Ne pas faire grise mine

Après la fermeture de la mine d’amiante et le coûteux fiasco de Magnola, un fonds de 50 millions a été octroyé pour la diversification économique. Cette somme visait l’aide nécessaire pour sortir la région de la mono-industrie minière. L’agroalimentaire s’est beaucoup développé récemment.

Depuis une quinzaine d’années, des mobilisations citoyennes ont préservé la région d’un mégadépotoir (sur l’emplacement de la mine fermée), de forages pour le gaz de schiste (dont un puits d’exploration collé au village de Wotton a fait chuter la pression d’eau de la municipalité) et d’un projet de mine d’or à ciel ouvert (genre Malartic) entre Wotton et Saint-Camille. Cette dernière aurait balafré les terres agricoles sur près de 2 km et les aurait gorgées de 0,5 tonne de cyanure résiduel, chaque jour des 15 années d’exploitation prévues.

En 2018 a eu lieu « un forum public sur les activités minières et le développement de la MRC des Sources ». Un comité de citoyens s’est vu attribuer la tâche de déterminer quels coins du territoire seraient incompatibles avec l’activité minière. Voilà le piège : outre que leurs recommandations ne seront pas forcément prises en compte, il ne leur était pas permis de protéger l’ensemble de la MRC. Ça revient à leur demander quelles portions de territoire seraient sacrifiées… Comme si on vous demandait de désigner un de vos enfants pour l’envoyer à la guerre! Nous apprenons qu’une « ultime consultation » aura lieu le 15 février concernant les activités minières dans la MRC des Sources. Le journaliste de Radio-Canada mentionne alors que 73% du territoire sera préservé, mais pas forcément toutes les terres agricoles. Certaines maisons ou certains hameaux pourraient aussi être expropriés pour satisfaire des entreprises privées, en quête de métaux rares principalement. Donc, plus du quart de notre coin de pays est menacé… Nous sommes tous concernés, car nous partageons les mêmes nappes phréatiques et respirons le même air. Le petit paradis où vous habitez est-il menacé par des permis (claims miniers) déjà octroyés par le provincial? Allez consulter « mes requêtes SIGEOM ».

Notre province est encore assujettie à la loi sur les mines, vieille de plus d’un siècle, décrétant que le sous-sol et ses richesses appartiennent à l’État. Le gouvernement Legault a dévoilé son insatiable appétit industriel; voulant augmenter la production énergétique de 50%… Ce gouvernement a récemment octroyé deux fois plus de permis miniers. Hormis une action collective, notre seul recours est de refuser l’accès à nos terrains à ces entreprises minières pour qu’elles ne puissent y faire les prélèvements nécessaires pour valider une possible exploration. Quels seraient ces besoins démesurés alors que la planète maganée requiert une sobriété de nos dépenses énergétiques? Pour vendre de l’électricité aux États-Unis (et rapatrier en échanges leurs boues toxiques maintenant interdites d’épandage sur les terres agricoles du Maine)? Pour avoir plus de centres de données aussi voraces en électricité qu’en données personnelles? Pour changer de cellulaire aux trois ans? Pour n’avoir plus que des voitures électriques dont l’empreinte environnementale est très discutable. N’est-ce pas aussi fragile en cas de panne électrique prolongée, comme lors du verglas de 1998?

Sylvie Berthaud

Saint-Adrien-de-Ham