien avec les tribunaux spécialisés, le déploiement de l’aide financière d’urgence et les cellules d’intervention rapide en violence conjugale.

« Nous croyons que les différents chantiers actifs sur le territoire vont permettre de mieux arrimer les instances, nos efforts et nos pratiques visant une meilleure réponse aux besoins des personnes touchées par cette problématique. Nous devons continuer nos efforts communs pour contrer la violence conjugale et les agressions sexuelles. Ensemble contre la violence! », a-t-elle conclu.