Bureau des enquêtes indépendantes : la Ligue des droits et libertés critique son bilan

En prévision du dépôt d’un projet de loi sur le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) annoncé par la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, la Ligue des droits et libertés (LDL) rend public un bilan alternatif et critique des trois premières années d’activité du BEI.

«Le BEI n’est ni véritablement indépendant du milieu policier, ni transparent, ni impartial. C’est la conclusion à laquelle nous arrivons dans le bilan… Regards critiques sur les trois premières années d’activité du Bureau des enquêtes indépendantes… Mme Guilbault doit impérativement en tenir compte dans son projet de loi», déclare Eve-Marie Lacasse, porte-parole de la LDL.

Selon le bilan présenté par l’organisme de défense des droits, l’indépendance du BEI est compromise pour les raisons suivantes :

  • le BEI dépend du corps de police impliqué pour le déclenchement d’une enquête indépendante;
  • les enquêteurs du BEI sont en majorité issus du milieu policier;
  • le BEI dépend des services de soutien de la SQ, du SPVM et du SPVQ dans presque toutes ses enquêtes indépendantes;
  • des représentants du milieu policier sont impliqués dans le processus de nomination de la direction du BEI;
  • la SQ est impliquée dans le processus de nomination des enquêteurs du BEI;
  • la seule source d’information des communiqués qui annoncent le déclenchement d’une enquête indépendante provient du corps de police impliqué dans la blessure ou la mort d’une personne lors de l’intervention policière.

«En fin de compte, c’est la police qui continue d’enquêter sur la police! Le projet de loi de la ministre Guilbault doit mettre fin à cet apparent conflit d’intérêts, qui a le potentiel de miner grandement la confiance des citoyen-ne-s envers le BEI. De plus, parler d’enquêtes indépendantes est un leurre dans le contexte où presque 100% des services de soutien requis par le BEI sont fournis par des corps de police. La ministre Guilbault doit saisir l’occasion de donner une indépendance digne de ce nom au BEI en le dotant de ses propres ressources spécialisées», ajoute Eve-Marie Lacasse.

De son côté, Lynda Khelil, elle aussi de la LDL, rappelle que depuis le début des activités du BEI en 2016, sa direction vante la transparence de son organisme dès qu’elle en a l’occasion. «Quand on compare le niveau d’informations que le BEI rend public et celles qu’il garde pour lui, on se rend compte rapidement que l’opacité est encore et toujours le mot d’ordre quand il est question des enquêtes sur la police. Les informations transmises au public lorsque le Directeur des poursuites criminelles et pénales décide de ne pas porter d’accusation sont fragmentaires. Elles ne permettent pas de comprendre le déroulement de l’événement ni de juger de la rigueur et de l’impartialité de l’enquête», soutient-elle en dénonçant le refus du BEI de rendre public le contenu de ses rapports d’enquête lorsqu’aucune accusation n’est portée contre le ou les policiers impliqués.

«Pourtant, en Ontario, en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba, des organismes similaires au BEI rendent publics des résumés exhaustifs et anonymisés de leurs rapports d’enquête. Le Québec n’a aucune excuse pour ne pas faire la même chose!», revendique-t-elle.

À propos du Bureau des enquêtes indépendantes

En vertu de la Loi sur la police, le Bureau des enquêtes indépendantes a pour mission de mener des enquêtes sur l’ensemble du territoire québécois.

Ainsi, le BEI enquête lorsqu’une personne, autre qu’un policier en service, décède, subit une blessure grave ou est blessée par une arme à feu utilisée par un policier, lors d’une intervention policière ou lors de sa détention par un corps de police.

Également, il enquête toute allégation relative à une infraction à caractère sexuel commise par un policier en service et traite les allégations de nature criminelle visant des policiers dans tous les cas où la victime, le plaignant ou la plaignante, est membre des Premières nations ou de la nation inuite.

Il peut, de plus, être chargé par le ministre de la Sécurité publique d’enquêter toute allégation relative à une infraction criminelle commise par un policier ou un constable spécial et, dans des cas exceptionnels, être chargé d’enquêter sur tout autre événement impliquant un agent de la paix et ayant un lien avec ses fonctions.

À propos de la Ligue des droits et libertés

Fondée en 1963, la Ligue des droits et libertés est un organisme sans but lucratif, indépendant et non partisan, qui vise à faire connaître, à défendre et à promouvoir l’universalité, l’indivisibilité et l’interdépendance des droits reconnus dans la Charte internationale des droits de l’Homme.

Icimédias