Les sociétés qui se vantent d’utiliser des énergies renouvelables pourraient exagérer

Les entreprises qui se vantent d’utiliser des énergies renouvelables pourraient exagérer leurs contributions à la lutte contre le changement climatique, selon de nouvelles recherches.

Anders Bjorn, chercheur à l’École de gestion de l’Université Concordia, à Montréal, vient de publier un article sur ce sujet dans la revue «Nature Climate Change». Son article examine comment les entreprises rendent de plus en plus compte de leurs efforts pour réduire la quantité de gaz à effet de serre qu’elles émettent.

L’un des moyens courants pour les entreprises d’essayer de réduire leur empreinte carbone consiste à «acheter» une certaine quantité d’énergie auprès d’un «producteur vert». Bien que l’électricité qu’elles consomment provienne toujours du réseau, les entreprises obtiennent un certificat d’«énergie renouvelable», qu’elles peuvent ensuite appliquer à leurs émissions réelles.

On espérait ainsi que la demande pour ces certificats ferait augmenter leur valeur et encouragerait l’essor de l’énergie renouvelable. Mais le professeur Bjorn conclut que «dans la plupart des cas, ça ne s’est pas produit».

Des recherches antérieures avaient montré que ces certificats ajoutent, au mieux, moins de 5 % au prix de l’électricité, ce qui n’est pas une prime suffisante pour stimuler les investissements et augmenter la production d’énergie renouvelable.

Selon M. Bjorn, cela signifie que l’achat du certificat n’a pas fait grand-chose pour promouvoir la croissance des énergies renouvelables. Les détails de «qui achète quoi» peuvent changer, certes, mais l’équilibre global entre la production de combustibles renouvelables et fossiles, lui, ne change pas.

«Le certificat n’est pas ce qui a provoqué la production d’énergie renouvelable, dit-il. Ils s’attribuent le mérite de quelque chose qui se serait produit de toute façon.» Pourtant, les entreprises qui achètent ces certificats revendiquent la pleine valeur de leurs réductions d’émissions.

M. Bjorn et ses collègues ont examiné 115 entreprises du monde entier qui ont rejoint la «Science Based Targets Initiative», parrainée par des organismes tels que les Nations unies et le Fonds mondial pour la nature. Il a découvert que ces entreprises affirmaient avoir réduit leurs émissions d’environ 30 % en moyenne entre 2015 et 2019.

«Si toutes les émissions étaient réduites à ce rythme, nous atteindrions nos objectifs de l’Accord de Paris de 1,5 degré» de réduction des températures, a déclaré M. Bjorn. Mais lorsque les chercheurs ont creusé les chiffres de l’industrie, ils ont découvert qu’environ les deux tiers de ces réductions proclamées provenaient en fait de certificats d’«énergies renouvelables». Lorsque l’on enlève ces certificats, les réductions d’émissions réelles de ces entreprises étaient à peine de 10 % — bien en deçà du rythme nécessaire pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris, souligne M. Bjorn.

Le chercheur estime que si on voulait augmenter la production d’énergie renouvelable, on devrait plutôt utiliser des accords d’achat d’énergie — des contrats à long terme avec des producteurs d’énergie verte, ce qui fournit une stabilité financière et des revenus nécessaires à la croissance de ce secteur.

«Si vous le faites par le biais d’accords d’achat d’énergie, il y a beaucoup d’indications que ça conduit réellement à plus d’énergies renouvelables, en raison de ce prix fixe à long terme — ce qui fait une différence sur les décisions d’investir ou non dans la production de plus d’énergies renouvelables.»

Pendant ce temps, le professeur Bjorn exhorte les citoyens à prendre avec un grain de sel les affirmations des entreprises sur leurs réductions rapides d’émissions de GES. «Lorsque vous regardez toutes ces entreprises qui ont signalé des réductions d’émissions, vous auriez probablement l’idée que les émissions totales du réseau diminuent très rapidement. Ce qui n’est peut-être pas le cas.»