«Je suis fier de ma carrière de hockeyeur» – Alexandre Daigle

Alexandre Daigle a 18 ans. Il vient de récolter un prodigieux total de 137 points en 53 parties sous les couleurs des Tigres. Malheureusement pour la troupe des Bois-Francs, son parcours se termine au premier tour éliminatoire après six rencontres. L’équipe aspirait aux grands honneurs, ayant fait l’acquisition de Matthew Barnaby, notamment, pour galvaniser les troupes. Quoi qu’il en soit, Daigle, qui a fait résonner le fameux «bip bip» du Roadrunner durant toute la saison dans les enceintes acoustiques de l’Amphithéâtre Gilbert-Perreault, s’apprête à vivre l’un des moments les plus exaltants de sa vie.

Confortablement assied sur un siège du Colisée de Québec entouré de sa famille, il attend patiemment que le commissaire Gary Bettman, fraîchement arrivé à la tête de la Ligue nationale de hockey, démarre le repêchage. L’agent de Daigle, Pierre Lacroix, est non loin de son protégé.

Tous s’attendent à ce qu’Alexandre Daigle soit réclamé au premier rang au total, mais personne n’écarte une surprise.

Randy Sexton, directeur général des Sénateurs, se présente au micro. Il brise enfin le suspense avec cette phrase : «The Ottawa Senators welcome Alexandre Daigle!» Le jeune surdoué enlace son père, omniprésent dans sa carrière, puis sa mère, visiblement très fière. «Ça compte beaucoup que ma famille vive ce moment avec moi. Ils m’ont toujours supporté, ont assisté à tous mes matchs et tous mes entraînements», lance-t-il en direct au petit écran lorsqu’un journaliste l’accoste avant qu’il prenne le chemin de la scène.

Daigle retire son veston, empoigne la main des membres de l’état-major des Sénateurs, enfile le chandail et met la casquette. Visiblement fier du fait accompli, yeux brillants, il frappe sa poitrine directement sur le logo de l’équipe et lève la main, l’index pointant au ciel. On a compris, par ce geste, qu’il venait de réaliser l’objectif le plus important à ses yeux, celui de devenir le meilleur de sa cuvée lors du repêchage. «J’étais très fier et je le suis encore aujourd’hui», lance-t-il 23 ans plus tard. Le 26 juin 1993 demeure l’un de ses plus beaux souvenirs.

Si l’on ressasse ce vieux souvenir, c’est parce que les Tigres retireront son numéro 91 en février prochain. Daigle, aujourd’hui loin du froid des arénas depuis sa retraite en 2010, accueille cet honneur avec grand plaisir. «Je suis vraiment content. Je ne m’y attendais pas. C’est vraiment un bel honneur», dit-il en entrevue au www.lanouvelle.net.

Ses deux médailles d’or lors du championnat mondial junior, son passage avec les Tigres, son séjour dans la Ligue nationale de hockey, sa coupe Spengler et ses deux championnats à Davos dans la Ligue élite suisse figurent également parmi les moments clés de sa carrière à ses yeux.

«Je suis fier de ma carrière de hockeyeur, de mon repêchage, d’avoir disputé plus de 600 matchs dans la Ligue nationale, d’avoir vécu l’expérience européenne. Mes bons souvenirs sont nombreux», poursuit-il.

Daigle se souvient combien il a été difficile de quitter le berceau familial lavallois à 16 ans pour se joindre aux Tigres. L’adaptation au hockey junior a été immédiate sur la glace, mais pas aussi évidente dans sa vie quotidienne.

«Quitter la maison à 16 ans a été tout un choc. Il n’y a que le hockey qui force un ado à quitter le nid familial à cet âge. J’ai des enfants. Je n’ose même pas imaginer ce qui arriverait si l’un d’entre eux devait passer par là quand ils auront cet âge», lance le père de deux fillettes de 8 et 7 ans et d’un garçon de 4 ans.

Membre de l’organisation des Tigres, Michel Hinse a joué un rôle important durant son séjour avec l’équipe, rappelle-t-il. «Tout comme ma famille de pension, les Desharnais, qui ont été importants pour moi. Ils ont même assisté à mon mariage», note-t-il.

Daigle a toujours fait face à la musique et répondu franchement aux nombreuses questions des journalistes. Il n’a jamais tenté s’évader dans les clichés. Les projecteurs, constamment braqués sur lui malgré son jeune âge, ne l’ont jamais affecté, dit-il encore aujourd’hui. Il estime qu’il est sans doute plus difficile d’être un tel phénomène sur patins de nos jours avec l’avènement des médias sociaux, entre autres.

«Ça a toujours été un happening. Je donnais plusieurs entrevues, c’est vrai, mais la ligue n’était pas aussi médiatisée à l’époque. Les Sidney Crosby et Conor McDavid de ce monde ont sans doute vécu une expérience beaucoup plus folle à ce chapitre», poursuit-il.

Daigle piaffe d’impatience de vivre cette soirée d’immortalisation, le 17 février, à l’Amphithéâtre Gilbert-Perreault. Dix jours plus tôt, il célébrera son 42e anniversaire de naissance. On ne pouvait lui offrir plus beau cadeau. «C’est vraiment spécial. Ce sera une belle occasion de montrer à mes enfants cette partie de ma vie qu’ils n’ont pas vécue», conclut-il.