Les sculptures de Lisette Lemieux pour découvrir son univers

Jusqu’au 10 décembre, le Centre d’art Jacques-et-Michel-Auger du Carré 150 de Victoriaville accueille l’exposition intitulée « Tramer le monde », de l’artiste originaire d’Arthabaska Lisette Lemieux.

Rencontrée le soir du vernissage, Mme Lemieux a fait une tournée de cette exposition qui propose trois œuvres inédites. Elle a expliqué qu’elle avait habité Arthabaska (aujourd’hui Victoriaville) jusqu’à l’âge de 16 ans. Élevée sur une ferme, ses origines, où la débrouillardise était de rigueur, auront tracé sa voie artistique. « C’était comme une école de l’inventivité », souligne-t-elle. Aînée d’une famille de 10 enfants, elle mettait à profit sa fibre artistique pour les gâteaux de fête ou la décoration des fêtes de Noël. « Tout cela a été favorable au développement de mon imaginaire », ajoute-t-elle.

Lisette Lemieux a poursuivi dans le domaine artistique, parallèlement avec l’enseignement, l’un nourrissant l’autre comme elle l’explique. D’ailleurs, pendant 36 ans, elle a enseigné les arts, la sculpture en particulier, à l’UQAM.

Pour l’exposition en cours, les œuvres choisies démontrent bien son amour pour la lumière, mais également pour l’utilisation d’objets usuels, à d’autres vocations. Par exemple, des épingles de sûreté, des allumettes, des épingles droites ou encore des gobelets de carton ont trouvé une autre vie dans son travail sculptural. 

On retrouve aussi dans son travail les mouvements répétitifs inspirés de ceux des tâches ancestrales des femmes, le tout intégré dans des œuvres contemporaines qui font réfléchir à l’état actuel de la situation. Ses œuvres présentent également des paradoxes intégrant souvent des points de vue différents.  

Elle utilise l’espace judicieusement, la lumière, la transparence et le reflet. Le visiteur prenant même part à certaines sculptures. Les mots sont également importants dans son travail comme le démontrent deux œuvres présentées. Elle n’hésite pas non plus à confronter le visiteur et lui rappeler que plus rien n’est privé en ces années où les codes QR font partie du quotidien. 

Malgré un propos parfois sombre, les œuvres dégagent beaucoup de luminosité. « On ne peut ignorer ce qui va arriver. Je travaille avec des objets usuels, mais ne suis pas fixée dans la contemplation de l’objet », note-t-elle.

La pièce de résistance, intitulée « J’en perds mon latin », impressionne alors qu’elle démontre l’intérêt de l’artiste pour la langue, française en particulier. « Comme j’habite Montréal, je suis inquiétée par le glissement vers l’anglais », confie-t-elle. Le souci de la langue demeure pour elle avec l’œuvre, elle rappelle les origines latines du français. La sculpture rappelle des expressions latines, toujours fréquemment utilisées. Un grillage d’acier, sur lequel la locution a été tracée, a ensuite été découpé. On retrouve encore le long travail répétitif, méditatif à la limite, mais qui donne un résultat imposant et impressionnant.

Figure marquante de la sculpture au Québec, Lisette Lemieux profite de cette exposition pour faire un retour à ses sources. « Je me suis dit que c’est peut-être une boucle à fermer. On a des ancrages quelque part. Les miens sont dans la région, dans la montagne, dans les couchers de soleil », termine-t-elle. Ces images prégnantes font partie d’elle, de son identité.