Aliments locaux dans les institutions : une stratégie appelée à faire des petits

Après trois ans de travail, le Centre d’innovation en agriculture (CISA) du Cégep de Victoriaville a accouché de la Stratégie territoriale concertée pour l’approvisionnement institutionnel en aliments locaux dans la MRC d’Arthabaska.

Ce plan de match a été lancé en fin de journée, jeudi, à la Zone Grise du centre-ville de Victoriaville en présence de différents partenaires et collaborateurs de la démarche.

La stratégie comporte 10 grandes orientations qui s’accompagnent de 45 actions à court, moyen et long terme. Onze (11) actions ont déjà été réalisées, 21 actions sont en cours de réalisation et d’autres sont à venir.

« Le plan d’action n’est pas une coquille vide, il est profondément vivant et en marche, a souligné Aude Fournier, enseignante-chercheuse au CISA. Ce sont des actions qui vous parlent, des actions en lien avec ce qui vous touche réellement. C’était important pour nous de partir des vrais enjeux. Nous avons voulu nous coller aux enjeux qui vous préoccupent. »

Parmi les actions retenues figure l’identification de l’origine des produits alimentaires que ce soit dans les catalogues des distributeurs locaux, dans un répertoire spécialisé ou encore dans les plateformes de commande et factures des distributeurs.

La sensibilisation continue des acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire des institutions fait aussi partie des actions pour favoriser l’achat d’aliments locaux.

« Les traiteurs  des écoles primaires ont exprimé le fait qu’ils se sentaient isolés et non informés. On les réunit donc pour les sensibiliser à l’importance d’introduire des produits locaux et les informer des stratégies pour le faire », a confié Aude Fournier, précisant qu’une telle rencontre se tient d’ailleurs demain (vendredi).

Le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec (CIUSSS MCQ), qui représente à lui seul 35 établissements offrant des services alimentaires, organise des journées dégustation pour faire découvrir les produits des producteurs et transformateurs locaux. Une première rencontre du genre a été tenue en novembre et a réuni une dizaine d’entreprises locales.

La nutritionniste Jessica Vigneault, conseillère-cadre alimentation et buanderie par intérim au CIUSSS MCQ, a fait savoir que cette stratégie sera au cœur des prochaines orientations. « Actuellement, les produits du Québec représentent 57% de nos achats, a-t-elle souligné. On prend l’engagement d’augmenter ce pourcentage de 2% pour la prochaine année. Il y a encore beaucoup de chemin à faire, mais nous sommes bien engagés dans le processus. »

La Ferme des Possibles de Saint-Valère enregistre des résultats bien concrets avec la stratégie. « Grâce à des liens qui se sont faits, nous sommes rendus à fournir en légumes six institutions par semaine à Victoriaville, des services de garde, ce qu’on ne faisait pas auparavant », a fait savoir la copropriétaire Ève Lambert.

Résultat concret aussi pour le Centre de la petite enfance (CPE) Hoplavie. « Notre approvisionnement a changé. L’apport en aliments locaux a augmenté, étant rendu à 30% », a signalé Cynthia Allaire.

La démarche

Quatre intervenantes du CISA, Christine Gingras, Aude Fournier, Christine Vigneault-Gingras et Véronique Allard ont piloté la Stratégie territoriale concertée pour l’approvisionnement institutionnel en aliments locaux dans la MRC d’Arthabaska qui s’inscrit dans le projet Plus d’ici dans nos cafétérias lancé en 2021.

La tenue de deux sommets, ayant mobilisé différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement et des organismes comme l’Institut du tourisme et d’hôtellerie du Québec et la Table intersectorielle régionale en saines habitudes de vie du territoire, a alimenté les intervenantes dans le développement de la stratégie.

Puisque plusieurs institutions, désireuses d’accorder une plus grande place aux produits québécois, régionaux et locaux, font face à différents défis et enjeux pour y parvenir, cette stratégie représente un levier de plus pour lever les freins à l’approvisionnement.

Dans la MRC d’Arthabaska, une douzaine d’institutions publiques et privées, à ce jour, ont accepté d’emboîter le pas dans cette démarche, dont le Cégep, le CIUSSS MCQ, des écoles secondaires et services de garde.

L’impact de ce mouvement, estime-t-on, pourrait atteindre 72 établissements et faire des petits ailleurs. « Il y a de grandes chances que notre stratégie se déploie ailleurs. Déjà des rencontres ont eu lieu avec d’autres MRC et d’autres régions qui s’intéressent à la démarche », a précisé Christine Gingras, chercheuse et chargée de projets au CISA.

Maintenant la stratégie lancée, le travail prend fin le 31 mars pour le CISA soucieux cependant que la stratégie soit soutenue et portée par le milieu. Ce qui sera fait. Elle sera intégrée à la démarche territoriale de système alimentaire durable Arthabaska en démarche nourricière (ADN).

« Je souhaite et je pense que ça peut faire école parce le travail a été bien fait. Une telle planification se doit d’être portée, d’être transportée, poursuivie, des actions sont déjà en cours, c’est facilitant. C’est notre souhait de poursuivre et de le faire de façon cohérente. Félicitations aux acteurs qui sont sortis de leur zone de confort, qui sont allés plus loin. C’est avec de petits pas qu’on change les choses », a exprimé Dominic Poulin, directeur du secteur agroalimentaire  à la Corporation de développement économique de Victoriaville et sa région (CDEVR).

La stratégie saluée

Fier des résultats de ce projet ambitieux, le directeur général du Cégep, Denis Deschamps, a notamment souligné le travail des intervenantes du CISA. « Vous pouvez être extrêmement fières de tout le travail accompli et de tout ce que ça va laisser comme trace dans la région dans les prochaines années. Ce sera un modèle pour tout le Québec qui pourrait faire tache d’huile et générer des retombées un peu partout dans d’autres territoires du Québec », a-t-il soutenu.

Présent au lancement, le député d’Arthabaska et whip en chef du gouvernement, Eric Lefebvre a lui aussi salué le travail accompli qui a mené à cette « stratégie qui guidera les actions des différents intervenants du territoire pour continuer à favoriser l’apport des aliments québécois dans les institutions de la région ».

L’élu se dit convaincu des retombées « plus que positives » pour les institutions locales et régionales qui se sont engagées et qui s’engageront dans la démarche.

« La mission de favoriser une offre alimentaire de qualité et appuyée par le développement d’un secteur bioalimentaire prospère et durable contribuera à la vitalité des territoires et à la santé de la population. Et je suis persuadé également que ce sera un modèle pour les autres régions du Québec. C’est tout à votre honneur », a conclu Eric Lefebvre.