Profession : travailleuse de milieu de vie

Chicanes entre voisins, solitude et conflits familiaux font partie du quotidien d’Annie Fréchette, travailleuse de milieu à l’Office municipal d’habitation de Victoriaville-Warwick (OMHVW) depuis 11 ans. Mais il y a aussi l’aide, les activités, les réussites et le maintien à domicile qui apportent beaucoup de lumière au tableau.

L’OMH propose des logements sociaux aux ménages à faible revenu. L’organisation dispose de 327 habitations à loyer modique et offre 128 logements en partie subventionnés chez des propriétaires privés. En outre, elle voue 11 appartements pour des personnes handicapées et 38 pour des aînés en perte d’autonomie physique, leur permettant de vieillir à domicile et d’obtenir des soins. Ces gens reçoivent des services grâce à une alliance avec l’organisme Aide et support aux Aînés.

Les loyers se trouvent disséminés dans différents immeubles à Victoriaville et Warwick. Ainsi, ceux qui profitent des habitations à prix modique (HLM) vivent parfois seuls, mais entourés d’autres locataires. Annie Fréchette va d’une porte à l’autre, répondant aux demandes ou vérifiant certains faits qu’on lui a rapportés. Puisque son salaire provient d’une part du CIUSSS MCQ et, de l’autre, de l’OMHVW, une partie de sa clientèle se compose de tous les résidents aînés de logements sociaux, non privés, des MRC de L’Érable et d’Arthabaska. «On aurait besoin de trois Annie pour répondre aux besoins grandissants, mais on en a juste une. C’est difficile de réussir à avoir un salaire», consent Lynda Houle, ancienne directrice générale de l’organisme, qui a pris sa retraite le 2 mars.

Tâches : le réel

Lorsqu’on demande à Annie Fréchette de nous parler de sa liste de tâches, elle confie travailler avec «le réel». Car, à la base, tous ceux avec qui elle interagit ont en commun leur faible revenu. Certains travaillent au salaire minimum et se débrouillent bien, avec peu. D’autres joignent les deux bouts avec des rentes ou présentent différentes difficultés les rendant inaptes au travail. «Parfois, ils sortent d’une séparation, deviennent monoparentales et affrontent une nouvelle réalité», exemplifie-t-elle. Toutefois, il y en a qui paraissent plus démunis que d’autres parce qu’ils essuient des coups durs, vivent de la solitude ou n’ont pas de famille. Enfin, il y a certes autant de réalités distinctes que de locataires. Ainsi, Mme Fréchette doit lire entre les lignes, parce que lorsqu’un locataire se plaint de bruits du voisin, il y a parfois des raisons sous-jacentes à cet agacement. Mais encore faut-il que les gens acceptent de recevoir sa visite, de lui parler et de considérer ses conseils.

Aucun autre propriétaire n’offre ce service, qui apparaît ici essentiel. Pendant une rencontre, l’occupant peut passer des rires aux larmes, puis finir par raconter ses inquiétudes. Là seulement, la travailleuse de milieu peut présenter les différentes ressources susceptibles d’apporter des solutions à ses problèmes.

Oui, des chicanes entre voisins s’inscrivent dans son quotidien. «Mais il suffit d’aller désamorcer ça. Quand ça ne marche pas, il y a Équijustice et la médiation familiale. Je dirais que c’est pire l’été. Les fenêtres sont ouvertes, la musique est plus forte, les enfants n’ont pas d’école. C’est là que mon rôle se transporte sur le terrain», relève-t-elle. D’où l’idée d’organiser des événements pour les familles, comme une fête de Noël, une journée au mont Gleason et une sortie au lac Georges, à prix raisonnable.

Aînés

«Mon rôle auprès des personnes âgées est de m’assurer qu’ils sont bien dans leur domicile, parce que ce que l’on veut, c’est qu’ils y restent le plus longtemps possible», commence-t-elle. Mme Fréchette s’assure qu’ils reçoivent tous les services dont ils ont besoin, comme ceux de l’entretien ménager ou de la popote. «Parfois, ce n’est pas grand-chose, comme une barre d’appui dans le bain. S’ils sont seuls, on vérifie s’ils ont un réseau autour d’eux, un filet de sécurité, au cas où il arriverait quelque chose», énumère-t-elle.

Les préposés à l’entretien et autres employés de l’OMH constituent, d’une certaine manière, ses yeux sur le terrain. Par exemple, un concierge peut constater qu’une personne âgée n’arrive plus à se déplacer avec sa marchette et rapporter la situation à la travailleuse de milieu, qui rendra visite au locataire. «Moi, je suis employée par l’OMH, mais je travaille pour les locataires. Je suis là pour les aider. Je dois créer des liens de confiance avec eux, car un parent ne doit pas avoir peur que j’appelle la DPJ, par exemple. Il faut qu’il sache que je suis là pour aider avant que d’autres problèmes surviennent.»

Annie expose qu’elle adopte la position de «la gentille» pour pouvoir remplir ses tâches de soutien et parfois de médiatrice. Si une famille a besoin de certains services et refuse de les obtenir, elle admet qu’elle va insister et «forcer la note». Or, en général, les relations avec les locataires s’avèrent bonnes.

Jamais seuls

Selon Lynda Houle, qui a évolué pendant 32 ans dans les rangs de l’OMHVW, il devient rassurant pour les locataires, même s’ils ne requièrent pas ses services, de savoir qu’Annie Fréchette existe. «S’ils viennent ici (dans les bureaux de l’OMH), ils savent que quelqu’un va les écouter», souligne-t-elle. Pour la travailleuse de milieu, le territoire à couvrir apparaît vaste pour les 35 heures par semaine qui y sont allouées.