Les Frenchmen de Victoriaville

HOCKEY. L’anglais est la langue officielle et universelle du monde du hockey de haut niveau. Dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec, les entraînements ont généralement lieu dans la langue de Shakespeare. On parle de «forecheck» pour désigner l’échec avant, de «breakout» pour une sortie de zone ou de «poke check» pour parler d’harponnage. Certains entraîneurs québécois ne retournent à leur langue maternelle que pour évacuer leur colère, le vocabulaire blasphématoire y étant beaucoup plus diversifié…

On favorise l’anglais pour aider, notamment, les jeunes hockeyeurs à se préparer pour l’étape suivante. L’entraîneur-chef des Tigres, Louis Robitaille, est d’ailleurs bien placé pour comprendre l’importance de maîtriser l’anglais dans les rangs professionnels.

«Je me rappelle d’un entretien que j’ai jadis eu avec Jacques Lemaire. Tout s’était déroulé en anglais…», s’est-il rappelé. Pourtant, tant Lemaire que Robitaille ont grandi dans un univers on ne peut plus francophone.

Le pilote des Tigres utilise donc couramment l’anglais dans le cadre de ses fonctions. Depuis l’ouverture du camp d’entraînement, cependant, le français prend une place très importante au sein de l’équipe puisque tous les joueurs, sauf les deux Russes, sont francophones ou bilingues. On se surprend, à l’occasion, de voir Robitaille diriger ses troupes sur la surface glacée presqu’entièrement en français.

«Je veux que tout le monde comprenne les consignes. Puisque je viens d’arriver, les exercices que je propose sont parfois nouveaux pour certains. Je veux être sûr que tout le monde saisisse bien. La majorité du groupe est francophone. Il faut donc s’y adapter. Lorsque j’étais à Drummondville, on a constaté que certains joueurs francophones ne comprenaient pas toujours bien les consignes lorsqu’elles étaient livrées en anglais», a-t-il expliqué.

Le Russe Ivan Kosorenkov, quant à lui, regarde surtout les explications au tableau, lorsque l’entraîneur les griffonne. «Ivan possède un sens du hockey au-delà de la moyenne. Il comprend très rapidement même si ce n’est pas dans sa langue», a enchaîné Robitaille.

Ce n’est qu’un pur hasard si la presque totalité de l’alignement des Tigres est francophone cette saison. Jamais le directeur général Kevin Cloutier n’a eu l’objectif d’uniformiser la linguistique, assure-t-il. «Et je ne me priverai jamais de mettre la main sur un bon joueur en raison de sa langue», lance-t-il.

Il rappelle qu’avec l’Océanic de Rimouski, l’année où l’équipe a raflé les grands honneurs, environ la moitié du vestiaire parlait anglais, l’autre français. «Je n’y vois pas de problème. L’important, c’est surtout d’avoir un bon leadership au sein du groupe pour intégrer tout le monde», a-t-il poursuivi.

Robitaille, s’il utilise régulièrement le français pour s’adresser à ses protégés depuis l’ouverture du camp d’entraînement, souligne qu’il est néanmoins important d’intégrer l’anglais. Il utilise donc un vocabulaire hybride. «Au niveau professionnel, tout se fait en anglais. Il est donc important que tous maîtrises le langage hockey dans cette langue», a-t-il conclu.