Un entrepreneur dénonce le zèle des contrôleurs routiers

VICTORIAVILLE. Renaud Croteau, un résident de Tingwick, travaille depuis plus de 30 ans en excavation. Au bout du rouleau cependant, il décide de rendre les armes, excédé, dit-il, par le zèle des contrôleurs routiers avec lesquels il a maille à partir depuis plusieurs années.

Renaud Croteau possède un camion et une remorque ouverte pour transporter sa machinerie. «Chaque fois que je rencontre des contrôleurs, ils viennent vérifier. Quand ça ne fait pas, ils se mettent à trois, comme si j’avais tué quelqu’un», note l’entrepreneur.

«À une occasion, on m’a reproché cinq infractions d’un seul coup, des constats totalisant 3210 $», précise-t-il. Le citoyen de Tingwick a tenté, sans succès, de faire valoir son point de vue devant le Tribunal.

En janvier dernier, M. Croteau s’est, de nouveau, retrouvé, en Cour, se défendant seul. «J’avais toutes les preuves, affirme-t-il, mais j’ai perdu.»

Au fil des ans, on lui a reproché diverses infractions, d’une plaque endommagée ou illisible à des attaches non conformes en passant par une omission d’être inscrit à la Commission des transports du Québec. «J’ai toujours été inscrit, j’ai payé ma cotisation chaque année. J’ai été intercepté tellement de fois qu’on l’aurait noté si je n’avais pas été inscrit», soutient Renaud Croteau.

Sa dernière inscription, il l’a payée en février 2014. Cette année, il ne l’a pas renouvelée. «Tout est à vendre, je suis écoeuré, confie-t-il. Pourtant, j’ai toujours fait ce qu’il fallait pour être conforme, même si je trouvais que ce qu’on proposait ne tenait pas debout.»

S’il a subi des revers devant les instances judiciaires, il a vécu des victoires aussi. «On gagne la moitié du temps, dit-il. On nous accuse de n’importe quoi pour l’argent. Cela n’a même pas rapport avec la sécurité.»

Renaud Croteau ne s’offusque pas tant des normes en vigueur que de la manière dont les contrôleurs les interprètent. «L’interprétation diffère d’un contrôleur à l’autre, prétend-il. Plusieurs cultivateurs me racontent aussi différentes situations vécues. Et ceux qui font de l’excavation en auraient long à raconter. Il faudrait que les gens se plaignent face au zèle.»

Selon lui, cela se rapproche du harcèlement. Toute cette situation affecte, dit-il, sa santé. «J’en ai fait de la haute pression. Ma femme m’a dit que cela allait me rendre malade. Je n’ai donc pas recommencé ce printemps.»

L’entrepreneur en excavation rappelle l’obligation annuelle de subir une inspection. «Quand on se fait intercepter, si les contrôleurs ne détectent aucune anomalie à première vue, ils creusent, ils cherchent des infractions», observe-t-il.

«C’est tiré par les cheveux, ils cherchent des poux, croit-il. On nous fait toujours passer pour des délinquants. On dirait qu’ils veulent éliminer les petites compagnies. Ils interprètent la réglementation comme ils veulent.»

Renaud Croteau plaide pour une révision des normes et pour une application intelligente des règles. «Qu’ils se servent de leur tête», conclut-il.

Pas besoin de chercher des poux

À la question posée à savoir si les contrôleurs routiers font du zèle en cherchant des poux, Benoît Labonté, contrôleur et patrouilleur routier, éclate de rire au téléphone. «On n’a pas besoin d’en chercher, les infractions nous tombent dans la face», répond-il.

Le www.lanouvelle.net a contacté Contrôleur routier Québec pour réagir aux propos de Renaud Croteau. «Notre travail consiste à assurer la sécurité, à veiller à la protection du réseau routier», explique Benoît Labonté.

Les contrevenants à répétition ne sont pas légion, selon lui. «Il y a certes toujours des récalcitrants qui ne sont pas foutus de respecter la loi, qui essaient de passer à côté. Quand une personne montre un bon vouloir, on lui donne la chance qu’il faut. Par contre, en présence d’une personne qui ne veut rien savoir, on va sévir», souligne M. Labonté, l’un des 15 patrouilleurs de la région de l’Estrie qui couvre le secteur de Victoriaville.

Le contrôleur routier assure que les patrouilleurs ne font preuve d’aucune discrimination. «Avec les différents outils dont nous disposons, avec l’expérience acquise, nous sommes en mesure de déceler les contrevenants. Les indicateurs de mentent pas. On ne fait pas de profilage», note-t-il.

Le champ d’action des contrôleurs routiers est vaste. Ils veillent au transport lourd, au transport des matières dangereuses, au transport de personnes, comme les autobus, le taxi. «Tout ce qui touche aux biens et aux personnes. Notre tâche est bien diversifiée, ce qui rend le travail moins routinier. Au fil des ans, des éléments se sont ajoutés à notre mandat, d’autres ont été enlevés», indique M. Labonté.

«En général, les contrôleurs se disent bien fiers de leur travail et des résultats obtenus», précise-t-il

S’ils étaient moins de 70 contrôleurs en 1992, l’année où Benoît Labonté a commencé, leur nombre dépasse aujourd’hui les 300 à la grandeur du Québec.

«Les routes québécoises sont-elles sécuritaires, en général?», a-t-on demandé au contrôleur routier. «On s’arrange pour qu’elles le soient», a répondu M. Labonté.