Céline Plourde : faire évoluer la pharmacie, un patient à la fois

Ce qui a mené Céline Plourde à dédier sa vie au milieu de la pharmacie a été tout d’abord son amour pour la chimie, mais surtout son désir de créer des liens avec les patients. La pharmacie communautaire a été pour elle une révélation. 

Ce sont près de 50 ans de sa vie qu’elle a passés à faire évoluer le monde de la pharmacie et à faire rayonner à l’international une pratique novatrice centrée sur le patient. « Je n’ai jamais eu de plan de carrière. Tout est arrivé comme ça. » Mme Plourde a été pharmacienne propriétaire à Saint-Léonard-d’Aston pendant près de quatre décennies. « J’ai toujours travaillé pour le patient, à essayer de trouver quelque chose de différent qui ferait qu’il adhèrerait mieux à son traitement et qu’il comprendrait mieux ce qui lui arrive. C’est un rôle de soutien, un rôle d’enseignement, un rôle de prévention. Ça demande d’être à l’écoute et ça demande beaucoup d’empathie », révèle-t-elle.

Fervente défenderesse de l’interdisciplinarité, elle est notamment l’instigatrice du programme Plourde-Despins à la Faculté de médecine et des sciences de la santé (FMSS) de l’Université de Sherbrooke, programme créé en 1984. Ce dernier permet aux médecins résidents en médecine familiale ou d’urgence de faire un stage en pharmacie communautaire dans les douze unités extérieures d’enseignement clinique de la FMSS de l’Université de Sherbrooke, réparties au Québec et au Nouveau-Brunswick, dont Saint-Léonard-d’Aston.

« J’ai trouvé un pharmacien dans chacune des unités extérieures d’enseignement pour faire ce que je faisais à Saint-Léonard-d’Aston. Ça a pris un bel envol, sincèrement, et je ne m’attendais vraiment pas à ça », dit-elle.

D’ailleurs, en 2017, elle reçoit un appel qui la prend par surprise, car elle n’avait pas posé sa candidature : elle a été nommée membre honoraire du Collège des médecins de famille du Canada afin de souligner ce qu’elle avait fait pour réunir les professions et pour faire avancer la médecine par des actions. Elle est la toute première personne de sa profession à recevoir ce titre au Canada. « Ce n’est pas rien, avoue-t-elle. C’est pour ça que ce programme est si cher pour moi, et aussi parce que les pharmaciens et les médecins travaillent quotidiennement ensemble. Le pharmacien est loin d’être seulement un compteur de pilules, comme on l’a défini pendant longtemps. Je suis partie de la simple distribution où on ne rappelait jamais un médecin, à aujourd’hui où le pharmacien prescrit des choses. On a évolué de façon extraordinaire. »

Céline Plourde a également représenté pendant trois ans le milieu de la pharmacie lors de l’implantation des Groupes de médecine de famille (GMF). D’ailleurs, au moment de leur déploiement, c’est Saint-Léonard-d’Aston qui a accueilli le premier GMF en milieu rural. Si au tout début le nombre de disciplines représentées était limité, Mme Plourde a eu le bonheur de voir les tout premiers pharmaciens en GMF 15 ans plus tard.

« C’est une grande satisfaction que d’avoir prôné une idée, d’avoir cru en quelque chose, et même d’avoir été un peu visionnaire, dit-elle, sans prétention. Quand tu penses au patient, et non à toi, tu en trouves, des solutions. »

Un rôle d’enseignement et de prévention

Passionnée par sa profession et désireuse d’améliorer les façons de faire, Céline Plourde a créé, en 1987, deux personnages pour un programme de prévention des intoxications non intentionnelles chez les enfants de la maternelle. Les deux marionnettes, Bertille et Nello, en sont aujourd’hui à leur troisième version. « Je ne donne plus de spectacles de marionnettes moi-même, mais j’en ai donné dans les années fastes, pour la première version. Je faisais ça avec mon étalagiste à la pharmacie qui était un brillant comédien », se souvient-elle.

L’objectif était de sensibiliser l’enfant à l’importance de reconnaitre les pictogrammes de danger : poison, corrosif, inflammable, etc. Pour la deuxième version du projet, l’investissement de gens du milieu pharmaceutique a permis plus de 200 représentations à la grandeur de la province par des marionnettistes professionnels.

C’est pour ce programme que Céline Plourde a reçu le prix Louis-Hébert, le plus prestigieux prix de l’Ordre des pharmaciens du Québec. « C’est un peu une reconnaissance de fin de carrière, alors que moi, je l’ai reçu au tout début. Je suis parmi les plus jeunes à l’avoir reçu, souligne la pharmacienne. Je suis très fière de ce que j’ai fait. »

En 2017, elle obtient également le titre de Fellow de l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ).

Le saviez-vous?

En 1989, Céline Plourde cesse la vente des produits du tabac dans sa pharmacie, avant même que cela ne devienne un règlement de l’Ordre des pharmaciens. « J’arrivais devant le comptoir de tabac et je trouvais ça honteux. J’étais mal à l’aise », révèle-t-elle. Elle est donc allée à l’encontre de sa bannière et, du jour au lendemain, le tabac est disparu de ses tablettes. « Je ne voulais pas être associée au tabac, parce que c’était contraire à ce que je donnais comme conseils. » Elle a remplacé ce service par celui de la photo et son chiffre d’affaires n’a jamais baissé. Elle s’est également battue pour que la malbouffe ne soit pas affichée dans les circulaires de sa bannière.

Par Stéphanie Paradis