Maisons des aînés: seulement 40 % des places promises prêtes avant l’élection.

QUÉBEC — Le premier ministre François Legault n’aura pas tenu son engagement d’offrir aux personnes âgées 2600 places d’hébergement en maison des aînés durant le présent mandat, qui prend fin le 3 octobre.

Mais d’ici la fin septembre, si tout se passe bien, on peut espérer voir apparaître 1080 places, soit environ 40 % du total promis en 2018. C’est ce qu’indique la version la plus récente de l’échéancier des travaux produit par la Société québécoise des infrastructures (SQI), et obtenu par La Presse Canadienne.

Bientôt quatre ans après l’élection de la Coalition avenir Québec (CAQ), pas un seul aîné n’a encore pu déposer ses valises dans une de ces résidences haut de gamme, promesse phare du parti en 2018 et solution de rechange aux centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).

La SQI ne s’aventure pas à fixer une date – ou une année – pour la livraison de l’ensemble du parc de 46 maisons promises (celles pour les aînés et celles dites «alternatives», pour des personnes handicapées). Certaines pourraient n’ouvrir leurs portes qu’en 2025. Mais la plupart devraient accueillir des aînés en 2023 et 2024, selon les prévisions actuelles. Les aînés devront donc faire preuve de patience.

Personne ne pourra nier que la formule choisie est fort coûteuse. Au départ, la construction de ce nouveau réseau d’établissements d’hébergement ne devait pas dépasser 1 milliard $. Quatre ans plus tard, l’estimation a presque triplé, rendue à 2,8 milliards $, un montant qui risque fort d’évoluer encore. 

Le budget anticipé de fonctionnement a suivi la même courbe, ayant plus que doublé en quatre ans, passant de 245 millions $ en 2018 à 500 millions $ annuellement, selon les plus récentes estimations.

Actuellement, 43 maisons sont en chantier et d’autres (à Gatineau-Est, Sainte-Rose et aux Îles-de-la-Madeleine) n’existent pour l’instant que sur papier, et verront le jour à une date indéterminée dans les années à venir.

Aux 1080 places livrées avant la fin du mandat, donc probablement en septembre, devraient s’ajouter en principe 1560 autres places rendues disponibles avant la fin de l’année, promet la SQI, ce qui donnerait au total 2640 places d’ici environ six mois.

Un accès à géométrie variable

Le projet initial devait comporter 33 maisons des aînés construites dans le présent mandat et réparties sur tout le territoire. Dans les faits, d’ici fin septembre, il y en aura 31 (sur les 46 apparaissant désormais dans le projet modifié) qui devraient être prêtes, réparties dans 14 villes du Québec, qui souvent en abriteront plus d’une.

Une analyse de leur répartition sur le territoire montre qu’on assiste à un exercice à géométrie très variable. Selon leur lieu de résidence, des aînés seront donc plus chanceux que d’autres, car l’accès à ces nouvelles constructions de qualité supérieure variera énormément d’une région à l’autre.

Par exemple, selon le tableau fourni par la SQI, parmi toutes les maisons censées être disponibles avant le 1er octobre aucune ne sera située à Montréal ou Québec, pourtant les deux principales agglomérations québécoises. 

Par contre, les aînés qui habitent la grande région des Laurentides seront de loin les plus privilégiés, avec 15 maisons qui les attendront, soit la moitié du total. La grande majorité (13) devraient être complétées d’ici septembre. La palme, toutes catégories, des villes les plus choyées, sera Sainte-Agathe-des-Monts, qui compte une population d’environ 10 000 personnes et verra bientôt éclore pas moins de cinq maisons des aînés.

Toujours dans la région des Laurentides, on en trouvera trois dans Prévost, la circonscription de la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, quatre dans Blainville, la circonscription du président du caucus du gouvernement, Mario Laframboise, et cinq dans Bertrand, le fief de la ministre des Relations internationales, Nadine Girault, voisine de comté de la ministre Blais.

Un peu plus à l’est, dans Lanaudière, la circonscription de l’Assomption, représentée par le premier ministre Legault, aura droit à trois maisons des aînés, toutes livrées en principe avant l’échéance électorale.

Les autres maisons qui feront partie de cette première cohorte censées être livrées au plus tard en septembre seront situées à Rivière-du-Loup, Chicoutimi, Roberval, Sherbrooke, Rivière-au-Renard, Lévis, Black Lake, Mascouche, Repentigny, Sainte-Anne-des-Plaines, Prévost, Blainville et Sainte-Agathe-des-Monts. 

Il serait cependant hasardeux de dire quand les résidants vont pouvoir s’y installer. Ces derniers ne pourront pas choisir entre une place en CHSLD et une autre en maison des aînés. La sélection s’effectuera en fonction de la date d’inscription sur la liste d’attente, qui compte actuellement 3864 noms. 

Selon M. Legault, la création des maisons des aînés devait éliminer la liste d’attente, qui compte actuellement 1264 noms de plus qu’en 2018.  

Sur le plan administratif, ces deux modèles de centres d’hébergement, pourtant fort différents en termes de qualité de services offerts, seront donc placés sur un pied d’égalité, en termes d’offre aux futurs résidants.

Les maisons des aînés seront des établissements modernes et sophistiqués, climatisés, à dimension humaine, avec de petites unités et des services plus personnalisés que ceux offerts dans les CHSLD, servant de repoussoirs aux yeux du gouvernement, trop souvent vétustes et de qualité variable, des lieux «que tout le monde redoute», disait M. Legault en 2018.

Une fois construites, les maisons devront être aménagées et le ministère de la Santé devra trouver le personnel requis, en pleine période pénurie de main-d’oeuvre. Le processus d’embauche a débuté, indique le ministère, qui prévoit devoir embaucher entre 3800 et 4000 employés pour faire fonctionner 33 maisons. Le ratio résidant/personnel soignant n’a pas encore été fixé pour ces nouveaux établissements.