Et la vie continue… avec un nouveau cœur!

Mariée et maman d’une petite fille de sept ans, Karine Lacharité de Saint-Albert a surmonté de multiples épreuves, mais aujourd’hui, un nouveau cœur lui permet de vivre, elle qui, depuis sa naissance, était condamnée à subir, un jour, une greffe.

Ce jour est arrivé le 23 novembre 2023. On l’attendait depuis environ cinq ans.

Claude, le père de Karine, se souvient d’avoir vu arriver le cœur à l’hôpital. Il avait entendu les sirènes de l’ambulance et de la voiture de police. Sa reconnaissance envers le donneur et sa famille est immense. « Le donneur, c’est une chose, dit-il, mais je suis très reconnaissant envers sa famille qui, en dernier recours, doit donner son accord même si la personne a donné son consentement en signant la carte d’assurance-maladie, à moins que le donneur ne l’ait spécifié dans son testament. »

L’histoire de Karine, comme celle de beaucoup d’autres, démontre, une fois de plus, l’importance des dons d’organes.

Un long parcours

Karine Lacharité a récemment célébré, fin avril, son 41e anniversaire de naissance. Deuxième de la famille, mais la plus vieille des filles, Karine est née avec une malformation cardiaque, une atrésie tricuspidienne, précise sa maman Guylaine Luneau-Lacharité.

S’amorçait dès lors un très long parcours ponctué de nombreux séjours en milieu hospitalier. « Elle a été opérée à l’âge de trois mois. Deux semaines plus tard, on revenait à la maison, raconte Claude Lacharité. Sa vie a ensuite continué jusqu’à l’âge de 5 ans, moment où une autre intervention a été nécessaire. »

Entre 5 et 16 ans, Karine a vécu une période relativement stable. « On allait à l’hôpital aux 6 mois environ. Elle avait une vie d’enfant assez normale dans le sens qu’il n’y avait pas de restrictions. C’est plus à l’adolescence que ça s’est compliqué », se souvient le papa.

À 16 ans, ça ne va pas bien avec le cœur de l’adolescente, ce qui fait qu’une démarche en vue d’une transplantation cardiaque se met en branle :  plusieurs visites et rendez-vous avec psychiatre, psychologue, travailleuse sociale… Pour en arriver à la signature du formulaire faisant en sorte qu’elle se trouvait sur la liste d’attente pour la greffe.

Mais les parents ont bien remarqué que quelque chose clochait chez leur fille.

« On voyait que ça n’allait pas, confie Guylaine. On l’a fait venir au salon et elle nous a avoué qu’elle avait signé pour nous faire plaisir, pour ne pas nous faire de peine. »

Les parents ne l’entendaient pas ainsi. « Tu vas les appeler, lui a dit sa mère, et leur dire que tu n’en veux pas, que tu n’es pas prête. » Et c’est bien ce qui s’est passé.

« Elle nous disait qu’elle n’allait pas faire attention et qu’elle aimait mieux qu’un autre reçoive le cœur. On n’était pas d’accord, se rappelle la maman, mais on l’a assurée qu’on allait respecter son choix, sa décision. » 

« Autrement dit, renchérit Claude, c’était la première fois dans sa vie qu’elle avait le choix de prendre une décision. Auparavant, on décidait pour elle. La première fois qu’elle peut décider une chose, c’est le contraire à 180 degrés de ce qu’on voulait. Mais on l’a accepté. Elle s’est donc retirée de la liste. Ils lui ont dit cependant que si elle changeait d’idée, elle n’aurait qu’à téléphoner et que pour réintégrer la liste, elle n’aurait aucunement besoin de refaire tout le processus. »

Pendant une certaine période, Karine Lacharité n’a pas trop fait attention à sa santé, cessant même la médication. Puis, comme l’a dit sa mère, elle a remis de l’ordre dans sa vie et a repris la médication. Ce faisant, son cœur s’est amélioré.

Arrive le moment d’une autre intervention chirurgicale à l’âge de 24 ans. Une opération très risquée, l’a-t-on prévenue. « Mais elle était prête, mentionne Claude. Elle leur a dit : faites ce que vous voulez avec moi pourvu que vous ne me mettiez pas de morceaux des autres dans mon corps. »

Chacune des opérations survenues à 3 mois et à 5 ans, se remémore Claude, a toujours été « un cauchemar ». L’intervention à l’âge de 24 ans aussi.  L’opération a été reprise le lendemain, avec succès. Après une dizaine de jours aux soins intensifs, Karine a ensuite pu reprendre sa vie sachant, à ce moment, qu’il n’y en aurait plus d’intervention. « On savait qu’il s’agissait de la toute dernière opération. Il n’y avait plus de possibilité. La prochaine étape devait être la transplantation », précise Claude Lacharité.

« Après cette opération, poursuit Guylaine, le médecin avait fait savoir à Karine qu’il lui faudrait une greffe vers l’âge de 40 ans. Et c’est ce qui s’est passé. »

Karine Lacharité a reçu sa greffe au cours de sa 40e année d’existence.

L’intervention a bien réussi. Toutefois, comme si ce n’était pas suffisant, il fallait bien qu’elle attrape la C difficile et la COVID-19. Et puis ses reins ont cessé de fonctionner, l’obligeant à la dialyse. Résultat, Karine s’est retrouvée 47 jours aux soins intensifs.

En fait, elle se trouve à l’hôpital depuis plus de 13 mois. C’est dire la hâte de revenir à la maison.

D’ailleurs, environ un mois avant la greffe, Karine n’en pouvait plus et manifeste le désir de quitter l’hôpital, ce qui signifiait la mort, lui a-t-on fait savoir. 

Le lendemain, les parents de Karine, son mari et sa petite fille lui rendent visite. Elle avait changé d’idée. « Elle était assise au milieu de son lit, elle était tout sourire », souligne Claude. « Mais ce qu’on ne savait pas cependant, ajoute-t-il, c’est qu’à l’hôpital, ils s’étaient donné jusqu’au 30 novembre. Sans donneur, ils lui auraient suggéré de retourner à la maison. »

Longue attente

L’attente de cinq ans pour la greffe s’explique du fait, selon Guylaine, qu’il était question, au départ, d’une double greffe cœur-foie. Le foie de Karine était abîmé en raison d’une cirrhose cardiaque. Pour ce type de greffe, les deux organes doivent provenir du même donneur.

L’incompatibilité d’un cœur et d’un foie a repoussé la greffe à deux occasions.

Puis, un spécialiste torontois consulté a fait savoir qu’il était possible, selon lui, de faire seulement le cœur.  « Ce qui pourrait advenir, c’est le besoin de dialyse pour les reins  peut-être le reste de sa vie. Mais pour tout de suite, vous allez lui sauver la vie, disait-il », mentionne Claude Lacharité.

Le nouveau cœur de Karine est donc arrivé à la toute dernière minute, une semaine avant la date fatidique du 30 novembre.

Des parents fiers

Guylaine et Claude sont fiers de leur fille, de voir qu’elle a rencontré un homme qu’elle a marié, de l’enfant qu’elle a mise au monde, même contre certains avis médicaux. Son cardiologue, cependant, l’a soutenue, affirmant qu’elle en était capable et qu’on allait la suivre de près. Et bébé est arrivé beaucoup plus tôt que prévu, à  sept mois de grossesse.

Les parents ont toujours soutenu leur enfant avec résilience. Le couple s’est bien complété, mais a pu compter sur l’appui de la communauté.  « Ce n’est pas facile, mais on est bien entourés. Mon fils le plus vieux a 16 mois de différence avec Karine, il s’est beaucoup fait garder étant jeune. Lui ne comprenait pas ce qui se passait », souligne Guylaine.

Une dame du village, Diane Martineau, a été une grande alliée, toujours disponible. « Cette personne est sur toutes les photos de famille jusqu’à ce que les enfants commencent l’école », fait savoir Claude Lacharité.

« Ça a été des émotions », reprend Guylaine, ajoutant que leur autre fille, née avec une malformation, a aussi dû prendre place sur la table d’opération à sept occasions. 

« Mais, je ne serais pas la personne que je suis si je n’avais pas eu les enfants qu’on a. Je suis convaincue de ça », assure Guylaine.

« Et il ne faut pas négliger le support obtenu qu’on a autour de nous », continue Claude.

Deuxième rallye

Cet appui de la communauté se manifestera, de nouveau, par la tenue d’un deuxième rallye automobile organisé par le Club FADOQ de Saint-Albert, le dimanche 2 juin, au Boulodrome.

Il en coûte 50 $ par véhicule. On s’inscrit sur place entre 9 h et 10 h 30. Long de 11 km, le rallye peut se faire aussi à vélo. « Tout l’argent amassé est remis à Karine. L’an passé, la première édition a permis d’amasser plus de 5000 $, indique Sylvie Bussière, cousine de Claude.

On disait à Karine : tu vas pouvoir te gâter un peu.  Mais non, a-t-elle dit. L’argent est tout placé dans un compte pour aider à payer les médicaments très dispendieux. » Le fait, dit-elle, que bien des gens se rangent derrière Karine ne relève pas du hasard. « Karine est un exemple de courage et de détermination. Elle n’a jamais baissé les bras. »