Vivre avec la précarité d’emploi

Lorsqu’un entraîneur est engagé par une équipe de hockey, il sait qu’inévitablement il perdra son emploi. Par amour pour leur sport, ces véritables passionnés acceptent de prendre le risque de vivre avec un emploi qui ne rime pas avec stabilité.

C’est le cas de l’entraîneur-chef des Tigres de Victoriaville Louis Robitaille. «Lorsque nous sommes engagés, nous savons qu’éventuellement, nous serons congédiés. Il y a plusieurs facteurs qui peuvent mener à ça, que ce soit le travail, les performances de l’équipe ou le fait que c’est simplement le temps de passer à un autre appel. Quand tu coaches, tu ne peux toutefois te permettre de penser à un potentiel congédiement. Dans ma façon que j’approche ça, je contrôle ce que je peux, comme les relations avec les joueurs ou le travail à l’interne. Ultimement, ça devrait bien aller, mais si ce n’est pas le cas, c’est hors de notre contrôle. Nos supérieurs doivent prendre des décisions que tu dois respecter. J’ai déjà vécu une expérience de mise à pied avec Martin Raymond. Sur le coup, tu ne comprends pas, mais ça m’a fait réaliser la réalité du hockey», a-t-il raconté.

Lorsqu’un licenciement se produit, les inévitables questionnements surviennent. Dans un milieu aussi contingenté que celui des entraîneurs, les postes ne sont pas légion, ce qui fait en sorte qu’il est parfois difficile de se replacer au sein d’une nouvelle équipe, d’une autre ligue. «Une fois que tu es congédié, tout te passe par la tête. Tu te demandes où tu vas te retrouver. Dans mon cas, après mon congédiement, je n’ai pas eu peur de plier bagage pour aller à Val-d’Or pour un nouveau poste d’adjoint. Il est important de te faire voir. Je pense par exemple à Michel Therrien (ancien entraîneur-chef du Canadien de Montréal). Il n’a pas eu peur de faire un pas de recul afin de maintenant remplir un poste d’adjoint (avec les Flyers de Philaldephie).»

Des familles trimballées

L’ancien joueur des Capitals de Washington n’a pas peur de le dire, lorsqu’on travaille dans le monde du hockey, c’est souvent les familles qui écopent, surtout lorsque surviennent les fameux congédiements. «Nous ne sommes pas encore au stade de la LNH. Nous ne faisons pas des millions de dollars. Ma conjointe est une coiffeuse. Quand j’étais à Drummondville, elle s’était trouvé un emploi. Quand j’ai dû déménager, la famille a suivi. C’est le côté un petit peu néfaste, parce que nous, égoïstement, nous faisons ce que nous aimons, mais ce sont les gens que nous aimons le plus qui en souffrent de ces décisions un peu plus malheureuses.»

Pour la petite histoire, la famille de Robitaille a dû déménager à trois reprises en quelques mois seulement lorsqu’elle a quitté Drummondville pour  Val-d’Or, là où elle a habité deux résidences avant de se retrouver à Victoriaville.

Passionné d’abord et avant tout

La carrière d’entraîneur de Robitaille a pris son envol à l’issue de sa retraite de hockeyeur professionnel. Il a tout d’abord commencé comme entraîneur et directeur général chez les Braves de Valleyfield au niveau junior AAA avant de faire le saut comme adjoint chez les Voltigeurs de Drummondville pendant près de quatre ans. Congédié par l’organisation drummondvilloise le 14 novembre 2015, il s’est dirigé vers les Foreurs de Val-d’Or où il a été adjoint pour finir la campagne 2015-2016. Quelques mois plus tard, il s’est vu confier le poste d’entraîneur-chef chez les Tigres de Victoriaville, fonction qu’il occupe depuis. «Il y a plusieurs chemins qui vont te mener à un poste dans le junior majeur. Il y a une tendance où l’on voit les anciens joueurs s’impliquer beaucoup plus qu’auparavant. On l’a voit dans la Ligue nationale de hockey (LNH) avec Craig Berube (St-Louis, Bruce Cassidy (Boston) et Rod Brind’Amour (Caroline). Il y a aussi des gars comme Mario Pouliot dans le junior qui a commencé comme recruteur. Plusieurs chemins mènent à Rome, mais il y a une constante et c’est la passion», a lancé l’homme de 36 ans.

Au-delà de la passion, Robitaille est d’avis que ceux qui aspirent à devenir entraîneurs doivent accepter d’aller à l’école du hockey pour apprendre les rudiments du métier. «Quand tu es prêt à faire ça, que tu mets du temps et que tu as des connaissances, il n’y a pas de secret. Personnellement, j’ai eu la chance de côtoyer d’excellents mentors comme Mario Duhamel, Dominic Ricard, Martin Raymond et Mario Durocher. J’ai aussi travaillé avec Hockey Québec et j’ai suivi les séminaires de Hockey Canada.»

Entraîneur comme seul et unique plan

Alors que la plupart des hockeyeurs planifient des plans B advenant la fin prématurée de leur carrière, Robitaille confie ne pas savoir ce qu’il ferait s’il ne se trouvait plus d’emploi dans le monde du hockey. «Il faudrait bien que j’aie un plan B, mais je n’en ai pas pour le moment. Quand j’ai pris ma retraite à 30 ans, je savais que je voulais devenir un entraîneur. J’avais encore des possibilités pour poursuivre ma carrière de hockeyeur, mais avec mon style de jeu, mes commotions et ma situation familiale, j’ai décidé de la prendre. Une chose était certaine, je voulais demeurer dans le monde du hockey, que ce soit comme entraîneur ou recruteur. J’avais une école de hockey et ma passion était d’enseigner à des jeunes, de travailler avec eux, de les épauler afin de réaliser leurs rêves. Je n’ai donc vraiment pas pensé à ce que je ferais si je n’étais pas dans ce milieu. J’espère bien vivre de ce sport toute ma vie, peu importe le rôle. Ma vraie passion, c’est l’enseignement de ce sport. Je fais ça depuis trois ans ici et c’est l’une des plus belles choses qui pouvaient m’arriver. […] Cela dit, à bien y penser, je crois cependant que je me dirigerais dans le milieu de la communication, de préférence dans le sport.»