De Victo jusqu’aux hautes sphères de la radio

De Victoriaville à Gatineau, et maintenant à Montréal dans les ligues majeures, il en a parcouru du chemin en une trentaine d’années, Patrice Croteau, ce petit gars du quartier Sainte-Famille qui, pourtant, ne rêvait pas, comme certains, à une telle carrière. Rencontre avec un gars de radio qui a atteint le sommet dans son domaine.

Peu habitué à parler de lui, Patrice Croteau a tout de même accepté l’invitation de La Nouvelle Union. D’abord ses débuts, pour un remplacement de Noël, en décembre 1985 à la station CKTL de Plessisville (aujourd’hui KYQ FM), après avoir tâté un peu de radio étudiante à la polyvalente en cinquième secondaire. Une expérience qu’il a appréciée. «Mais je voulais devenir caméraman à la télé», lance-t-il, d’où sa demande d’admission en arts et technologies des médias au Cégep de Jonquière, demande qui, en raison du contingentement dans le programme, lui sera refusée.

Il entrera donc au Cégep de Victo et, en décembre, cette année-là, il effectuera ses débuts professionnels à la radio plessisvilloise. De CKTL, le jeune Croteau s’amène, en mai 1986, à CFDA 1380 (maintenant Plaisir 101,9) pour ensuite retourner à Plessisville à l’automne afin d’animer, pendant quelques mois, l’émission du matin.

L’arrivée du hockey junior majeur avec les Tigres de Victoriaville en 1987 permettra au jeune animateur d’explorer une autre facette du métier. «Robert (Daneau), le directeur général, m’a proposé le suivi de l’équipe, tant pour les matchs locaux qu’à l’extérieur. J’ai accepté, dit-il, même si je n’avais pas fait de journalisme.» Même qu’en fin de saison, il assistera le regretté Gilbert Foucault dans la description des matchs.

À cette époque, avec le hockey et les remplacements en ondes, Patrice Croteau travaillait sept jours sur sept. «Un beat de fou», décrit-il. Mais il a ainsi beaucoup appris. «Je n’ai pas suivi de cours, à l’exception d’une session à Québec au Collège des annonceurs radio-télé. J’ai appris sur le tas. Dans le temps, c’était possible», note-t-il.

La suite

L’arrivée en juillet 1989 d’une nouvelle radio, CFJO FM (aujourd’hui O 97,3), permettra à Patrice Croteau d’y travailler, d’abord à temps partiel, puis comme animateur du matin, un an plus tard. L’aventure CFJO durera 10 ans, jusqu’en 1999, moment où Patrice Croteau, à la suite du départ à la retraite de Robert Daneau, se voit proposer la direction de la programmation de CFDA qui allait délaisser la bande AM pour passer en mode FM.

Un beau défi s’offrait à lui. «Il fallait repenser le son de la station qui passait d’une radio AM parlée à une station musicale. Le but était de faire concurrence à la station sherbrookoise Rock Détente (devenue Rouge)», rappelle-t-il. Un beau hasard de la vie l’amènera sous d’autres cieux en 2003. «Je revenais de vacances, j’entreprenais la mise à jour de mon CV, car je me pensais mûr pour faire autre chose, raconte-t-il. Mais, sans rien avoir envoyé, j’ai reçu un coup de fil d’une boîte de chasseur de talents. On recherchait un directeur des programmes pour la station Rock Détente de Gatineau.»

À voir la description de tâches, il avoue bien candidement qu’il n’aurait pas postulé à un tel poste. «Je n’aurais jamais pensé que ça puisse m’arriver», mentionne celui qui a donc pris la route de Gatineau, là où il ne connaissait rien ni personne.

L’inconnu et l’importance du poste peuvent, avec raison, susciter certaines craintes. «Finalement, on se rend compte que les compétences acquises au fil des ans, dans un plus petit milieu où on fait tout en se débrouillant avec nos propres moyens, nous ont bien préparés», souligne-t-il.

À Gatineau, Patrice Croteau se verra rapidement confier la direction des programmes d’une deuxième station, Énergie. «J’ai été le premier au Québec à avoir la responsabilité de deux stations. Aujourd’hui, c’est la norme, sauf à Montréal», explique Patrice dont l’expertise a aussi servi à des stations anglophones d’Ottawa. «Je me suis également occupé, pendant un an et demi, de la programmation d’une radio country à Pembroke.»

Par ailleurs, au cours des trois ou quatre dernières années de sa vie passée en Outaouais, Patrice Croteau avait un lien avec les dirigeants montréalais, agissant comme un agent de liaison entre les régions et Montréal. «Je leur avais manifesté (aux dirigeants) mon intérêt à Montréal si un poste devenait disponible, mais sans mettre de pression puisque j’étais tout de même bien établi à Gatineau», exprime-t-il.

Les portes s’ouvrent

Avril 2017, Patrice Croteau se voit confier un remplacement qui devait durer quelques mois à Montréal. Mais à l’été, on lui confie le poste de directeur du contenu de la station Rouge. «Montréal, c’est une autre «game», un autre défi. Tout est plus gros, et Montréal, c’est le «coaching» des vedettes», signale-t-il.

Un brin impressionnant, au départ, admet-il. «Oui, c’est un peu intimidant parce que les gens que tu rencontres et que tu embauches, ce sont des visages que tu vois tous les jours à la télé. Mais finalement, ce sont des humains avant tout. Et les artistes, poursuit-il, ce sont des gens insécures. Toutefois, en leur parlant, en leur expliquant où on s’en va et comment on veut le faire, tout le monde comprend.»

La tempête Salvail

L’automne n’a pas été de tout repos, toutefois, pour Patrice Croteau et son équipe confrontés à l’actualité avec l’affaire Éric Salvail. Difficile à vivre pareille tourmente? «Oui, c’est difficile avec toute cette exposition médiatique. Mais, en vieillissant, avec l’expérience et la maturité, on apprend à ne pas paniquer. Et il faut voir les choses, non comme une défaite, mais comme une opportunité, fait-il valoir. On doit se retrousser les manches et réfléchir à la façon d’orchestrer la suite.»

Jusqu’ici, Patrice Croteau se dit satisfait du travail accompli en sol montréalais. «Nous reconstruisons une antenne, avec de nouveaux alignements. Et nous sommes contents du déroulement des choses. Chaque mois, nos parts de marché grimpent.» Fier aussi de son parcours radiophonique entamé il y a 32 ans maintenant. «C’est spécial la première fois que tu entres dans ton bureau coin Papineau et René-Lévesque parce que, dans ce milieu, tu rêves de te retrouver à Montréal. Je pense que mon cheminement a été normal. L’important, c’est de ne pas sauter d’étapes», précise-t-il.

Un bourreau de travail, M. Croteau? «Bah, quand tu aimes ce que tu fais… Mais c’est important aussi de montrer aux membres de l’équipe que je rame aussi fort qu’eux, souligne-t-il. On est tous dans le même bateau.»

Malgré des journées bien remplies, de 5 h 30 jusqu’à 18 h 30 parfois, des journées ponctuées d’écoute, de rencontres, de réunions, Patrice Croteau maintient le cap. «Je me suis toujours dit que le jour où ça ne me tentera pas de rentrer au boulot, ce sera le temps de faire autre chose.»

Mais ce jour n’est pas arrivé. Patrice Croteau demeure passionné. «C’est un environnement stimulant, éclaté, tout est créatif. C’est ce que j’aime, tout est possible, tu élabores un concept et tu as des gens éclatés où tout peut arriver», conclut-il.