Le manque de moyens entraîne de la détresse psychologique chez les profs

L’effort de plus en plus grand exigé des enseignants et la gestion du réseau scolaire selon une approche axée sur la performance ont un coût élevé tant sur la santé mentale des professeurs que sur l’enseignement offert aux élèves et, en bout de ligne, sur les finances de tout le réseau.

Réunis à Montréal, mercredi, quelque 300 délégués de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) se penchent sur les moyens à mettre en oeuvre pour mieux protéger leurs membres et les soutenir.

La FAE, qui représente quelque 34 000 enseignants, souligne que 38 000 jours de calendrier ont été pris pour des absences en raison de problèmes de nature psychologique en 2016-2017 par des enseignants qui sont en arrêt de travail depuis plus de deux ans dans les 10 commissions scolaires qu’elle représente.

Il est permis de soupçonner qu’il s’agit de la pointe de l’iceberg, puisque le Québec compte 72 commissions scolaires.

Pour cette seule année scolaire 2016-2017, les 10 commissions scolaires en question ont versé 12,8 millions $ en salaires de remplacement pour les professeurs qui étaient absents en invalidité longue d’une durée de plus de deux ans.

Les délégués présents à la rencontre ont notamment pu entendre en début de journée deux chercheurs qui ont analysé la nature de l’environnement de travail et les causes de la détresse psychologique qui entraîne des absences de longue durée.

Les travaux de la sociologue Marie-France Maranda et du professeur Simon Viviers font état de la culture du «trop» et du «manque», soit trop d’élèves dans les classes, trop d’élèves présentant des difficultés diverses et trop d’exigences individualisées alors que parallèlement, les enseignants manquent de ressources, manquent de reconnaissance et manquent de soutien politique.

Des phénomènes en croissance viennent s’ajouter à ces conditions, notamment le fait que les enseignants se sentent de plus en plus appelés à s’engager dans une relation d’aide sociale qui va bien au-delà du travail d’enseignant, et ce, dans le but de combler des manques éducatifs, mais aussi sociaux et organisationnels.

Pendant ce temps, selon les chercheurs, la philosophie de gestion tourne autour d’un discours positif visant à mousser l’enthousiasme et la résilience face à l’adversité, et qui interprète les situations de surcharge comme un problème personnel de l’enseignant incapable de gérer son temps de travail et son désenchantement comme étant un manque de vocation pour l’enseignement.

Les deux chercheurs soulignent que s’ajoutent à cette philosophie de gestion de fortes pressions de performance, où l’élève et le parent sont désormais des clients et où la performance de l’enseignant est jugée selon la réussite de ses élèves. Ils notent également que la profession est soumise à une précarisation grandissante, alors que le nombre de salariés temporaires dépasse celui des permanents depuis quelques années.