Club de golf Victo : faire changer les perceptions

VICTORIAVILLE. On l’appelle «le gros club». Partout en région, on le coiffe d’une réputation de lieu sélect, réservé à l’«élite». Pourtant, un important changement culturel s’est opéré au cours des dernières années au sein du Club de golf Victoriaville. Jadis privé, ce fleuron régional, construit en 1944, s’est démocratisé il y a une vingtaine d’années en ouvrant ses portes au grand public. Il n’a cependant jamais réussi à se défaire de cette image bourgeoise. C’est l’ambitieuse mission que s’est donnée le directeur général Alain Danault.

En poste depuis quatre ans, le conseil d’administration du Club lui a accordé un vote de confiance cet hiver en renouvelant son mandat pour les cinq prochaines années.

Le golf étant un sport ultraconservateur, le parcours de la rue Perreault n’y fait pas exception. Le directeur général travaille cependant d’arrache-pied pour briser ces conventions et ainsi changer la perception qu’ont les gens du Club de golf Victoriaville, et ce, dans le but avoué d’attirer les visiteurs et les nouveaux membres.

L’industrie du golf est en décroissance. Plusieurs études récentes l’ont démontrée au cours des dernières années. Le coût d’entretien des terrains, le vieillissement de la base de membres et le changement des habitudes des joueurs n’y sont pas étrangers. Pour survivre, les dirigeants doivent faire des pieds et des mains pour attirer leur clientèle. Plus que jamais, le Club de golf Victoriaville doit emboîter le pas pour demeurer au sommet.

Il reste que la réputation que le Club s’est forgée au fil des ans freine quelque peu son élan. Alain Danault lance, ni plus ni moins, un cri du cœur pour faire comprendre à tous que le Club de golf Victoriaville n’est plus ce qu’il était autrefois.

«Nous sommes victimes de perceptions. Les gens pensent encore qu’ils n’ont pas le droit de venir jouer ici et que c’est très huppé, entre autres. Pourtant, il y a un virage important qui a été pris il y a quelques années pour rendre le club plus accessible. On veut faire comprendre aux gens qu’ils sont les bienvenus», explique-t-il.

En effet, on a assoupli de nombreuses règles relatives à l’étiquette au cours des dernières années. Il n’est plus obligatoire de porter le polo dans les pantalons. À l’intérieur du clubhouse, on tolère également la casquette et le port du jeans. Ce ne sont que quelques exemples des changements qui ont été apportés afin de s’ouvrir à un plus large public. M. Danault reconnait que ce changement ne s’est pas fait sans heurt. Les membres les plus conservateurs n’ont pas tous emboîté le pas. Certains purs et durs tardent à faire preuve d’ouverture. M. Danault insiste sur le fait qu’ils doivent adopter le virage amorcé, et ce, pour le bien de l’institution.

«Dans nos discours de début de saison, on travaille très fort pour inciter les membres à bien recevoir nos visiteurs. Ils sont nos ambassadeurs. Il y a eu une époque où lorsqu’on entrait dans le club, les membres se retournaient pour nous regarder en se demandant qui on était. Aujourd’hui, on leur demande d’accueillir les visiteurs. Plus de 95% des membres y adhèrent. Il ne reste qu’un petit bout de chemin à faire. La clé est là. Le bureau de direction a beau être rempli des meilleures intentions qui soient, si les membres n’embarquent pas dans la parade, ça ne fonctionnera pas. Ils ont avantage à le faire, parce que plus nous accueillerons de nouveaux membres ou des visiteurs, plus nous serons en mesure de conserver des tarifs aussi avantageux. Ils figurent parmi les plus bas dans la province dans sa catégorie. Cela nous permettra également de garder le parcours en aussi bonne condition. Avoir un si beau terrain, ça coûte cher. L’équipement doit être adéquat», a-t-il expliqué.

Alain Danault ne craint pas les défis. Il est convaincu qu’il est possible de contrer la décroissance économique du golf. Avec son équipe, il a multiplié les promotions pour attirer les nouveaux joueurs. On a réussi à attirer la Coupe Canada Sani Marc, l’un des plus gros tournois professionnels au pays, assorti d’une bourse record de 50 000 $. Il reste désormais à se défaire de cette étiquette de club élite. Le temps, espère-t-il, fera son œuvre… à condition que tous y mettent du sien.

Ce changement de perception que souhaite la direction du Club de golf Victoriaville passe par de petits détails. On souhaite donc changer le surnom que l’on donne au terrain patrimonial des Bois-Francs. «Tout le monde l’appelle le gros club. Autant cette appellation est un compliment, autant ça peut faire un peu peur pour certains. On préfère l’appeler le beau club au sein du conseil d’administration», explique Alain Danault.

Le Club de golf Victoriaville n’est plus privé depuis une vingtaine d’année. Il est ouvert au grand public. On le considère donc comme étant un club semi-privé, qui compte 49 actionnaires. Les profits, s’il y en a, sont cependant réinvestis. «Les actionnaires n’en tirent pas profit. On réinvestit les profits s’il y en a pour que le club soit encore plus beau, qu’on soit encore meilleur», a partagé le directeur général.

Alain Danault admet que la compétition est forte dans le domaine golfique dans la région. De Plessisville à Asbestos, on compte huit parcours. «C’est beaucoup trop», reconnait M. Danault. Il reste que le Club de Victoriaville a le luxe de pouvoir miser sur deux parcours (il est également le propriétaire du Club Laurier de Princeville), d’un restaurant et d’une salle de réception pour boucler son budget annuel.

L’an dernier, on a joué plus de 26 000 rondes au Club de golf Victoriaville et 28 000 rondes au Club de golf Laurier. «C’est très bon!», commente le directeur général. La moyenne d’âge des membres est d’un peu plus de 57 ans. Ils sont 450 joueurs à posséder un abonnement saisonnier.

Alain Danault est conscient que le golf a déjà connu de meilleurs jours au Québec. Il estime néanmoins que le sport s’avère en bonne santé, il s’agit simplement de faire les choses différemment. «Soit qu’on regarde les études et la situation économique et on pleure. Où soit qu’on fonce, qu’on s’ajuste à la réalité du marché Je suis chanceux d’avoir un conseil d’administration aussi ouvert aux nouvelles idées. Ça facilite beaucoup notre travail. C’est à nous d’être créatif», a-t-il dit.

Alain Danault ne veut plus devoir composer avec des visiteurs ayant vécu de mauvaises expériences sur le parcours en raison du mauvais accueil d’un membre. Il estime que la majorité d’entre eux ont adhéré au changement philosophique opéré il y a quatre ans. «Il y a des gens qui ne seront jamais à l’aise de jouer ici, mais je ne veux plus que ce soit parce qu’ils ne se sentent pas les bienvenus. Il faut que ce soit parce qu’ils ne sentent pas que leur jeu est à la hauteur du parcours», a-t-il lancé.