Le capitaine Érick Théberge… fier Vétéran de l’année

SOUVENIR. Le Vétéran de l’année est bien jeune. À 43 ans, le capitaine d’artillerie Érick Théberge a accepté ce titre avec honneur et fierté à l’occasion des cérémonies du Jour du Souvenir, le samedi 7 novembre à Victoriaville.

Le plaisir est d’autant plus grand pour ce membre du 62e Régiment d’artillerie de campagne de Shawinigan que l’invitation lui a été faite par la Légion canadienne, filiale 86 Arthabaska, à laquelle il est toujours resté attaché.

«Mes racines sont à la Légion. Je suis content qu’on ait pensé à moi», dit-il.

C’est au local de «sa» Légion que, collégien, il écoutait avec tout autant d’attention que d’admiration le récit des vétérans. Par défi et pour l’aventure, il avait joint le 62e Régiment en compagnie de Stéphane Croteau. Les deux amis fréquentaient le cégep de Victoriaville la semaine. «On était content de dire que nous passions nos fins de semaine dehors à tirer du canon!»

Il faut dire que le benjamin de la famille Théberge est né sur la base de Valcartier, son père étant militaire. La famille s’est installée à Victoriaville alors qu’il avait cinq ans.

C’est aussi au local de la Légion à Victoriaville où il a grandi et étudié qu’il revient fréquemment, peu importe d’où il arrive, de Winnipeg, de Shawinigan, de Québec, d’Afghanistan.

Frères d’armes

Et c’est en revenant d’Afghanistan justement qu’à la Légion, il a pu retrouver ses «frères d’armes» et qu’ensemble, à leur manière, ils ont pleuré la perte du caporal Yannick Sherrer.

C’était en 2011. «J’étais en Afghanistan en même temps que lui», raconte le capitaine Théberge. Il ne se trouvait pas à ses côtés, mais suffisamment près pour deviner immédiatement que le bruit et la fumée de cette explosion avait fait des morts.

Un autre décès en Afghanistan, celui du major Yannick Pépin, a également ébranlé la «gang de Victo». Tous les militaires qui connaissaient le major ont fini par comprendre qu’ils avaient fait la même chose chacun de son côté à leur retour au pays, «tourner en rond dans la maison».

«Non, même la mort de collègues ne nous donne pas envie de sortir des forces armées. Au contraire, ces morts nous soudent les uns aux autres», affirme encore le capitaine d’artillerie.

La «confrérie», le sentiment que l’on peut toujours aider et être aidé, l’a attiré, maintenu et conforté dans les forces armées.

Il a séjourné huit mois en Afghanistan dirigeant une troupe de deux canons chacun de ces M777 étant manœuvré par dix soldats, de six mortiers et une troupe technique.

«Une mission, comme celle-là, c’est le summum pour un militaire. J’y serais retourné deux mois plus tard.»

Parce que les deux mois ayant suivi son retour ont été difficiles, admet le papa de deux garçons.

Il dit qu’à son retour, il lui a fallu du temps pour décompresser, pour reprendre la cadence d’ici, bien moins rythmée que ce qu’il avait vécu là-bas. «Oui, on s’ennuie lorsqu’on revient. Ça ne va jamais assez vite. Toutes nos perceptions sont bouleversées.»

Il fait l’éloge de sa conjointe, Véronique Desloges, qui l’a toujours soutenu… et qui a su le faire aussi auprès des familles endeuillées par son travail d’agente de comptoir pour Air Canada. «Des bottines sur le comptoir», elle en a vu, ayant souvent accueilli les proches de militaires décédés.

Militaire et journaliste

L’armée est, en soi, une société, une bulle, observe celui qui a déjà été journaliste jusqu’à Winnipeg pour le journal La Liberté, ainsi qu’à la radio de Radio-Canada comme réalisateur.

Sa carrière militaire amorcée au début des années 1990 est entrecoupée d’un détour par la France (de 1998 à 2000) où il a œuvré comme stagiaire pour un programme franco-québécois et de quelques années de travail journalistique.

En 2005, alors qu’avec sa conjointe il installe sa famille à Québec (où se trouve toujours son lieu de résidence), il revient au 62e Régiment, passe de Québec, à Valcartier, puis à Shawinigan où il travaille en permanence.

En fait, il a joint la Force régulière en 2008, son lieu d’attache étant le 5e Régiment d’artillerie légère du Canada.

Ayant suivi son cours d’officier observateur avancé, il pourrait être appelé à tout moment à une nouvelle mission sur le terrain à l’étranger. À Shawinigan, il est pour ainsi dire un mentor auprès des officiers.

«Mettre le bon chapeau et la bonne paire de lunettes, mettre les choses en perspective. Avoir le sens de l’urgence et de l’intérêt public.» C’est ce qu’il répond lorsqu’on lui demande comment il concilie le journaliste et le soldat en lui.

Et il ajoute que l’expérience de la famille, son rôle de coach au hockey (auquel s’adonnent ses fils de 14 et de 10 ans) contribue aussi à faire de lui l’homme qu’il est.