Procès Therrien : la fille de l’accusé contre-interrogée

Au palais de justice de Victoriaville, l’avocat de Paul-Émile Therrien, Me Ronald Robichaud, a entrepris, vendredi matin, le contre-interrogatoire de la fille de l’accusé, une femme âgée aujourd’hui de 46 ans.

L’avocat a entrepris son travail en la faisant expliquer différentes photographies, certaines de la chambre de la plaignante, d’autres sur le bord de la piscine.

Me Robichaud l’a aussi interrogée sur les emplois qu’elle a occupés, un travail dans une épicerie à Victoriaville, mais aussi celui de danseuse nue qu’elle a pratiquée à temps plein pendant environ huit mois à Saint-Hyacinthe, Granby et en Beauce. «Et à Victoriaville au Valentine?», lui a demandé l’avocat. «Non, jamais dans ma place», a-t-elle répliqué.

Elle a cessé la danse, a-t-elle dit, peu après avoir rencontré l’homme qui allait devenir son mari et qui n’appréciait pas ce travail.

Paul-Émile Therrien fait face à 10 chefs d’accusation, dont inceste. (Photo www.lanouvelle.net)

La présumée victime a aussi œuvré pendant 24 ans dans les bars à Victoriaville, Warwick, dans les régions de Drummondville et de Joliette.

À l’époque des bars, voyait-elle encore son père? «Je le voyais de temps à autre, a-t-elle répondu à Me Robichaud. Il est arrivé aussi que mes parents viennent à mon appartement.»

Une fois mariée (mariage célébré en 1998), la fréquence des visites chez son père a cependant diminué. «Mon mari ne l’aimait pas», a-t-elle fait savoir, estimant le nombre de visites à quelques-unes.

La plaignante a ensuite indiqué ne plus avoir revu son père depuis environ 11 ans. «La dernière fois, ce serait en 2007 avec mon garçon de 2 ans. À ma connaissance, mon fils ne serait allé chez mon père qu’à deux occasions», a-t-elle souligné.

La présumée victime a  reconnu sans hésitation avoir intenté une poursuite civile contre son père d’environ 425 000 $. «Oui, pour être indemnisée pour ce que j’ai vécu.»

À une autre question de l’avocat, elle  a expliqué ne pas avoir consulté un psychologue avant 2016 parce qu’elle n’en avait pas les moyens.

Apprenant que l’IVAC (Indemnisation des victimes d’actes criminels) pouvait défrayer les coûts, elle a entrepris vraisemblablement en novembre 2016 une thérapie de près de 70 heures à raison d’une fois par semaine et s’échelonnant sur une période d’un an et demi. Thérapie qui a pris fin vers mars, avril 2018.

Me Robichaud a, par ailleurs, voulu savoir à quel moment les deux sœurs (plaignantes) ont discuté des prétendus sévices subis. «C’était il y a 20 ans, ou entre 15 et 20 ans. Ça fait longtemps que ma sœur était prête. Elle savait aussi ce que j’avais vécu, elle était prête à porter plainte. Moi, je n’étais pas prête, j’avais peur de me faire tirer», a-t-elle confié.

Environ deux mois avant le dépôt des plaintes, les deux plaignantes ont discuté entre elles.

Avant la suspension de l’audience pour l’heure du lunch, Me Robichaud a multiplié les questions cherchant à savoir pourquoi on apprenait aujourd’hui qu’elle aurait discuté pour la première fois des sévices présumés avec sa sœur il y a une quinzaine d’années alors que ces propos ne figurent nulle part.

Il lui a exhibé sa déclaration faite au policier Gilbert Côté dans laquelle il est écrit qu’elle a renoué avec sa sœur en mars 2015 et qu’elle apprend qu’elle aussi aurait subi, comme elle, des abus sexuels.

«Pourquoi on apprend cela aujourd’hui?», l’interroge l’avocat. «J’ai répondu à la question», a dit la plaignante.

«Et pourquoi cela n’a jamais été dit avant?», a continué Me Robichaud. «Peut-être parce que la question n’a pas été posée», a-t-elle indiqué soutenant, en réponse à d’autres questions, avoir exprimé la vérité tant au policier qu’à l’enquête préliminaire.

La plaignante a aussi admis avoir revu sa sœur à quelques reprises depuis 2015, parlant de ce qu’elles ont vécu, mais, a-t-elle dit, sans aller au fond des choses. «Non, je n’ai pas parlé de ma version ou de ma déclaration avec ma sœur», a-t-elle affirmé à Me Robichaud.

Le contre-interrogatoire s’est conclu vers 16 h. Le juge Serge Francoeur de la Cour supérieure du Québec a ajourné l’audience à lundi. Le procès devant le jury de sept femmes et cinq hommes reprendra à 10 h 30 avec le prochain témoin du ministère public.