Une artisane au grand coeur

Lucie Verville Belzile a investi la salle à manger de la maison qu’elle habite avec son fils à Victoriaville. C’est là qu’elle fabrique sans relâche, depuis le mois de mars, des masques qu’elle donne à qui en a besoin.

Du haut de ses 90 ans, Lucie n’est pas du genre à demeurer inactive. Ainsi, quand la pandémie de la COVID-19 s’est pointé le bout du nez en mars, elle s’est mise dans la tête de fabriquer des masques. À ce jour, celle qui est originaire d’Arthabaska en compte 926 confectionnés (elle conserve des statistiques) et 854 donnés. «Une seule fois, un monsieur a laissé 20 $ sur la table et je l’ai remis à la Sécurité alimentaire», explique-t-elle. Selon elle, un masque reçu en cadeau a davantage de valeur qu’un autre acheté. «Au début, quand je voyais des gens qui n’avaient pas de masque (avant qu’ils ne soient obligatoires), je leur en offrais un à condition qu’ils s’engagent à le porter», a-t-elle indiqué. Déjà, à ce moment, Lucie se doutait bien qu’on en aurait pour un bout de temps à devoir porter le couvre-visage.

Pour elle, il était aussi important, et ça l’est encore aujourd’hui, de faire sa part dans cette pandémie et c’est la façon qu’elle a trouvée de se rendre utile.

Quand elle a commencé, en mars, elle était confinée dans ses quartiers, dans la même maison que son fils. Plus question de faire du bénévolat au Carrefour d’entraide bénévole, où elle oeuvrait dans le service «Doigts de fées» ou d’aller à l’AFEAS. Même si Lucie aime bien jouer au scrabble ou écouter de la musique, à un moment donné, il lui a fallu trouver de quoi s’occuper et c’est alors qu’elle a pensé aux masques.

Pour commencer, elle s’est lancée dans le projet afin d’en fournir à ses enfants et petits-enfants. Puis, elle a élargi le cercle avec ses frères, sœurs, beaux-frères et belles-sœurs, puis aux amis.

Le 27 mai, elle a envoyé deux exemplaires au premier ministre François Legault et à sa conjointe Isabelle, portant les numéros 108 et 109. Quelques jours plus tard, elle a reçu une lettre du premier ministre la remerciant du travail accompli. Un bel honneur pour elle, si bien qu’elle a l’intention de lui retourner les numéros 999 et 1000 de sa production (au rythme où elle va, c’est pour bientôt). Elle a également envoyé les numéros 110 et 111 au docteur Arruda, dont elle n’a pas eu de réponse. Pour les autres, elle trouve toujours preneur en donnant en moyenne cinq par jour.

Une dépense

Si elle donne ses masques, elle doit trouver du tissu et des élastiques pour les réaliser. Lucie a déjà utilisé des rideaux, nappes ou autres pour ses créations, mais bénéficie aussi de dons de personnes qu’elle connaît. Aussi, elle se rend régulièrement au Support de Victoriaville, où elle achète à bas prix des chemises presque neuves qu’elle transforme avec ses doigts de fée en deux modèles de masque.

Elle met environ 25 minutes pour réaliser chaque couvre-visage artisanal. Mais elle en fait six ou sept à la fois. «C’est le découpage qui me fatigue le plus», confie-t-elle. Mais cela ne l’empêche pas de poursuivre sa besogne et d’investir aussi en tissu, élastiques ou frais postaux pour les envoyer. «Mais je ne bois pas, ne fume pas et ne couraille pas non plus», dit-elle en riant. Sur sa table, on peut même voir des masques aux couleurs de Noël, qu’elle prépare pour la saison festive.

Une vie remplie… d’artisanat

Lucie Verville Belzile est une femme active. Lorsqu’elle se lance dans quelque chose, elle y va à fond, comme en témoignent les nombreux masques confectionnés. Pour ce qui est de l’artisanat, elle en a fait toute sa vie et a même, à une époque, été professeure d’arts plastiques.

Puis, après avoir été dame de compagnie pour les quintuplées Dionne (pendant six mois lorsqu’elle avait 20 ans), Lucie est devenue religieuse. Elle a quitté les ordres en 1964, s’est mariée une année plus tard et a eu deux enfants.

Mais l’artisanat n’a jamais été loin d’elle puisqu’en 1970, elle a animé, pendant quatre ans, une émission de télévision à TV4 intitulée «De tout de tous». «L’émission était tournée à Québec et on faisait toute sorte de bricolages», explique-t-elle. Par la suite, à TV7 Sherbrooke, elle a animé une autre émission pendant deux années où elle enseignait différentes techniques, dont le macramé.

Entre-temps, en plus d’élever ses enfants, elle a trouvé le temps de tenir, à Saint-Ferdinand, une boutique d’artisanat. Une vie bien remplie qu’elle a consignée dans sa biographie, dont elle continue de noircir des pages, notamment avec les masques qu’elle fabrique actuellement.