20 ans de mentorat à la CDEVR

La cellule de mentorat, pilotée par la Corporation de développement économique de Victoriaville et sa région (CDEVR), célèbre cette année ses 20 ans d’existence. Au cours des deux dernières décennies, pas moins de 276 mentorés, de différents secteurs d’activités, ont bénéficié de l’accompagnement de mentors.

« Nous couvrons les différents secteurs d’activités, les secteurs commercial, industriel, agroalimentaire et les services. Au total, 46 personnes ont joué le rôle de mentor depuis les débuts. Certains le font depuis une dizaine d’années consécutives », souligne Sara Côté, conseillère aux entreprises à la CDEVR et responsable de la cellule de mentorat.

Stéphanie Allard, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie des Bois-Francs et de L’Érable (CCIBFE), fait partie des personnes qui ont eu recours à un mentor. C’était en février 2015 à l’époque où elle dirigeait son entreprise WN Événement.

Une démarche qu’elle qualifie de nécessaire. « Oui, cela est nécessaire, peu importe le niveau d’affaires où tu es rendu. Le mentorat permet de ne pas être toute seule dans notre histoire. Ce n’est pas nécessairement avec ton équipe de travail que tu as envie de ventiler ni avec les proches. On ne veut pas ramener tout ce qui est négatif à la maison », explique-t-elle.

Le mentorat procure différents avantages, indique la DG de la CCIBFE. « Cela permet de ventiler, d’avoir aussi un regard différent sur la situation, expose-t-elle. Le mentor ne prend pas la décision pour toi. Il nous amène les pistes de réflexion pour que l’on prenne la meilleure possible. »

Le processus lui a aussi permis, dit-elle, de mieux se découvrir en tant que leader, d’identifier ses forces et ses faiblesses et de voir comment les utiliser dans l’entreprise avec son équipe.

Stéphanie Allard a eu comme mentor Johanne Allison issue du domaine de l’automobile dans lequel elle a évolué pendant une quinzaine d’années, mais qui s’adonne maintenant au coaching depuis 14 ans.

Elle cumule, à ce jour, en un peu plus de neuf ans de mentorat, une douzaine de dyades, nom donné au jumelage entre un mentor et un mentoré.

Un bon mentor, fait-elle valoir, doit avoir, de prime abord, une connaissance entrepreneuriale. « C’est un must, mais il faut aussi avoir le goût de redonner et d’accompagner parce qu’il s’agit d’un accompagnement basé sur le savoir-être, exprime-t-elle. Le mentor, qui a expérimenté certaines choses, a pour but d’aider le mentoré à se développer, à améliorer ses compétences entrepreneuriales. On fait cela avec une écoute attentive, sans jugement et on les incite aussi à utiliser l’ensemble de leur coffre à outils ».

Un mentor, ajoute-t-elle, sait poser de bonnes questions qui permettent au mentoré d’avoir une meilleure vue sur ses options et de faire ses propres choix. « On aime aussi les inviter à aller dans les estrades pour mieux voir le jeu. Souvent ils se trouvent sur le jeu et ils jouent à toutes les positions. Il est alors difficile de voir.

Alors en prenant un recul, ça les aide à mieux voir les opportunités et à saisir ce qui vient avec », signale-t-elle.

Quand elle a fait appel au mentorat, Stéphanie Allard carburait au travail, à l’œuvre sept jours par semaine. « Je suis une passionnée, confie-t-elle, et dans ma tête, tout le monde était au même point. Mais ce n’est pas le cas. »

Le mentorat a suscité chez elle une prise de conscience. « Johanne intervenait notamment en posant des questions ou en donnant des exemples. Et par les exemples qu’elle donne, on comprend qu’on n’est pas obligés d’être tous pareils.

On réalise que chaque personne a sa couleur, sa vitesse et qu’il faut se tempérer », note-t-elle.

Le fonctionnement

Avec 17 mentors actuellement, dont six femmes, la cellule de mentorat de la CDEVR peut être considérée, affirme Sara Côté, comme une cellule importante. Et pas moins de 31 dyades sont en cours actuellement.

Les mentors ne reçoivent aucune forme de rémunération, pas même un montant pour le kilométrage. Ce sont des bénévoles à 100%. « Les mentors ont à cœur le développement des entreprises et tiennent à ce qu’elles demeurent dans la région », indique Johanne Allison.

Du côté des mentorés, l’une des raisons évoquées pour leur participation à la démarche, c’est qu’ils souhaitent briser l’isolement. « C’est ce que j’entends souvent, dit Sara. Ils se sentent seuls, éprouvent le besoin de parler le même langage que quelqu’un d’autre. »

Le jumelage d’un mentoré se fait avec un mentor qui n’a aucune connaissance ou expérience dans son domaine. « Ils ont le nez collé sur l’arbre et le mentor les aide à avoir une vision de la forêt, à prévoir les obstacles, à avoir un coup d’avance. C’est vraiment une autre paire de lunettes. »

« On leur permet d’interroger leurs choix, de se remettre en question, renchérit Johanne Allison. Cela les sort de leur zone de confort. Ils possèdent, en fait, toutes les réponses. On ne leur apprend absolument rien. Ils ont tout en stock, C’est juste qu’ils ne le voient pas. Et de l’exprimer à voix haute, ça leur permet parfois d’en prendre conscience. »

Des cellules de mentorat, il en existe partout au Québec. Et il n’y a pas d’âge pour faire appel au mentorat. « Parfois l’entreprise peut avoir une dizaine d’années d’existence et frappe un mur, exemplifie Sara Côté. La pandémie, par exemple, a suscité de l’incertitude chez les entrepreneurs qui ont fait appel à nous, même s’ils étaient en affaires depuis une dizaine d’années. »

Le mentorat s’adresse à tous, même si ce sont davantage de plus petites entreprises qui y ont recours. « On voit davantage des PME, des microentreprises, des travailleurs autonomes, mais ça pourrait être aussi une directrice ou un coordonnateur d’un organisme », précise la responsable de la cellule.

La durée du mentorat, de la dyade, peut varier d’un cas à l’autre. On observe souvent des consultations s’échelonnant sur une période de 12 à 36 mois. « Mais pour certains, ça dure depuis plusieurs années. On met fin habituellement lorsque les gens ont atteint leurs objectifs », fait remarquer Sara Côté.

Un mentoré, avant d’obtenir le soutien d’un mentor, doit cependant avoir déjà une certaine expérience de vie. « Il faut habituellement qu’il ait passé une première année, qu’il ait expérimenté des hauts et des bas et qu’il ait appris un peu à se connaître, explique la responsable. Et il n’y a pas de sujets tabous. Nos mentors entendent toutes sortes de confidences. Tout peut se dire, tout est strictement confidentiel. »

Le mentorat porte fruit

La démarche étant confidentielle, seul le mentoré peut lever le voile, s’il le désire, sur le processus. « Mais parmi nos participants, certains n’hésitent pas à dire que le mentorat a changé leur vie et que cela leur  a permis de garder le cap ou encore de conclure une vente ou une transition plus fluide et agréable », précise Sara Côté.

« Le mentorat, c’est d’investir du temps pour une bonne santé entrepreneuriale », ajoute Johanne Allison.

« Le mentorat , poursuit Sara, c’est pour progresser, pour devenir la meilleure version d’entrepreneur de soi-même. »

Les mentors aussi en retirent des bénéfices. « Ils sont devenus de meilleurs entrepreneurs, de meilleures personnes à force de rencontrer d’autres êtres humains », fait-elle valoir.

On constate aussi que d’anciens mentorés sont devenus mentors. « Ayant été aidés, ils ont le goût de redonner au suivant parce que cela a fait une différence dans leur vie. Ça allait de soi », souligne Sara Côté.

Le recrutement de mentors, s’il a déjà connu un certain essoufflement, se passe bien ces temps-ci. « On est victime de notre succès. Nos meilleurs ambassadeurs, ce sont nos mentors eux-mêmes », mentionne la responsable.

Une célébration

La CDEVR et la CCIBFE s’unissent pour souligner les 20 ans de mentorat lors d’un événement 5 à 7 le 5 septembre au Pavillon Arthabaska. La rencontre réunira les mentors actuels, des anciens, des mentorés actuels et anciens. « Nous voulons mettre en lumière les anciens qui ont contribué à cette cellule, mais aussi les nouveaux, pour démontrer aussi l’importance de mentors, de modèles pour pouvoir avancer », fait savoir Sara Côté.

Le directeur général de la CDEVR, Frédérik Boisvert animera la rencontre marquée par des témoignages sur scène et par le truchement de vidéos.

Des élus y seront également, dont le maire de Victoriaville et président de la CDEVR, Antoine Tardif.