L’AVAQ confortable avec les conditions du BAPE sur l’amiante

L’Association des victimes de l’amiante du Québec (AVAQ) est impressionnée par la qualité et l’ampleur du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur l’état des lieux et la gestion de l’amiante et des résidus miniers amiantés.

Elle se dit également à l’aise avec les conditions énoncées pour la revalorisation des haldes.

Rappelons que dans le rapport, dévoilé publiquement la semaine dernière, la commission énonçait deux critères incontournables pour les projets de valorisation des haldes de résidus miniers amiantés : que les travaux d’excavation et de manutention des haldes n’entraînent aucun risque supplémentaire pour les travailleurs et la population et que le procédé d’extraction utilisé entraîne la destruction totale des fibres d’amiante, et ce, sans nuire à la qualité de l’air.

«On comprend qu’avant tout développement de projet pour revaloriser les haldes, ça va prendre une analyse de risque rigoureuse pour démontrer qu’il n’y a aucun risque supplémentaire au niveau sanitaire et environnemental, mentionne Norman King, épidémiologiste et conseiller scientifique de l’AVAQ. Ce n’est pas un non catégorique, mais ce n’est pas un oui sans condition. On est à l’aise avec ça.»

Mésothéliome

Dans son rapport de plus de 340 pages, le BAPE demande également une révision du processus d’indemnisation des travailleurs ou de leur succession. L’AVAQ salue principalement le passage qui concerne le mésothéliome, un cancer de l’enveloppe du poumon dont l’amiante constitue le facteur de risque le plus important. La commission mentionne qu’un travailleur atteint de cette maladie et qui a été exposé à l’amiante doit bénéficier d’une présomption irréfragable devant les tribunaux.

«Dans le passé, on a eu des dossiers devant les tribunaux où l’employeur a engagé un expert pour dire que le travailleur n’a pas été assez exposé pour développer la maladie, souligne M. King. Il y a un dossier où le tribunal a malheureusement retenu ces arguments. L’implantation de cette recommandation simplifierait beaucoup les démarches pour les victimes de cette maladie. Imaginez quelqu’un qui est en train de mourir et qui doit se battre devant le tribunal. C’est horrible.»

L’AVAQ salue plusieurs autres points du rapport notamment la reconnaissance qu’il n’existe aucun seuil d’exposition sécuritaire à l’amiante.

Le rapport mentionne que la valeur limite d’exposition des travailleurs devrait être abaissée à 0,1 f/cm3 dans les plus brefs délais pour s’arrimer à la norme fédérale. L’AVAQ va encore plus loin en demandant à ce que ce seuil soit abaissé à 0,01 f/cm3 d’ici cinq ans.

«Si la CNESST ne le fait pas, le gouvernement devrait le faire à sa place», lance M. King.

Selon l’AVAQ, il y a eu 135 décès par maladie professionnelle causés par l’exposition à l’amiante en 2018.

Une lacune

L’AVAQ déplore toutefois que la nécessité de créer un fonds d’indemnisation pour les victimes de maladies causées par une exposition paraprofessionnelle ou environnementale à l’amiante ne soit pas mise de l’avant dans le rapport.

«Si jamais quelqu’un tombe malade des années plus tard ou si la femme qui lavait le linge de son mari dans les années 1970 tombe malade, il n’y a aucun fonds d’indemnisation pour ces gens-là, indique M. King. Si c’est une exposition hors travail, il n’y a rien. Le BAPE est conscient de cet enjeu-là, mais il n’est pas allé assez loin à notre avis pour suggérer la création d’un fonds comme ça existe en France.»

L’AVAQ est finalement bien consciente qu’il ne s’agit que d’un rapport et que le gouvernement n’a aucune obligation de mettre en place les recommandations.

«On espère que le gouvernement sera en mesure de comprendre le sérieux de la situation et la rigueur du rapport pour ne pas tergiverser et le mettre en application le plus rapidement possible», résume Norman King.

La Tribune